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Un catalogue d'oeuvres d'art volées aux Juifs révélé pour la 1ère fois

Durant la Seconde Guerre mondiale, l'armée nazie a systématiquement pillé les biens des Juifs d'Europe pour l'agrément de ses dirigeants. Le numéro 2 du régime, Hermann Goering, en avait dressé un catalogue, qui sera édité en livre mercredi. BFMTV a pu avoir accès au document original.

Dans le cercle des historiens, son existence n'était pas un secret, mais un tabou tout de même. Le livre en lui-même ne paie pas de mine, et on le prendrait presque pour un simple catalogue de ventes. Il s'agit pourtant de l'ouvrage qui recense la plus grande collection d'œuvres d'art volées de l'Histoire.

Entre 1939 et 1944, Hermann Goering, bras droit d'Adolf Hitler, commandant en chef de la Luftwaffe (l'armée de l'air), a minutieusement répertorié les tableaux volés par l'armée nazie aux Juifs d'Europe et conservées dans sa propriété de Carinhall, près de Berlin. Des créations de Toulouse-Lautrec, Van Gogh ou encore Vélasquez, systématiquement confisquées.

Chefs d'œuvre et tableaux de famille

Le catalogue recense 1.400 pièces, sur les millions de tableaux et sculptures spoliées par les Nazis. Un véritable pillage, contre lequel ont tenté de lutter les gouvernements occidentaux. Cette quête avait d'ailleurs été mise en scène dans un livre de Robert M. Edsel, Monuments Men, adapté au cinéma en 2014 par George Clooney.

Mais on peut également retrouver dans le catalogue de Goering de simples tableaux de famille. Car l'histoire de la Seconde Guerre mondiale, ce n'est pas seulement celle des camps d'extermination, comme le rappelle Jean-Marc Dreyfus, historien.

"Il ne faut pas oublier que l’assassinat des Juifs d’Europe, ce n’est pas seulement l’extermination physique de ces personnes. Ça a été une entreprise absolument obsessionnelle, extraordinairement minutieuse, d’éradication de la dernière trace de leur existence même."

Un livre pour le grand public

Mais si cet inventaire, conservé aux archives du Quai d'Orsay, n'avait été jusqu'à présent jamais exposé, c'est qu'il est compliqué à déchiffrer pour les non-initiés. Il a même fallu aux historiens des Archives diplomatiques, à la Courneuve, plusieurs mois de travaux pour y parvenir. Jean-Marc Dreyfus a donc décidé d'en faire un livre, accessible au grand public, Le catalogue Goering, publié chez Flammarion.

Le récit part de l'inventaire des œuvres pour retracer l'histoire de la collecte, mais également la recherche des propriétaires après la fin de la guerre, une quête encore inachevée aujourd'hui. Un véritable symbole de la spoliation des biens juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, comme le rappelle Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, qui l'a préfacé.

"En donnant accès à de nombreux éléments inédits, le présent ouvrage offre donc un intérêt documentaire remarquable, qui ouvrira sans doute des perspectives nouvelles sur cette période et sur ce sujet."

Du pont de Langlois d'Arles peint par Vincent Van Gogh à L'Infante Marguerite de Diego Vélasquez, en passant par ces modestes possessions familiales, tous les tableaux y figurent. Y sont également reproduites des photographies réalisées à l'époque du rapt des objets. Un livre exhaustif, qui pourrait permettre aux familles juives spoliées de retrouver leurs biens, même si nombre d'entre eux ont désormais disparu.

H. M. avec Vincent Deby