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Comment l'Etat aide les buralistes à réduire leur dépendance aux ventes de tabac 

Les buralistes ont renégocié auprès de la Française des Jeux et du PMU leurs commissions tirées de la vente des jeux.

Les buralistes ont renégocié auprès de la Française des Jeux et du PMU leurs commissions tirées de la vente des jeux. - Alain Jocard - AFP

L'Etat va consacrer 80 millions d'euros à un "plan de transformation" des bureaux de tabac. Une aide pouvant atteindre 33.000 euros sera versée aux buralistes qui souhaitent rénover leur point de vente. Objectif: leur permettre de diversifier leur activité.

Confrontés l'an dernier à une chute des volumes de vente de tabac aux allures d'électrochoc, les buralistes doivent désormais réinventer leur métier. Aujourd'hui en France, quelque 24.500 débitants vivent du monopole de la vente de tabac qui génère 60 à 80% de leurs revenus, selon la Confédération des buralistes. Or, celle-ci a reculé l'an dernier de 9,32% à 40,23 milliards de cigarettes, une baisse historique due à une forte hausse des prix en mars -le paquet a augmenté d'un euro, pour atteindre environ 8 euros- et, plus largement, d'une politique publique anti-tabac qui commence à porter ses fruits.

Pour réduire la consommation de tabac qui tue 75.000 Français chaque année, le gouvernement a prévu dans le cadre de son plan Santé de porter en novembre 2020 le prix du paquet de 20 cigarettes à 10 euros, avec notamment deux hausses de 50 centimes en 2019, l'une en mars, l'autre en novembre.

Jusqu'à 33.000 euros d'aides

"Certes, le paquet de tabac à 10 euros ne nous fait pas plaisir, mais il a été voté au Parlement et il y a un calendrier fiscal qui nous permet de nous adapter", affirme Philippe Coy, président de la Confédération des buralistes.

Afin d'accompagner cette mue, l'Etat va consacrer 80 millions d'euros, d'ici 2021, à un "plan de transformation" qui finance jusqu'à 33.000 euros de travaux pour la rénovation de leurs points de vente. Ceux qui souhaitent accueillir d'autres activités -produits de vapotage, relais-colis, conciergerie de quartier, "snacking", etc.- bénéficient d'une aide de l'Etat pouvant atteindre 33.000 euros et plafonnée à 40% des dépenses. Ce plan de transformation doit aller de pair avec une diversification croissante, souligne Philippe Coy. "Il faut modifier le disque dur du buraliste. On n'est pas morts si on bouge", dit-il.

En parallèle, les buralistes ont renégocié auprès de la Française des Jeux et du PMU leurs commissions tirées de la vente des jeux. Si les jeux d'argent génèrent quelque 20 à 30% du chiffre d'affaires en moyenne, le reste venant de la presse et du bar, les bureaux de tabac doivent offrir davantage de services de proximité, estime Philippe Coy.

Proposer des cigarettes électroniques

Par exemple, permettre de "récupérer davantage de colis, un panier bio livré par une coopérative, un rôti commandé chez son boucher, proposer des produits locaux", comme le fait Elisabeth Marette qui vend des cigarettes et... du Saint-Nectaire. "Je ne voulais absolument pas que mon affaire décline, alors j'ai commencé à vendre les fromages de mon gendre qui ont eu la Médaille d'or au concours agricole en 2017 et 2018" explique à l'AFP cette buraliste établie à Beaumont, dans la banlieue de Clermont-Ferrand.

"Aujourd'hui, les bénéfices sont équivalents à ceux du PMU", et la buraliste a investi dans une armoire réfrigérée lui permettant de stocker une cinquantaine de fromages.

La diversification passe aussi par une professionnalisation de l'offre de cigarettes électroniques, qui doit s'accompagner de conseils: sceptiques, les buralistes ont longtemps boudé ces nouveaux produits, permettant aux boutiques spécialisées de fleurir. Avec seulement 20% de parts d'un marché encore marginal, mais en forte croissance qui représente 820 millions d'euros, en hausse de 21% l'an dernier, selon une récente étude du cabinet Xerfi, ils prennent aujourd'hui le train en marche.

La Confédération accompagne cette mutation en proposant à ses affiliés des formations, une "hotline" où des buralistes qui ont sauté le pas conseillent les néophytes, des "tutos", etc., explique Philippe Coy.

Ce passage progressif d'un produit-phare, le tabac, sur lequel il touche une commission fixée par l'Etat, à la cigarette électronique sur laquelle il fixe librement sa marge, est commercialement intéressant pour le buraliste.

Coralie Cathelinais avec AFP