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Mort de l'écrivain Maurice G. Dantec

Maurice G. Dantec, en juillet 2014, à l'occasion de la sortie de son ouvrage "Les Résidents".

Maurice G. Dantec, en juillet 2014, à l'occasion de la sortie de son ouvrage "Les Résidents". - Inculte TV - Youtube

L'auteur des Racines du mal vient de s'éteindre à l'âge de 57 ans. Les éditions Inculte qui ont publié son dernier livre, Les Résidents, l'ont annoncé sur leur compte Facebook. Postant ce message: "ce week-end, Maurice G. Dantec nous a quittés. Nous repenserons à tous les bons moments passés en sa compagnie, depuis les premiers concerts et disques en 1996 avec Richard Pinhas, à l'époque des Racines du Mal, jusqu'à son dernier livre, Les Résidents, en 2015, chez Inculte".

Maurice G. Dantec est l'auteur de nombreux romans de science-fiction, d'essais et de nouvelles. Ses oeuvres les plus connues sont La Sirène rouge et Babylon Babies, tous deux adaptés aux cinéma. Ce dernier, l'histoire d'un mercenaire qui doit escorter de la Russie à New York une mystérieuse jeune fille, a été adapté au cinéma par Mathieu Kassovitz sous le titre Babylon A.D., avec Vin Diesel et Mélanie Thierry.

Dérive mystique

Fils d'un journaliste et d'une couturière, né le 13 juin 1959 à Grenoble, il avait grandi dans la "banlieue rouge" à Ivry-sur-Seine, dans le Val-de-Marne. Installé au Canada, où il a été naturalisé, il se définissait lui-même comme un "écrivain nord-américain de langue française".

"Chaleureux, généreux, amical et humain, il aura marqué la littérature française de son oeuvre unique", a noté son éditeur.

Son premier roman, La Sirène rouge (1993, Gallimard), publié dans la célèbre Série Noire, avait reçu le Trophée 813 du meilleur roman francophone.

Souvent considéré comme son chef-d'oeuvre, son deuxième récit, Les Racines du mal (1995, Gallimard), est un mélange détonnant de thriller, de science-fiction et d'anticipation politique. Traduit dans une quinzaine de langues, ce livre avait obtenu en 1996 le Grand Prix de l'Imaginaire et le prix Rosny aîné, un des plus prestigieux prix littéraires pour la science-fiction.

Longtemps catalogué à l'extrême gauche, l'écrivain qui se disait "royaliste" et "catholique", un temps proche des "identitaires", inquiet de "la décadence de l'Europe" et d'un "choc des civilisations", était fasciné par les nouvelles technologies, la lutte du Bien et du Mal. Après les attaques du 11-Septembre, il fut un des rares intellectuels français à soutenir George W. Bush dans son combat "contre le terrorisme".

Le personnage a eu des prises de position assez troubles, se déclarant "catholique futuriste" et "chrétien sioniste" et favorable au rétablissement de la peine de mort au Canada. Certains critiques ont dénoncé une dérive mystique.

Féru de Céline, admirateur de Houllebecq

Toujours vêtu de noir et caché derrière des lunettes aux verres fumées, Maurice G. Dantec était d'un pessimisme profond quant à l'avenir de l'humanité. Le futur qu'il décrivait dans ses livres était d'une violence inouïe. Ses romans reflétaient ses angoisses.

Toujours vêtu de noir et caché derrière des lunettes aux verres fumées, Maurice G. Dantec était d'un pessimisme profond quant à l'avenir de l'humanité. Le futur qu'il décrivait dans ses livres était d'une violence inouïe. Ses romans reflétaient ses angoisses.

Babylon Babies (1999, Gallimard) est l'histoire d'un mercenaire qui doit escorter de la Russie au Canada une jeune femme porteuse de jumelles génétiquement modifiées représentant un nouveau stade de l'évolution humaine. Villa Vortex (2003, Gallimard) décrit un monde asservi par la technologie. Cosmos Incorporated (2005, Albin Michel) décrit une société dominée par les machines. Dans Satellite Sisters (2012, Ring), les derniers humains libres, poursuivis par une ONU 2.0 qui domine la Terre, tentent de trouver un nouvel havre sur Mars.

Dans ses interviews, Maurice G. Dantec se disait féru de Céline, Joyce ou Dostoïevski. Il ne cachait pas son admiration pour son contemporain Michel Houellebecq. "Les Particules élémentaires furent pour moi un choc esthétique. C'est une des meilleures choses qui soit arrivée à la littérature française depuis longtemps. Houellebecq joue sur le terrain du nihilisme schopenhaurien. Moi, je joue du côté de Nietzsche. Nous nous rejoignons sur le fait que le monde est un immense générateur de souffrance", affirmait-il en 2013.

Ses derniers livres, des fresques angoissantes où on retrouvait souvent le héros de "La Sirène rouge", le mélancolique mercenaire Hugo Cornélius Toorop, étaient difficilement identifiables, oscillant entre romans et essais.

Avant l'écriture, Maurice G. Dantec s'était intéressé à la musique. Chanteur dans un groupe punk, il a également travaillé dans une agence de publicité avant de fonder une société d'informatique.

D'une santé fragile, prisonnier de ses addictions, il avait dû être hospitalisé à plusieurs reprises ces dernières années. Lors de ses dernières sortie publiques, il apparaissait assez affaibli.

M. R.