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Coronavirus: les fleuristes subissent les annulations de commandes des hôtels ou des mariages

La crise du coronavirus se greffe aux difficultés d'un secteur vacillant.

La crise du coronavirus se greffe aux difficultés d'un secteur vacillant. - Mychèle Daniau - AFP

Les professionnels ont vu les commandes de bouquets s'effondrer ces derniers jours, notamment celles provenant d’hôtels dont la fréquentation est en chute libre. Leurs inquiétudes se portent maintenant sur le maintien des rassemblements familiaux du printemps, mariages en tête.

Cascade d'événements professionnels annulés, réunions familiales en suspens: les fleuristes constatent déjà les effets du coronavirus sur leur chiffre d'affaires.

Dans sa boutique d'un quartier huppé proche de l'arc de Triomphe, Pascal Mutel feuillette son carnet de commandes. A la date du jour, les pages consacrées à deux grands hôtels parisiens sont vides. Ou presque.

"Un bouquet commandé, ouah!" ironise le fleuriste. D'ordinaire, ces établissements de luxe demandent quotidiennement des dizaines de bouquets pour fleurir les chambres. Mais leur fréquentation a chuté.

Des chambres sans client et donc sans bouquet

"Les palaces ont des taux d'occupation autour de 10%... Et on ne met pas de fleurs dans des chambres vides", pointe M. Mutel, à la tête d'une société de 14 salariés. Il fait ses calculs: entre les événements d'entreprise annulés à la chaîne et les commandes amaigries, il estime que son chiffre d'affaires sera amputé de 30% en mars et de 40% en avril. "Pour l'instant, on fait le dos rond. On commence à être habitués".

Egalement président de la chambre syndicale des fleuristes d'Ile-de-France, il rappelle que les commerces de région parisienne avaient été durement affectés par l'épisode des "Gilets jaunes" et la paralysie des transports pendant la grève contre la réforme des retraites.

Tout le monde réduit la voilure

Les inquiétudes portent maintenant sur le maintien des rassemblements familiaux du printemps, mariages en tête."On a commencé à avoir des remontées faisant état d'annulations ou de reports", rapporte Jean-Christophe Conrié, directeur de la Fédération française des artisans fleuristes.

Les organisateurs font face à des défections d'invités - soudain dans l'incapacité de trouver un moyen de déplacement en raison des mesures de restrictions visant à endiguer l'épidémie. Ils craignent aussi d'exposer leurs proches âgés. Dans ces conditions, "on sent que tout le monde réduit un peu la voilure", remarque Gilles Pothier, fleuriste à Paris et président d'Interflora.

Rungis aussi est à la peine

La crise du coronavirus se greffe aux difficultés d'un secteur vacillant. Au marché de gros de Rungis, les volumes de fleurs coupées ont baissé de 7,2% en 2018 sur un an. Avec l'épidémie, "de jour en jour, on perd du chiffre. D'ici une semaine, ça va être une catastrophe. Nous n'avons plus de clients et nos clients n'ont plus de clients. On subit une déflation totale", assure le gérant de la société Green Concept, Laurent Verrecchia: "je crains d'arriver prochainement à 50% de chiffre d'affaires en moins". Résultat: il taille dans ses commandes. Il prévoit de faire venir vendredi seulement "10 à 15%" du volume habituel.

Encore faut-il que les approvisionnements soient assurés. Le grossiste se fournit en grande partie dans le nord de l'Italie, mis sous cloche depuis le début du mois. "Je pense qu'on aura la marchandise, mais ce sera beaucoup plus compliqué".

Ils croisent les doigts pour que la crise se tasse avant le printemps

La société Penja fait venir par avion des fleurs tropicales depuis une trentaine de pays. "On a réorganisé notre approvisionnement au niveau fret aérien, mais c'est tout", souligne son gérant Jean-Philippe Landrieu. Il remarque que ses fournisseurs asiatiques (Taïwan, Thaïlande et Singapour) souffrent bien davantage, avec un arrêt de la demande en provenance de leur principal débouché, le Japon.

Tous ces professionnels espèrent que la crise se tassera avant le printemps, pour ne pas compromettre davantage la saison des mariages. "Il faudrait qu'au 15 avril (l'épidémie) soit sur une pente descendante, sinon ce sera la catastrophe", avance Pascal Mutel.

Seul point positif pour le fleuriste, ses ventes en boutique restent bonnes pour le moment. Avec l'incertitude qui pèse sur les déplacements aériens, il suppose que sa clientèle, aisée, passe plus de temps chez elle, redécouvrant ainsi les joies du foyer et l'envie de le fleurir.

C.C. avec AFP