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Pourquoi Burberry a détruit pour 83 millions d'euros de produits de luxe en trois ans

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La griffe de luxe britannique est dans le collimateur de certains de ses actionnaires qui ne comprennent pas pourquoi elle détruit chaque année de plus en plus de produits.

C'est un chiffre que la société de luxe britannique aimerait bien tenir secret. Et pourtant, elle est tenue de le publier chaque année dans son rapport annuel. Il s'agit du nombre de produits détruits. Et, depuis quelques années. il est en forte augmentation. En 2016, la firme londonienne, connue notamment pour ses trench-coats à doublure à carreaux avait détruit pour 18,8 millions de livres sterling de produits. L'année suivante, la somme était passée à 26,9 millions de livres (+43%). Et dans les comptes annuels qu'elle a dévoilés en mai dernier, ces invendus mis au rebut ont atteint la somme record de 28,6 millions de livres. Au total, sur trois années, cela représente un peu plus de 83 millions d'euros!

Cette mauvaise manière faite à des produits qui, en magasin, valent fort cher déplaît à certains des actionnaires de la société qui l'ont fait savoir à la direction lors de leur assemblée générale annuelle. Certains demandant même pourquoi ces produits ne pouvaient pas leur être vendus plutôt que d'être détruits. Mais la direction ne leur a guère donné d'explications. "Nous prenons cette situation très au sérieux", s'est contentée de commenter Julie Brown, la directrice financière du groupe comme le rapporte le journal The Times. Expliquant tout de même que cette année, un grand nombre de produits cosmétiques avait dû être détruits avec le rachat de la franchise Burberry Beauty par l'américain Coty. Effectivement sur les 28,6 millions de livres de produits détruits, 10,4 millions sont des stocks de produits de beauté.

Il n'empêche, cela fait toujours près de 20 millions de livres de vêtements et d'accessoires de mode détruit. Et si une partie du cuir a été donné, assure Marco Gobetti, le nouveau directeur général de Burberry, à une société de recyclage pour en fabriquer de nouveaux, il reste tout de même énormément de textile qui ont été définitivement détruits.

Richemont a détruit pour 480 millions d'euros de produits

Et Burberry n'est pas la seule société à détruire des produits dans le secteur du luxe. Le groupe suisse de luxe Richemont qui possède notamment les marques de montres Cartier et Jaeger-LeCoultre aurait, lui, mis définitivement hors d'usage pour plus de 480 millions d'euros de produits en mai dernier. Une pratique qui paraît en contradiction avec les engagements de ces différentes marques en matière de développement durable et qu'elles peinent d'ailleurs à assumer.

Car, selon les experts du secteur, ces pratiques relèvent avant tout d'une stratégie marketing. Détruire plutôt que brader ces produits permet aux marques de mieux contrôler les circuits de distribution et l'image de marque. En d'autres termes, plutôt que de déstocker leurs invendus à très bas prix chez des discounters ou dans leurs boutiques, les marques de luxe préfèrent les détruire. C'est pour elles un manque à gagner à court terme mais elles s'y retrouvent sur le long terme. "Cela permet aux marques de ne pas retrouver leurs produits sur les marchés secondaires des revendeurs, ce qui assure sur le long terme une exclusivité aux marques", explique Mark Ritson, professeur de marketing à Melbourne dans le magazine Industry Week Marketing

Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco