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Pourquoi ces casseroles "made in France" séduisent les grands chefs du monde entier

La PME a vu son chiffre d'affaires bondir de plus de 30% en 10 ans à 14 millions d'euros, réalisé à 50% dans le cuivre, 40% dans l'inox, pour des casseroles vendues entre 80 et 250 euros pièce.

La PME a vu son chiffre d'affaires bondir de plus de 30% en 10 ans à 14 millions d'euros, réalisé à 50% dans le cuivre, 40% dans l'inox, pour des casseroles vendues entre 80 et 250 euros pièce. - Damien Meyer - AFP

Le savoir-faire de Mauviel a séduit de nombreux chefs étoilés, qui ne jurent que par ses casseroles en cuivre étamé, même si elle fabrique aussi une gamme en inox. Une réputation qui dépasse largement les frontières. 70% de ses ventes sont réalisées à l'export dans 50 pays.

L'entreprise familiale Mauviel, qui fabrique des casseroles haut de gamme à Villedieu-les-Poëles, en Normandie, parvient à traverser les siècles en mariant tradition et innovation. La PME de 90 personnes fondée en 1830 est aujourd'hui la seule en mesure de maintenir en vie la batterie de cuisine de l'Élysée, 300 à 400 pièces en cuivre fabriquées par Mauviel entre 1845 et 1865, explique Guillaume Gomez chef cuisinier de la Présidence de la République.

"Si demain Mauviel arrêtait de rétamer (entretenir, NDLR) ces casseroles, je devrais les envoyer au musée et racheter" une batterie, explique Guillaume Gomez.

Ce "patrimoine" ne peut en effet perdurer qu'à condition de remettre régulièrement (deux fois par an maximum selon Guillaume Gomez) de l'étain ("rétamer") au fond des casseroles et autres sautoirs. Ce qui est indispensable car on ne peut cuisiner salé dans des ustensiles en cuivre pur: la réaction qui se produit est bonne pour la confiture mais pas pour les viandes ou les poissons.

Or les casseroles en cuivre étamé, que Mauviel fabrique aussi encore, demeurent un must pour certains chefs auréolés de trois étoiles au Michelin comme Éric Fréchon. Il est certes "contraignant", explique le chef du palace le Bristol à Paris, dont les casseroles sont rétamées tous les trois mois environ. Mais "pour faire un jus de rôti par exemple, il permet de récupérer les sucs car ça attache un peu au fond sans que ça brûle. Rien à avoir", avec les produits inox ou cuivre/inox développés ces dernières décennies, estime Éric Fréchon.

Un travail digne de la haute couture 

Avec son four et sa poussière de métal, l'atelier où la PME perpétue ce savoir faire du XIè siècle n'a rien d'un palace. Mais quand les chefs étoilés se rendent en Normandie pour le visiter "ils sont impressionnés par le travail qu'il y a sur les casseroles", raconte fièrement Richard Tharaud 41 ans, étameur, entre deux fontes d'étain.

"On est comme de la haute couture, on habille nos gamelles", ajoute Patrick Hervy, 54 ans, marteleur (le martelage vise à faire onduler un peu le métal (cuivre, inox voire aluminium) à la fois pour des raisons esthétiques et pour cacher les soudures.

L'entreprise n'en a pas moins développé avec succès l'inox utilisable, contrairement au cuivre, sur les plaques à inductions, très répandues en France. Avec certes "un coût un petit peu au dessus du marché (...) leurs produits techniques inox ont une diffusion de la chaleur qui équivaut au cuivré", salue Christian Têtedoie, chef lyonnais, une étoile Michelin et président l'association des maîtres cuisiniers de France.

La PME a vu son chiffre d'affaires bondir de plus de 30% en 10 ans à 14 millions d'euros, réalisé à 50% dans le cuivre, 40% dans l'inox, pour des casseroles vendues entre 80 et 250 euros pièce. Le cuivre étamé ne représente que 5% à 10% du chiffre d'affaires (les autres cuivres ont un fond en inox), mais selon Mauviel, cela "réaugmente".

Exportées dans 50 pays

Auréolée de sa réputation auprès des toques étoilées, la PME normande réalise 70% de ses ventes à l'export dans 50 pays. Les États-Unis, avec leurs cuisines géantes, sont particulièrement friands de casseroles haut de gamme. Mauviel y vend autant qu'en France.

La PME familiale régulièrement convoitée par des repreneurs mise à l'avenir notamment sur l'Asie et sur le retour du service en salle, qui a accru la demande d'ustensiles de luxe de la part de chefs qui veulent cuire leurs produits sous les yeux de la clientèle.

Mais elle doit faire face à des concurrents comme de Buyer, également fondé en 1830, racheté en 2015 par le fond d'investissement Edify. La PME vosgienne de 170 personnes part à l'offensive avec une gamme cuivre "utilisable sur induction". De Buyer affiche 32 millions d'euros de chiffre d'affaires dans les ustensiles de cuisine, dont 60% à l'export.

C.C. avec AFP