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Pourquoi le cours du jus d'orange baisse, mais pas son prix en rayon

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- - VALERY HACHE / AFP

Alors que le cours mondial du jus d’orange a chuté de plus de 10% en un an, les prix des bouteilles de Tropicana, Andros et autres Minute Maid à base de ce fruit ont augmenté en supermarché, de près de 3% sur la même période. BFMTV a tenté de comprendre ce paradoxe.

Oui, il existe un cours du jus d’orange. Établi à Chicago, il fixe le prix de la livre de jus d’orange concentré, le mètre-étalon du marché mondial. Après avoir beaucoup flambé ces dernières années, ce cours s’écroule depuis un an. Paradoxalement, en supermarchés, le prix des bouteilles de jus d’orange n’a cessé d'augmenter sur la même période.

Le cours du jus d’orange a ainsi chuté de plus de 10% sur les douze derniers mois. L'explication est simple: la récolte est bonne au Brésil et en Floride, les deux premiers producteurs mondiaux d'oranges à jus. Fini les atermoiements liés aux aléas climatiques en 2016. La culture d’oranges à jus a été excellente ces derniers mois, et le Brésil, qui fournit 80% des oranges à jus de la planète, a récolté beaucoup de très gros fruits dont le rendement en jus est bien meilleur.

Près de 4% de hausse en un an

Pourtant, sur la même période, dans les supermarchés français, le prix du jus d’orange a augmenté. Sur un marché hexagonal dont Coca, Pepsi et Andros captent la plus grande part, le prix des bouteilles à base de jus concentré a augmenté de 3,6% sur 12 mois, selon les données du cabinet IRI. Et globalement le prix moyen de toutes les boissons à base d'oranges a augmenté de 2,6% sur un an. Même le 100% pur jus a augmenté de 1,5%.

Notez que le cours du jus d’orange ne porte que sur le concentré, un jus d’orange déshydraté pour le transformer en purée aisément exportable. Mais les oranges utilisées par exemple pour le pur jus Tropicana (Pepsi), l’un des leaders du marché français, viennent des mêmes régions, comme la Floride. Donc si le cours du concentré baisse, le prix du pur jus d’orange exporté des mêmes zones en quantités industrielles est censé suivre la même tendance. 

Unijus
Unijus © Unijus

Alors pourquoi la baisse du cours de la matière première n’a-t-elle eu aucune répercussion sur les prix en magasin? C’eût pourtant été logique, puisqu'elle représente entre 60 et 80% du prix final de la bouteille, reconnaît Unijus, l’interprofession du jus de fruits.

Première explication: les évolutions de cours de matières premières n’ont jamais d’effet automatique sur le prix du produit fini. "Quand le cours du blé s’effondre, il n’y a pas de répercussion mécanique sur le prix de la farine ou du pain. Et s’il baisse, ce n’est jamais proportionnel à la perte de valeur de la matière brute", souligne Claude Georgelet, fondateur d’Agritechtrade, courtier en matières premières agricoles.

Deuxième élément: les transformateurs ne répercutent pas les baisses de cours, mais pas les hausses non plus. Lorsque la valeur du concentré d’orange s’est énormément renchérie en 2016, "les professionnels de la filière ont beaucoup absorbé l’augmentation", indique la porte-parole d’Unijus. Elle admet toutefois que des hausses "de 10 centimes maximum" ont pu être repérées ici ou là.

Dernière hypothèse: les transformateurs compenseraient-ils la baisse de la demande en jus d’orange en France ces derniers mois ? Toutes sortes de jus d’orange confondues, les volumes ont baissé de 4,3% dans l’Hexagone entre mars 2018 et mars 2019, à 635.000 bouteilles vendues. La chute la plus massive concerne d’ailleurs le jus d’orange à base de concentré: elle excède les -10% en un an. Mais comme les prix, eux, ont augmenté, le recul du chiffre d’affaires de leurs fabricants a été contenu sur la même période, à moins de 7%.

Nina Godart