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Qui est Belphégor, le mystérieux fantôme du musée du Louvre?

Belphégor ou le Fantôme du Louvre de Claude Barma (1965)

Belphégor ou le Fantôme du Louvre de Claude Barma (1965) - DR

Tout l'été, BFM Paris vous fait redécouvrir les mythes et légendes urbaines autour de la capitale. Cette semaine le fantôme du musée du Louvre..

Qui est Belphégor, le fantôme du Louvre? Juliette Gréco? Sophie Marceau? Une divinité de l'Ancien Testament? Un groupe de black metal autrichien? L'histoire de cette divinité démoniaque est aussi longue que surprenante.

Dans l'Ancien Testament, Belphégor (ou Baal Phégor) est présenté comme un "idole infâme, adoré pour de très mauvaises raisons par des Juifs de retour d'Egypte", écrit Alain Rey dans Dictionnaire amoureux du Diable. Dans l'imaginaire chrétien, Belphégor est en effet le dieu qui initie ses fidèles aux sacrifices humains.

Dans la démonologie, Belphégor n'a pas tout à fait le même rôle, puisqu'il est le démon de la paresse et des inventions. Vieux monstre "hideux, anthropomorphe, barbu, cornu, griffu", il séduit ses victimes en prenant l'apparence d'une femme. D'autres démonologues le comparent à Crepitus, le dieu des pets et des flatulences dans la Rome antique.

"Ce nom signifie 'faire ses ordures devant quelqu'un"'

Durant la Renaissance, en Italie, Belphégor devient "le roi des Enfers". Il est envoyé sur Terre "pour tester le sort des maris". C'est le cas dans un conte de Machiavel écrit en 1520 (et publié en 1545) où Belphégor devient un certain Roderic à Florence. C'est à cette époque qu'il obtient "le statut de déceleur des fautes humaines". Au XVIIème siècle, La Fontaine s'inspirera de Machiavel et de Belphégor dans le livre XII de ses Fables:

"De Belphégor aussitôt on fit choix.
Ce diable était tout yeux et tout oreilles,
Grand éplucheur, clairvoyant à merveilles,
Capable enfin de pénétrer dans tout,
Et de pousser l'examen jusqu'au bout."

Le personnage fascine écrivains comme philosophes. Dans leur Encyclopédie, D'Alembert et Diderot décrivent Belphégor comme une "idole de saleté et d'ordure": "Le rabbin Salomon de Lunel (...) croit que ce nom signifie 'faire ses ordures devant quelqu'un', & que les idolâtres faisaient cette sale action devant Bell-phegor [sic]".

"Il y a un fantôme au Louvre!"

Trois siècles plus tard, en 1927, Belphégor est remis au goût du jour par l'écrivain breton Arthur Bérnède. Sans doute inspiré par le succès du Fantôme de l'Opéra et de Fantomas, Bérnède transpose le mythe de Belphégor au Louvre. Les premières lignes du roman, sobrement intitulé Belphégor, donnent le ton:

"Il y a un fantôme au Louvre! Telle était l'étrange rumeur qui, le matin du 17 mai 1925, circulait dans notre musée national".

L'écrivain présente dans un premier temps Belphégor comme un être surnaturel: "Il s'amuse à l'envie à disparaître et reparaître en donnant des frissons aux gardiens du Louvre, aux détectives, aux journalistes, aux policiers qui le poursuivent sans que leurs revolvers ne puissent le cribler de balles", relate Pascal Torres dans Les Secrets du Louvre. Rapidement, la supercherie éclate: Belphégor n'est pas un fantôme, mais un être de chair et de sang, une femme masquée qui cherche le "trésor des Valois". Bien entendu, ce trésor n'existe pas non plus. 

En 1965, la télévision s'est emparée du roman de Bernède. Juliette Greco joue le rôle principal. La série obtient un grand succès. Le mythe est relancé. En 2001, Jean-Paul Salomé tourne, dans l'enceinte du musée, sa version avec Sophie Marceau. A nouveau, la légende de Belphégor fascine le public: le film séduit 3.228.795 spectateurs. Selon Alain Rey, le Belphégor d'aujourd'hui n'a plus grand rapport avec celui des origines: "Malgré de fugitives allusions aux origines, vidées de ses forces sacrées et démoniaques, ce n'est plus qu'un beau nom, et un travestissement ténébreux."

Jérôme Lachasse