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Indication du pays d'origine: ce qui va changer sur les étiquettes des pots de miel

Pour mieux lutter contre les fraudes et mieux informer le consommateur, l'Union européenne va rendre obligatoire l'indication des pays de provenance sur les étiquettes des pots de miel.

"Origine du miel: 60% Chine, 40% France". Une telle mention sera bientôt apposée sur des pots de miel dans les rayons des supermarchés: l'Union européenne s'apprête à rendre obligatoire l'indication, sur l'étiquette, du (ou des) pays où a été récolté le miel. Une manière d'apporter une information plus transparente au consommateur, mais aussi de mieux lutter contre les fraudes, très courantes dans le cas du miel.

• Pourquoi importe-t-on du miel en Europe?

Si les apiculteurs européens produisent de grandes quantités de miel, elles sont néanmoins largement insuffisantes pour répondre à la demande des consommateurs et de l'industrie agroalimentaire. Du miel est importé en grande quantité de pays extérieurs à l'UE, depuis l'Asie, l'Amérique latine ou l'Ukraine.

Par ailleurs, le miel étranger est bien moins cher que celui récolté en Europe, permettant de vendre du miel à petit prix ou de produire à bas coût des produits transformés à base de miel.

L'UE importe environ 40% de sa consommation de miel.

• Pourquoi certains miels importés posent-ils problème?

Les apiculteurs, les organisations de producteurs et les associations de consommateurs alertent régulièrement sur des importations massives en Europe de miel "frelaté", c'est-à-dire dilué avec une autre substance, généralement du sirop de sucre issu du riz ou de la betterave, bien moins cher que le miel. Cette pratique diminue considérablement la qualité et la valeur du miel (mais sans risque pour la santé). Or, l'UE interdit le frelatage du miel, qui ne doit faire l'objet d'aucun ajout d'ingrédient.

Des miels frelatés, achetés par des importateurs peu scrupuleux, sont mélangés à d'autres miels puis conditionnés en Europe avant d'être vendus à petit prix dans les supermarchés. À l'heure actuelle, la seule obligation pour les pots de mélanges de miel est de faire figurer la mention "miel UE" ou "miel hors UE", ce qui laisse le terrain relativement dégagé pour les fraudes. Attention néanmoins à ne pas faire de raccourci: du miel importé ne signifie pas systématiquement du miel frelaté.

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• Quelle est l'ampleur de ces fraudes?

Selon une enquête européenne menée en 2021-2022, dont les résultats ont été publiés en mars 2023, 46% des 320 échantillons prélevés aux postes de contrôle frontaliers ont présenté des traces de sources de sucre ajouté – c'était 14% de lors de l'enquête précédente. Selon la dernière enquête, une grande partie des miels originaires de Chine (66 sur 89 échantillons) ont été jugés suspects à l'issue des contrôles, de même pour la quasi-totalité de ceux importés de Turquie (14 sur 15).

La totalité des miels importés du Royaume-Uni (10 sur 10 échantillons) ont également été jugés suspects, les contrôles européens soupçonnant des assemblages de miels d'autres pays, transformés outre-Manche puis réexportés vers l'Union européenne.

• Que veut changer l'Union européenne?

Face à la hausse constatée des fraudes, l'Union européenne s'est attelée à la révision de ses directives dites "petit-déjeuner", c'est-à-dire plusieurs directives concernant le miel, mais aussi les jus de fruit ou les confitures. Concernant le miel, l'étiquette devra dorénavant indiquer clairement le pays d'origine du miel à l'intérieur du pot, ou les différents pays d'origine s'il s'agit d'un mélange. Le chantier d'un système de traçabilité du miel via un "code d'identification unique" sera également mis en route.

• Qu'est-ce qui va changer concrètement?

Fini la mention "miel UE" ou "miel hors UE" sur le pot de miel. Chine, Turquie, Argentine… Le pays de provenance devra être clairement indiqué sur l'étiquette. S'il s'agit d'un mélange, tous les pays de provenance devront être mentionnés.

Par ailleurs, pour les quatre premiers pays d'origine, il faudra également indiquer les quantités en pourcentages. Si ces quatre premiers pays représentent moins de la moitié du miel total, les pourcentages devront être indiqués pour tous les pays.

  • Plus concrètement: au lieu d'une mention "miel toutes fleurs hors UE", on pourra désormais retrouver une mention du type "mélange de miels toutes fleurs: 42% Chine, 21% Turquie, Ukraine, Argentine".

• Quand ces changements seront-ils mis en œuvre?

La proposition de révision des directives "petit-déjeuner" a été proposée au mois d'avril 2023 par la Commission européenne. Après un passage par le Parlement européen puis par le Conseil de l'Union européenne (il représente les États membres), un accord a été récemment trouvé entre les deux institutions, chacune ayant amendé et retravaillé le texte à sa manière. Manque désormais un dernier feu vert des deux institutions après cet accord pour l'adoption définitive des nouvelles règles.

Une fois adoptée, la révision sera publiée au Journal officiel de l'UE puis entrera en vigueur 20 jours plus tard. Les pays de l'UE auront alors deux ans pour appliquer ces nouvelles normes.

Jérémy Bruno Journaliste BFMTV