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Déjà fragile, le secteur de la restauration collective plombé par la crise sanitaire

La restauration collective fragilisée par la crise sanitaire

La restauration collective fragilisée par la crise sanitaire - Philippe Lopez-AFP

Le premier confinement de 2020 a entraîné une chute de 40% du chiffre d'affaires de la restauration collective en mai par rapport à janvier, selon l'Insee. Un coup dur pour un secteur en nette perte de vitesse depuis plusieurs années.

25 milliards d’euros. C’est le chiffre d’affaires généré par la restauration collective en France en 2019, dont près de 11 milliards d’euros tirés de la restauration collective dite "concédée", c’est-à-dire confiée à un prestataire. Un mode de gestion surtout répandue dans les restaurants d’entreprises et administrations alors que la restauration collective dans les écoles par exemple est majoritairement autogérée.

Et comme beaucoup d’autres, le secteur de la restauration collective concédée a été frappé de plein fouet par la crise sanitaire en 2020. Le premier confinement a notamment entraîné une chute de 40% de son chiffre d’affaires en mai par rapport à janvier, selon une étude de l’Insee publiée ce jeudi. Mais les entreprises de la restauration collective ont relativement moins souffert de la première vague épidémique que leurs homologues de la restauration commerciale, contraints de fermer leurs établissements.

Télétravail, distanciation sociale, livraisons

Il n’empêche, la restauration collective a vu sa fréquentation dégringoler l’an passé sous l’effet de la fermeture des établissements scolaires ou universitaires, de la suspension d’activité dans certaines entreprises et du développement du télétravail.

Et une fois le confinement levé, elle n’a pas pu profiter d’une reprise aussi dynamique (-32% à l’été par rapport à janvier) que celle observée dans les restaurants traditionnels (-7%) en raison de la fermeture des cantines scolaires à cette période, du maintien du télétravail, des mesures de distanciation et du développement de la livraison de repas directement sur son lieu de travail.

En septembre, la rentrée scolaire n’a par ailleurs pas suffi à relancer l’activité (-24%). Au final, seule la restauration collective dans le domaine de la santé (Ehpad) a été épargnée par la crise.

Une croissance en berne avant la crise sanitaire

La pandémie de Covid-19 a porté un nouveau coup dur à un secteur déjà affaibli par des difficultés structurelles alors que les restaurants d’entreprises et d’administrations voient leur fréquentation, de même que leur ticket moyen, reculer depuis plusieurs années.

Ainsi la croissance de la restauration collective concédée a connu un net ralentissement à partir de la crise financière de 2009: +0,6% en volume par an entre 2010 et 2019, contre +2,5% entre 2005 et 2010. A titre de comparaison, la restauration commerciale enregistrait encore une progression de 3,4% par an avant le début de l’épidémie de Covid-19.

Le taux de marge de la restauration collective a quant à lui été divisé par deux entre 2010 et 2018, passant de 13 à 7%. Et pour cause, le secteur a vu sa masse salariale progresser chaque année (+3,2% par an) à un rythme plus élevé que la valeur ajoutée (+2,2%). Un constat également valable pour la restauration commerciale (-6 points sur la période), à la différence que cette dernière partait d’un taux de marge bien plus important en 2010 (23%).

Poids des matières premières élevé

La restauration collective concédée doit aussi composer avec des achats de matières premières et autres produits alimentaires particulièrement élevés. Ils représentent en effet 29% du chiffre d’affaires du secteur, contre 20% dans la restauration commerciale "en raison, probablement, d’un moindre recours à des produits déjà transformés", écrit l’Insee. Résultat, la restauration collective est très sensible à l’évolution des prix des produits alimentaires.

Point positif cependant, le taux de rentabilité de la restauration collective concédée est resté élevé (16% contre 12% dans la restauration commerciale). Ce qui s’explique "par la disponibilité d’une trésorerie abondante, liée au mode de règlement (paiement des fournisseurs à terme, mais perception immédiate ou rapide du prix du repas) et permettant de dégager un besoin en fonds de roulement négatif", note l’Insee.

Le taux d’investissement du secteur demeure en revanche faible: 6% contre 13% dans l’ensemble de la restauration. Au final, la santé est le seul segment de la restauration collective à être resté dynamique ces dernières années "du fait de l’essor des maisons de retraite et des Ehpad", souligne l’Insee.

Une activité très concentrée

Représentant 200.000 emplois, le secteur de la restauration collective concédée regroupe 484 entreprises dont 419 indépendantes et 65 organisées en groupe. Si elles sont largement majoritaires, les entreprises indépendantes ne représentent que 10% du chiffre d’affaires du secteur, contre 87% pour les entreprises multinationales.

Plus encore, trois entreprises (Compass, Elior et Sodexo) se partagent 70% du chiffre d’affaires de la restauration collective. Même si elles perdent peu à peu des parts de marché (-12 points entre 2010 et 2018) "du fait de l’offensive de plus petits opérateurs sur le terrain de la différenciation et de la proximité, qui valorisent notamment le bio et le local", observe l’institut de la statistique.

https://twitter.com/paul_louis_ Paul Louis Journaliste BFM Eco