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Les prix de l'huile d'olive s'envolent sous l'effet de la sécheresse et des difficultés d'approvisionnement

Des épisodes de sécheresses intenses sont à l'origine d'une flambée inédite du prix de l'huile en Espagne.

L'ingrédient de base de la cuisine méditerranéenne est de moins en moins accessible. Depuis quelques semaines, le prix de l'huile d'olive subit en effet une envolée remarquable, son niveau mondial ayant grimpé à 8900 dollars (8326 euros) la tonne en septembre, rapporte CNBC. En août, l'"or liquide" affichait déjà un prix moyen 130% supérieur à celui de l'année dernière. En cause: les sécheresses qui frappent plusieurs régions de la Méditerranée et où se produisent une grande partie des huiles d'olive du monde.

L'Espagne, premier producteur et exportateur mondial d'huile d'olive est particulièrement touché par ces conditions météorologiques extrêmes. Le pays a connu son troisième été le plus chaud avec des températures 1,3 °C supérieur aux valeurs normales de saison. Mais cela fait deux ans que le manque d'eau affecte le territoire. Des conditions météorologiques qui ont entraîné une chute drastique de la production ibérique d'huile d'olive par rapport aux saisons précédentes. Selon les données de la société d’information sur le marché des matières premières Mintec, le pays en a produit au cours de la dernière saison 610.000 tonnes: c'est moitié moins que sa production habituelle.

Sur X, anciennement Twitter, le ministre de l'Agriculture espagnol Luis Planas a évoqué des volumes comparables. Selon lui, la récolte 2022-2023 a chuté à 673.000 tonnes, soit "bien moins que la moyenne annuelle" de "1.380.000 tonnes".

Le prix le plus élevé depuis 20 à 30 ans

Avec la raréfaction du produit, le prix a logiquement monté en flèche. En Andalousie, il atteignait ainsi 8,45 euros le kg en septembre, selon l'indice de référence Mintec. Il s'agit du niveau le plus élevé jamais enregistré pour l'huile d'olive espagnole, depuis que ces données sont collectées, soit il y a vingt ou trente ans. Sur l'ensemble du territoire espagnol, le prix de l'huile d'olive a augmenté de 42% depuis le début de l'année, passant de 6,91 euros le litre en moyenne, début janvier, à 10,34 euros début septembre, s'alarme l'organisation de consommateurs Facua.

La Grèce et l’Italie ont également été touchés par des épisodes de sécheresses intenses ces derniers mois. Or ils sont respectivement les deuxième et troisième producteurs d’huile d’olive, d'après des données du Conseil oléicole international, une organisation intergouvernementale qui représente plus de 98% de la production mondiale.

Mais d'après l'OCU, autre association de consommateurs espagnole, la hausse de prix enregistrée en Espagne est nettement supérieure à celle enregistrée dans les pays voisins, où certains Espagnols vont désormais s'approvisionner. D'après l'organisation, l'huile d'olive est désormais 27% moins chère au Portugal qu'en Espagne. En France, les prix sont inférieurs de 16% à ceux pratiqués par les supermarchés espagnols.

Une situation qui inquiète jusqu'aux plus hautes sphères de l'Etat. Interviewée sur la chaîne espagnole La Sexta, la ministre de l'Economie, Nadia Calviño, a appelé les professionnels du secteur à faire "des efforts" pour "contenir les prix" alors que l'huile d'olive représente, selon elle, "la base de la cuisine espagnole". Elle a notamment souligné la baisse de la TVA de 10 à 15% décidée fin 2022 sur ce produit dans le cadre d'un plan anti-inflation.

Des craintes de spéculations et de vols

L'association de consommateurs OCU met quant à elle en garde contre les pratiques douteuses que la situation pourrait entraîner. Le ministère espagnol de l'Agriculture doit "adopter les mesures nécessaires pour contrôler la chaîne de production, en garantissant qu'aucun abus n'est commis et en enquêtant sur d'éventuelles spéculations", a-t-elle souligné dans un communiqué. Mi-septembre, Nadia Calviño avait assuré n'avoir pas eu vent de pratiques répréhensibles de la part du secteur, le gouvernement attribuant l'envolée des prix à un déséquilibre entre l'"offre et la demande".

La flambée de son coût faisant de l'huile un produit particulièrement prisé, des usines ont été victimes de vols de grande ampleur en Espagne ces dernières semaines. Au total, 50.000 litres ont par exemple été dérobés à l'huilerie Marin Serrano El Lagar, ce qui représente 420.000 euros de perte pour l'entreprise.

Le ministre de l'Agriculture espagnol table sur des volumes de récoltes un peu plus important pour la saison 2023-2024 grâce notamment aux pluies abondantes de début septembre qui pourraient aider à la maturation des olives. Toutefois, elles ne devraient pas dépasser pour la deuxième année consécutive le cap symbolique du million de tonnes.

Selon un analyste de Mintec interrogé par CNBC, en cas de poursuite des sécheresses, les stocks pourraient s'épuiser avant octobre, période habituelle de début de la nouvelle récolte.

Nina Le Clerre avec AFP