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 Carrefour dément vouloir un rapprochement avec Casino

Casino affirme avoir été "sollicité depuis quelques jours par Carrefour en vue d'une tentative de rapprochement"

Casino affirme avoir été "sollicité depuis quelques jours par Carrefour en vue d'une tentative de rapprochement" - Eric Piermont - AFP

Le groupe Casino affirme avoir été sollicité par Carrefour pour un "rapprochement", auquel il n'aurait pas souhaité donné suite. Son concurrent dément avoir mené une telle démarche. Pourtant les deux PDG se sont rencontrés le 12 septembre.

Qui des deux ment ? Dans un communiqué, Casino a indiqué avoir été "sollicité depuis quelques jours par Carrefour en vue d'une tentative de rapprochement" et avoir réuni dimanche son conseil d'administration pour en discuter.

Mais les administrateurs ont "décidé à l'unanimité de ne pas donner suite à cette approche", a ajouté Casino, se disant déterminé à "mener toutes les actions nécessaires pour défendre l'intérêt social et l'intégrité du groupe". L'entreprise a en outre dit observer que ces manoeuvres avaient lieu "alors que le marché du titre Casino a fait l'objet de manipulations spéculatives coordonnées à la baisse d'une ampleur inédite depuis plusieurs mois".

Mais Carrefour, dans un communiqué diffusé quelques heures plus tard, a formellement démenti avoir émis une telle proposition et dit s'étonner "que l'on ait soumis au conseil d'administration de Casino une proposition de rapprochement qui n'existe pas".

Jean-Charles Naouri et Alexandre Bompard "se sont rencontrés le 12 septembre", a-t-on indiqué du côté du groupe Casino, sans fournir plus de détails sur ces discussions.

"Des insinuations inacceptables", selon Carrefour

"Les difficultés auxquelles sont confrontées le groupe Casino et son actionnaire de contrôle ne peuvent justifier des communications intempestives, trompeuses, et dénuées de tout fondement", a ajouté l'entreprise. "Carrefour examine les voies de droit à sa disposition à même de faire cesser ces insinuations inacceptables", a prévenu l'entreprise.

"Honnêtement, je trouve plutôt curieux ce jeu de poker menteur que se livrent ces deux groupes qui ont d'autres chats à fouetter en ce moment", a réagi lundi matin à l'AFP un expert de la distribution sous couvert de l'anonymat.

Pour lui, "on ne convoque pas un conseil d'administration sur la base de rumeurs, donc c'est qu'il y avait quelque chose de sérieux. Je ne vois pas l'intérêt d'inventer un truc comme ça, ni de la part de Carrefour qui n'a pas les moyens d'acquérir une telle cible, au capital complexe, ni de la part de Casino qui venait tout juste de rassurer les marchés sur son financement".

Cet expert estime qu'"on en saura plus dans les prochaines heures", car les deux groupes vont sans doute devoir s'expliquer.

Pour Yves Marin, consultant au sein du cabinet Bartle, "il est possible qu'il s'agisse d'un ballon d'essai de Casino pour tester le marché. Mais s'il y a eu effectivement réunion extraordinaire du conseil d'administration, ce n'est pas rien".

"Cela montre bien que le secteur est fébrile, et est en cours de recomposition et reconcentration. Tout le monde discute avec tout le monde, les distributeurs discutent entre eux mais aussi avec Amazon ou Microsoft", ajoute-il.

Selon lui, Carrefour et Casino "sont tous les deux des groupes intégrés, cotés, avec un certain nombre de points communs facilitant les synergies entre eux. Ce sont aussi des groupes puissants, rodés à la communication financière, qui maîtrisent très bien la communication vis-à-vis des actionnaires et des analystes".

Un passage à vide pour le secteur de la distribution

Ces développements interviennent alors que ces deux mastodontes français de la distribution traversent des passes difficiles et se réorganisent.

Début septembre, l'agence de notation Standard and Poor's avait abaissé d'un cran la note de Casino à "BB" assortie d'une perspective négative, en raison de la forte dette du groupe, qui a réaffirmé ses objectifs de profitabilité et de désendettement.

Casino, qui a réalisé en 2017 un chiffre d'affaires de 37,8 milliards d'euros, vise d'ici à fin 2018 une réduction de sa dette financière nette en France de l'ordre d'un milliard d'euros, "par autofinancement et grâce au produit des cessions d'actifs". Au cours du premier semestre 2018, Casino a réduit sa perte nette à 67 millions d'euros et affiche un bénéfice (en données ajustées) à 48 millions.

Pour sa part, Carrefour, dont les ventes ont atteint l'année dernière 88,2 milliards d'euros, a enregistré une lourde perte au premier semestre, de 861 millions d'euros, conséquence des coûts de son plan de transformation annoncé en janvier par le PDG Alexandre Bompard, arrivé il y a un an à la tête du groupe.

C.C. avec AFP