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La sécheresse a-t-elle des conséquences sur la production des eaux en bouteille?

Si certains forages ont été suspendus en raison de la sécheresse, les entreprises spécialisées se veulent rassurantes sur la production des bouteilles d'eau minérale.

Pourra-t-on encore boire de l'eau en bouteille? Alors que se succèdent les épisodes de sécheresse, la question s'invite dans les supermarchés. À l'automne dernier, des clients s'étaient inquiétés de ne trouver leurs habituelles bouteilles de Mont Roucous, très prisées des parents pour leurs jeunes enfants. Le manque de précipitations et les fortes chaleurs estivales avaient contraints cette marque à réduire ses livraisons aux magasins. Du côté de Perrier, propriété du géant suisse Nestlé, les conditions climatiques ont également perturbé la production au printemps dernier.

C'est aussi ce même groupe Nestlé qui a récemment suspendu deux forages de faible profondeur dédiés à son eau Hépar, sur les six forages exploités dans les Vosges, dans les environs de Vittel, déclarant qu'il était devenu difficile de maintenir la "stabilité des caractéristiques essentielles d'une eau minérale naturelle" en raison d'événements climatiques "plus fréquents et plus intenses". Les embouteilleurs d'eau minérale, pourtant, se veulent rassurants sur l'avenir de leurs marques: la plupart des forages sont situés en profondeur, donc peu concernés par les dernières sécheresses.

"Nous menons des contrôles de conductivité et de température en continu et nous n'avons observé aucun changement pour le moment", confirme Jacques Sérillon, directeur général des Sources de Soultzmatt, à l'origine des bouteilles alsaciennes Lisbeth.

150 mètres de profondeur

"Les sécheresses n'ont pas de conséquences à court terme pour nos marques, car nous puisons l'eau à 150 mètres de profondeur, sous une épaisse couche d'argile", explique Julian Schmitt, responsable marketing de Spadel France, qui exploite deux autres marques alsaciennes, Wattwiller et Carola. La filiale française du groupe belge Spadel assure néanmoins regarder "avec prudence" les événements climatiques et "surveiller de près" ses précieuses ressources vosgiennes – le minéralier plafonne désormais les prélèvements à Wattwiller, dans le sud de l'Alsace.

Car la succession des sécheresses ravive aussi les tensions autour des prélèvements. En Auvergne, au pied des volcans, Danone est régulièrement pointé du doigt pour les prélèvements destinés à sa marque Volvic. Le groupe, lui, évoque les efforts volontairement menés ces dernières années, notamment 30 millions d'euros d'investissements entre 2017 et 2022 dans les procédures de lavage de son site auvergnat.

"Cela nous a permis de réduire de 13% nos prélèvements d'eau", avance Christine Raphanel, responsable RSE de la Société des eaux de Volvic.

"Une nouvelle équation"

Pour nettoyer les installations ou rincer les bouteilles consignées, la loi oblige les minéraliers à utiliser l'eau de la même source. Dans le nord de l'Alsace, Celtic a investi dans une nouvelle laveuse, permettant "85% d'économies d'eau" bien que sa source soit épargné par la sécheresse, souligne Alain Andreolli, directeur marketing de la petite entreprise indépendante de Niederbronn-les-Bains. Volvic, de son côté, travaille sur un nouveau système de traitement et de recyclage des eaux usées. La procédure, pas encore autorisée en France, attend un feu vert du gouvernement.

"La sécheresse est une nouvelle équation que nous avons intégrée dans notre plan de production", explique Christine Raphanel.

Pour anticiper une éventuelle "alerte sécheresse" à l'été, certaines productions sont anticipées pour stocker davantage de bouteilles à l'approche des beaux jours, et ne pas déserter les supermarchés. C'est là que réside le défi des spécialistes de l'eau minérale: prélever moins pour préserver la ressource, sans pour autant réduire les ventes. L'arrêté national paru ce mercredi, qui fixe les restrictions sur le prélèvement d'eau des industriels en cas de sécheresse, a exempté les captages d'eau destinés à la consommation humaine – eau potable et eaux conditionnées.

Jérémy Bruno Journaliste BFMTV