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Jusqu'à présent plutôt épargné, le prix du porc flambe à son tour

Le prix du porc a atteint son plus haut historique sur les marchés à plus de 2 euros le kilo ce 22 août.

Le prix du porc a atteint son plus haut historique sur les marchés à plus de 2 euros le kilo ce 22 août. - Pexels

Produit d'appel du rayon viande, le porc restait une des viandes les moins touchées par l'inflation jusqu'à présent. Mais les cours s'envolent à leur tour depuis quelques mois tirés par une explosion des coûts de production et une offre moindre.

Le jambon devrait bientôt nous coûter plus cher. Si les prix de la viande flambent depuis plusieurs mois, c'est principalement la volaille, le boeuf et le veau qui coûtent plus cher. Sur un an, la hausse atteint 10,2% sur boeuf et veau selon l'Insee, 14,6% sur la volaille et 10,5% sur l'agneau. Avec une hausse de 7,3%, la viande de porc était relativement épargnée.

Mais le prix de la charcuterie devrait flamber dans les prochaines semaines. Ce lundi 22 août, le prix du porc a franchi la barre des 2 euros le kilo sur le marché du porc breton à Plérin. Depuis octobre dernier, la hausse sur les marchés est continue. Fin juillet dernier, le porc a battu sur record historique de 1,86 euros le kilo qui datait de mars 2001, une époque où les consommateurs s'étaient rabattus sur cette viande en pleine crise de la vache folle.

Pas de crise sanitaire cette année, mais une explosion des coûts avec l'inflation et un secteur en pleine crise. Le porc qui se vendait 1,25 euro le kilo sur les marchés en janvier a depuis pris 60%. Alors que la demande reste soutenue pour cette viande relativement abordable, l'offre elle décroche.

10% des éleveurs de porcs menacés

"Le recul actuel de l’offre de porcs est un fait marquant à l’échelle mondiale, explique Pascal Le Duot, directeur du Marché du porc breton (MPB) dans La France Agricole. En France, c’est le résultat de cessations d’activité survenues il y a un an et demi environ, bien avant le déclenchement de la guerre en Ukraine et ses effets sur la flambée des coûts de production."

Si le porc flambe à l'échelle mondiale, notamment à cause du marché chinois où la viande porcine s'est envolé de plus de 20% sur un an en juillet dernier, la situation est particulièrement tendue dans l'Hexagone.

"Les 10.000 élevages de porcs que compte la France sont dans une situation dramatique, s'alarme l'interprofession Inaporc. 10 % d’entre eux se dirigent aujourd’hui vers une cessation d’activité dans les prochains mois et cette proportion pourrait grimper à 30% selon certaines estimations."

En cause, une explosion des coûts de production tirés par l'alimentation animale (+25% sur un an). Des coûts que les producteurs échouent à répercuter sur les prix de vente à la grande distribution. Le porc restant un produit d'appel relativement abordable du rayon viande face à la flambée de la viande de boeuf et de la volaille. En janvier dernier, la première opération anti-inflation de Leclerc concernait ainsi la baguette de pain (à 29 centimes) ainsi que les côtes de porc (à moins de 2 euros le kilo).

Le porc vendu à perte

Selon les professionnels, le coût de production d'un kilo de porc est actuellement de 2 euros le kilo, soit exactement le prix de vente au cours actuel. Autrement dit, les éleveurs ont vendu en dessous de ce coût de production jusqu'à présent.

"Les éleveurs perdent jusqu’à 40 euros par porc", estime Carole Joliff, secrétaire générale de la Fédération nationale porcine (FNP) dans L'Action agricole Picardie.

Une situation qui a poussé de nombreux éleveurs à mettre la clé sous la porte. Le pays qui produit en général 106% de sa consommation domestique de viande porcine pourrait être contraint de se tourner encore plus vers l'importation pour satisfaire la demande.

Conscient du problème, le gouvernement a lancé en janvier dernier un plan d'urgence pour la filière porcine. Le ministre de l'Agriculture d'alors Julien Denormandie avait débloqué 270 millions d'euros pour soutenir les trésoreries des éleveurs de porcs. Un coup de pouce salvateur qui n'a pas suffi à effacer les pertes de la filière estimées à 440 millions d'euros sur un an par l'Inaporc.

Si la hausse des cours est une bonne nouvelle pour les éleveurs, ces derniers appellent maintenant la grande distribution à faire un geste supplémentaire. Alors que l'alimentation animale devrait encore continuer à augmenter dans les prochaines semaines, le secteur souhaite que les grandes surfaces rognent leurs marges sur le rayon charcuterie, un des plus rentables de la catégorie viande.

Les grandes et moyennes surfaces sont en capacité d'"accorder les hausses nécessaires sans même modifier le prix au consommateur", estime François Valy, le président de la FNP.
Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco