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Un train très rétro pour découvrir une région italienne méconnue

Le Rotaie rêve de restaurer toute la ligne, qui va de Naples, sur la mer Tyrrhénienne, à Pescara, sur l'Adriatique, en traversant la botte italienne dans sa largeur

Le Rotaie rêve de restaurer toute la ligne, qui va de Naples, sur la mer Tyrrhénienne, à Pescara, sur l'Adriatique, en traversant la botte italienne dans sa largeur - Le Rotaie

Chaque week-end entre Rome et la station de ski du Roccaraso, un train presque centenaire restauré par des passionnés permet de découvrir les paysages montagneux du Latium et des Abruzzes. Lors des arrêts, les passagers peuvent acheter fromages et saucissons locaux. Une source de revenus bienvenue dans ces villages encore isolés.

Les nazis et les coupes budgétaires ont failli avoir raison de cette ligne ferroviaire délaissée par la FS, l'équivalent italien de la SNCF. Mais une poignée de passionnés lui a redonné vie. Les voitures presque centenaires emmènent les touristes de Rome jusqu'à la station de ski de Roccaraso, dans le coeur de la botte italienne, grâce à 120 kilomètres de rails perchés sur une série de viaducs vertigineux. Le tronçon entre la ville de Sulmona et la station de Roccaraso, qui monte jusqu'à 1269 mètres d'altitude, véritable prouesse technique tout en courbes élégantes le long de pentes escarpées, a été ouvert en 1897.

Décrit comme "un musée à petite vitesse", le train franchi une myriade de tunnels et de boyaux, longe des lacs gelés et des forêts enneigées, laissant parfois apercevoir quelques loups, voire, à l'occasion, un ours. "C'est vraiment une expérience fascinante, on remonte dans le temps, avec ces trains lents plutôt que ceux rapides où l'on ne voit rien dehors", se réjouit Elisabetta, une touriste italienne venue en famille et ravie de pouvoir retrouver "les bruits du train".

Une ligne abandonnée en 2011

Au début du siècle dernier, la ligne a joué un rôle vital pour relier les villages de montagne isolés du Latium et des Abruzzes, désormais à moins de deux heures de route de Rome. Détruite pendant la Seconde Guerre mondiale par une armée allemande qui reculait face aux partisans appuyés par les alliés, la ligne a rouvert en 1960. Mais au fil du temps, l'amélioration des routes et l'absence d'investissements dans la voie ferrée ont peu à peu rendu obsolète cette petite ligne finalement abandonnée en 2011, après des décennies de réductions de budget

En 2014, des passionnés de l'association Le Rotaie se sont alliés avec la Fondation italienne du chemin de fer pour rouvrir la "Napolitaine". "Cette ligne allait jusqu'au port de Naples", explique Claudio Colaizzo, membre de Le Rotaie et agent de voyage. De là, nombre de paysans des Abbruzes ont embarqué pour l'Amérique. "La ligne était aussi très importante pour tous ceux qui habitaient dans la région, parce qu'elle permettait aux gens d'aller à l'école ou au travail même par mauvais temps, quand il y avait deux mètres de neige", raconte-t-il.

Des réservations complètes pour 2019

Les voitures, où chaque rang a sa porte d'accès et surnommés pour cette raison "wagons aux cent-portes", sont tirés par une locomotive diesel des années 1970, un modèle relativement récent mais aux émanations encore malodorantes. A chaque arrêt, les passagers peuvent descendre acheter des fromages ou des saucissons locaux, une source de revenus bienvenus dans ces villages encore isolés.

Originaire de la région, Vinicio D'Agostino joue du tambour dans un groupe folklorique qui vient apporter une touche musicale au voyage. Le septuagénaire se souvient avoir pris le même train en 1969... pour partir faire son service militaire: "Cinquante ans plus tard, c'est très émouvant de remonter à bord".

Le Rotaie rêve de restaurer toute la ligne, qui va de Naples, sur la mer Tyrrhénienne, à Pescara, sur l'Adriatique, en traversant la botte italienne dans sa largeur. Pour l'instant, le train fait un aller-retour de Rome à Roccaraso chaque weekend, pour un coût de 30 à 40 euros selon que le voyageur préfère les sièges en velours de la première classe ou les bancs en bois de la seconde. Mais, soyez patient. On se bouscule pour réserver une place dans ce train bucolique. Pour 2019, il n'y a déjà plus aucune place disponible.

Coralie Cathelinais avec AFP