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Tarifs, nombre de places: de plus en plus d'inégalités dans l'accès aux maisons de retraite

Qu'il s'agisse de tarifs ou de places disponibles, la fracture territoriale qui frappe les seniors ne cesse de grandir, alerte l'association UFC-Que Choisir? dans une étude.

Les tarifs très élevés des maisons de retraite en France ne sont pas une nouveauté. Pour les personnes âgées, la facture médiane d’un EHPAD s’élevait en 2019 à 2004 euros par mois, d'après les données de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), qui est le gestionnaire de la branche autonomie de la Sécurité sociale.

Un tarif qui pourrait en fait être plus élevé. Selon une vaste étude menée par l'association de défense des consommateurs UFC-Que Choisir?, ce prix moyen serait plus de 2214 euros par mois. Mais au-delà de cette moyenne, ce sont bien les disparités géographiques qui inquiètent. Qu'il s'agisse de tarifs ou de places disponibles, la fracture territoriale qui frappe les seniors ne cesse de grandir, alerte l'association.

41 places pour 1000 habitant de plus de 75 ans à Paris

L’étude montre ainsi que le nombre de places peut varier du simple au quadruple selon les départements: alors qu’en Lozère il existe 169 places pour 1000 habitants de plus de 75 ans, à Paris ce nombre tombe à 41.

"Au global, les places en EHPAD ne sont pas en mesure de répondre à une demande potentielle de l’ensemble des personnes dépendantes, puisque moins de la moitié (47%) de celles-ci sont en mesure d’intégrer un EHPAD", souligne l'étude.

Côté tarifs, si la moyenne est de 2214 euros par mois, là encore, l'étude confirme des écarts de plus en plus importants. Alors que dans la Meuse, un résident paye en moyenne sa chambre 1749 euros par mois, dans le Rhône, le tarif moyen mensuel passe à 2521 euros. Il grimpe à 2623 euros en Corse-du-Sud, presque 2700 euros dans les Alpes-Maritimes et un plus haut de 3700 euros par mois à Paris.

Pris mensuel moyen pour une chambre en EHPAD
Pris mensuel moyen pour une chambre en EHPAD © UFC-Que Choisir?
"En confrontant les prix départementaux des EHPAD aux niveaux de revenus des habitants, on constate non seulement que la fracture territoriale se confirme, mais qu’en plus les prix élevés des EHPAD excèdent partout le niveau de vie médian des habitants. Alors qu’en moyenne nationale les résidents doivent piocher 416 euros par mois dans leur épargne pour payer leur place, ce chiffre s’envole dans de nombreux départements, particulièrement en région parisienne (par exemple 1118 euros en Seine-Saint-Denis) et sur la côte méditerranéenne (par exemple 836 euros dans les Alpes-Maritimes)", analyse l'UFC-Que Choisir?

Privé: un surcoût qui peine à être justifié

Ces écarts sont encore plus importants en faisant la distinction entre les établissements publics et privés.

En moyenne une place en privé coûte 2898 euros par mois, contre 2147 euros pour les EHPAD associatifs et 1936 euros pour les EHPAD publics.

"Le surcoût du recours à un EHPAD privé par rapport à celui à un EHPAD public se manifeste dans l’intégralité des départements, et atteint des sommets en Loire-Atlantique (+ 1225 euros) ou encore en Ille-et-Vilaine (+ 1733 euros). Dès lors, plus la part des EHPAD privés est importante dans un département, plus le prix moyen d’une place en EHPAD est tiré vers le haut", souligne l'étude.

Ce qui a des conséquences sur les inégalités territoriales puisque les EHPAD privés sont parfois surreprésentés dans certains départements. "Ainsi, et alors qu’en moyenne nationale, les EHPAD privés possèdent 23% des places, leur part de marché excède 50% dans 8 départements avec un impressionnant record dans les Bouches-du-Rhône (63,6%)".

Peu de nouvelles places dans le secteur public

Et ce, sans vraiment de gain qualitatif. Le scandale du groupe Orpea est là pour le confirmer mais l'étude rappelle que le taux d’encadrement des résidents est de 55,6% dans les structures privées, contre 68,1% dans les structures publiques.

La France comptait en 2019 près de 611.000 places en Ephad et assimilés, d'après une autre étude de la Drees. Pour faire face au vieillissement de la population, l'organisme estime qu'il faudra ouvrir 108.000 places de plus d'ici à 2030 puis 211.000 places de plus d'ici à 2050.

Or, c'est bien dans le privé que le nombre de places augmente le plus rapidement. L'association demande donc "que la création de nouvelles places en EHPAD se fasse essentiellement dans les structures publiques".

Elle propose également que les EHPAD privés aient tous l’obligation de proposer un nombre suffisant de places éligibles à l’Aide sociale à l’hébergement ; un plafonnement des évolutions tarifaires des EHPAD privés ; et la mise en place d’un taux d’encadrement minimal obligatoire pour tous les établissements.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business