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Comment le marché de Rungis veut prendre son virage numérique

La plateforme numérique Rungismarket, lancée en février 2022, permet aux restaurateurs de s'approvisionner auprès des grossistes de Rungis en ne passant qu'une seule commande.

Sur le marché de Rungis, au sud de Paris, c'est l'effervescence dès les premières heures du matin. Du poisson à la viande en passant les fleurs, les fruits et les légumes, 2,8 millions de tonnes de produits frais passent chaque année par le célèbre marché de gros francilien pour nourrir 18 millions de consommateurs. On compte plus de 700 grossistes à l'œuvre dans les pavillons de Rungis – un casse-tête, parfois, pour les professionnels qui doivent se fournir en denrées alimentaires, contraints de jongler entre les commandes et les appels téléphoniques.

Capture d'écran du site Rungismarket.
Capture d'écran du site Rungismarket. © Rungismarket

C'est le pari du site web Rungismarket: numériser ce gigantesque marché pour faciliter l'approvisionnement des restaurateurs, traiteurs, commerçants et autres épiciers. En 2018, une première tentative sous le même nom avait été un échec. La plateforme est à nouveau opérationnelle depuis le mois de février: elle permet aux professionnels de s'approvisionner auprès de grossistes en ne passant qu'une unique commande. "L'avantage est de n'avoir qu'une seule livraison, qu'une seule facture et qu'un seul interlocuteur en cas de problème", avance Pierre Lévy, fondateur de Califrais.

Intelligence artificielle

Incubée à Rungis même, Califrais a remporté l'appel d'offres lancé en 2021 par la Semmaris, l'entité semi-publique chargée de la gestion du marché de gros, pour redonner une seconde chance à la plateforme. La start-up gère désormais l'exploitation du site web Rungismarket, associée avec le transporteur de produits frais Stef et le spécialiste de l'externalisation de la relation client Webhelp – les trois entreprises s'étaient groupées pour répondre à l'appel d'offres. "C'est notre technologie et notre logistique" derrière Rungismarket, explique Pierre Lévy.

Le pavillon des volailles vers 4 heures du matin.
Le pavillon des volailles vers 4 heures du matin. © BFM Business
Le début de la préparation des commandes à l'entrepôt Califrais.
Le début de la préparation des commandes à l'entrepôt Califrais. © BFM Business

Une couche d'intelligence artificielle a été ajoutée à la plateforme pour gérer l'immense masse de données et proposer des informations les plus actuelles possibles. À Rungis, les prix et les approvisionnements de ces denrées périssables peuvent varier d'un jour à l'autre en fonction de l'offre et de la demande. D'autant plus compliqué qu'il faut prendre en compte une grande quantité d'informations pour les produits frais (maturité, calibre, provenance, labels), pas toujours les mêmes selon les catégories de produits, et des dates limites de consommation (DLC) très courtes.

15.000 livraisons

Une fois la commande passée par le client, avant minuit, elle est envoyée aux grossistes. Ces derniers préparent les marchandises puis les envoient à l'entrepôt de Califrais où elles sont réunies en seule palette par client. Pour mener à bien la logistique, les grossistes ont été formés à l'utilisation de l'outil numérique "pour qu'ils soient les plus autonomes possibles", explique Pierre Lévy. Direction ensuite l'entrepôt Stef, où les palettes sont entreposées dans les camions. Les chauffeurs démarrent à 5h30 et arrivent dès 6h à l'intérieur de Paris.

Le chargement des camions à l'entrepôt Stef peu avant le départ des chauffeurs.
Le chargement des camions à l'entrepôt Stef peu avant le départ des chauffeurs. © BFM Business

Environ 15.000 livraisons ont déjà été réalisées depuis le lancement de la plateforme. Pour inciter les grossistes du marché à rejoindre leur plateforme, ses gestionnaires jouent l'argument du canal de vente supplémentaire et se montre conciliant, préparant parfois les commandes eux-mêmes. Rungismarket réunit pour l'heure une soixantaine d'entreprises et 10.000 références: l'objectif est de grimper à 200 grossistes d'ici fin 2024, soit 30% à peu près de ceux installés à Rungis. "Nous voulons multiplier par dix le nombre de produits vendus" à cet horizon, anticipe Pierre Lévy.

Jérémy Bruno Journaliste BFMTV