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A cause de la hausse des prix de l'énergie, le prix des tomates va lui aussi flamber

Les cultures sous serre sont menacées par la flambée des prix du gaz, alors que ce mode de culture est très énergivore. Les prix des tomates, fraises et concombre pourraient augmenter.

La guerre en Ukraine a accéléré l'augmentation des prix de l'énergie. Une hausse des coûts qui menace directement la production de fruits et légumes sous serre, notamment de tomates, star des assiettes estivales. En France, 95% des tomates produites sont cultivées hors-sol, dans de grandes serres chauffées au gaz. Un mode de culture introduit au début des années 1980 pour recréer des conditions optimales de culture. De nombreux producteurs se retrouvent dos au mur.

"Quand on a des prix de l’énergie qui sont multipliés par trois, ça engage l’existence même des entreprises", alerte Patrick Lévêque président de la Fédération Régionale des Syndicats d'Exploitants Agricoles PACA (FRSEA).

"Le prix [du gaz] s'est longtemps situé entre 15 et 30 euros le mégawattheure. Fin 2021, on était sur du 80 euros en moyenne, ce qui était déjà difficile. En février, avec le conflit, c'est passé à 220 euros, soit 10 fois le prix", constate Christophe Rousse, président de Solarenn, une coopérative de producteurs bretons de tomates, interrogé par Le Figaro. Ce prix est redescendu, pour se stabiliser autour des 90 euros le mégawattheure.

Réduire les plantations

Pour limiter les pertes, certains maraîchers préfèrent planter sur de plus petites surfaces, quitte à jeter des plants déjà payés. Une manière de limiter l'impact sur le chiffre d'affaires car avoir moins de cultures "réduit les coûts d'arrosage, d'engrais et de main d'oeuvre pour le ramassage", note Patrick Levêque. La tomate et le concombre sont particulièrement concernés, alors que la fraise est en fin de chauffe et sont en train d'être récoltées.

La culture sous serre, critiquée pour son bilan carbone avec 1,88 kilo de CO2 rejeté par kilo de tomates, est très énergivore. Elle tend pourtant à se développer. "On a supprimé des produits qui permettaient d’assainir les sols car ils étaient polluants. Il a donc fallu adopter des techniques qui permettent la culture de tomates et autres fruits et légumes hors de la terre", explique Patrick Levêque.

Les producteurs tirent la sonnette d'alarme. D'autant plus que la hausse des coûts de l'énergie touche toutes les franges de l'agriculture.

"Dans le Sud de la France, on a beaucoup d’associations d'arrosants qui irriguent par pompage. Pour certains, les contrats avec leur fournisseur d’énergie arrivent à terme. Il faut renégocier et là, les prix vont tripler, passant de 50.000 euros à 150.000 euros par an", assure le président de la FRSEA PACA.

Pour lui, les aides apportées par le plan de résilience ne sont pas suffisantes pour compenser la flambée des coûts. "Sur le GNR, un gazole vert pour engins agricole, le prix du litre a doublé, voire triplé", affirme Patrick Levêque.

Vers une augmentation des prix

Autre problème, les coûts de production augmentent et les producteurs sont parfois obligés de vendre à perte. Alors que les négociations commerciales annuelles entre distributeurs et producteurs se sont officiellement achevées le 1er mars, tous les acteurs se sont remis autour de la table à cause du conflit à l'Est. "Ces discussions iront de toute façon vers des augmentations de prix. On ne pourra pas faire les amortisseurs de la crise. Parce qu’il n’y a pas que les prix de l'énergie qui augmentent, il y a aussi ceux des emballages, des intrants...", énonce Patrick Levêque.

"Sans geste de la grande distribution, on va être bloqué, il faudrait qu'on double le prix de nos produits. Il faut que les enseignes rognent sur leurs marges", réclame Christophe Rousse le président de Solarenn.

La production sous serre devrait être plus réduite cette année, créant un appel d'air pour les produits issus de l'importation, du Maroc ou de l'Espagne. "Je crois que finalement, la crise ukrainienne a remis l'église au centre du village. On vient de s’apercevoir que l’alimentaire est aussi une arme de guerre. Si nous voulons une alimentation locale, il faudra résoudre tous ces problèmes à l’avenir", conclut le président de la FRSEA PACA.

https://twitter.com/Pauline_Dum Pauline Dumonteil Journaliste BFM Tech