Le journal de Himmler publié dans Bild après sa découverte en Russie
Les crimes contre l'humanité de ce monstre froid qu'était Heinrich Himmler, architecte de la Shoah, sont connus. Mais le journal personnel du chef de la SS donne un éclairage nouveau sur l'industrialisation des meurtres de masse perpétrés par le régime nazi. Le document d'un millier de pages a été exhumé en début d'année des archives militaires russes à Podolsk, ville située au sud de Moscou.
Le quotidien allemand Bild a décidé, à partir de mardi, de révéler par épisodes des extraits de ce "journal" (ou "Dnewnik", ainsi que les Russes l'ont nommé) du génocidaire. Déjà, le journal britannique The Daily Mail en révèle des extraits parfois surprenants eu égard à la cruauté exceptionnelle dont a fait preuve ce nazi de la première heure, bras droit d'Adolf Hitler finalement capturé en 1945 par des soldats britanniques dans le nord de l'Allemagne. Malgré de faux papiers, Himmler avait été démasqué lors de son interrogatoire. Il s'était alors suicidé en mordant dans une capsule de cyanure cachée dans l'une de ses dents.
Himmler sensible à la vue du sang
Paradoxe pour un exterminateur de masse, l'organisateur en chef de la solution finale témoigne avoir frôlé l'évanouissement en août 1941. Alors qu'il assistait à une exécution de juifs sur un site proche de Minsk en Biélorussie, un morceau de cervelle d'une victime avait atterri sur son manteau.
Le tabloïd britannique révèle aussi que Himmler avait reçu un massage de son médecin personnel, Félix Kersten, avant d'assister à l'exécution de dix Polonais. Le journal ne dit en revanche pas que cette pratique était courante pour le haut responsable nazi, qui souffrait de maux d'estomac chroniques. Paru en 1960, le roman historique Les mains du miracle, de Joseph Kessel, raconte comment ce "juste" a soigné Himmler et comment, gagnant sa confiance, il a en même temps permis d'épargner des milliers de vies.
Détaillant son zèle à servir le régime, en même temps que certains détails de sa vie personnelle, comme ses relations avec sa fille Gudrun, le journal révèle qu'entre 1943 et 1945, Himmler a rencontré quelque 1.600 personnes.
Un comportement et un discours glaçants
Lors d'une visite au camp de concentration de Buchenwald, en Allemagne, il note: "J'ai pris un snack au café SS-Casino". Dans un autre passage, il consigne "l'efficacité" du gazage de 400 prisonniers par les rejets des moteurs diesel, lors d'une "démonstration" au camp de Sobibor, en 1943. Le soir même, un banquet sera donné "en son honneur". Cette méthode d'extermination par les gaz d'échappement sera ensuite remplacée par le tristement célèbre Zyklon B, un puissant pesticide utilisé au départ pour désinfecter les vêtements, notamment des poux. A un autre moment, à propos du camp d'extermination d'Auschwitz, le chef nazi recommande l'utilisation de chiens "capables de mettre en pièces n'importe qui sauf leur maître".
Le point d'orgue de ce "journal de l'horreur" est sans doute atteint le 4 octobre 1943 où une "réunion de chefs de groupes" est inscrite. Le chef de la SS est à Potsdam, dans la Pologne occupée par les nazis. A 17h30, il tient un discours durant lequel il évoque, devant le petit comité, les desseins nazis.
"Je parle de l'évacuation des juifs, de l'extermination du peuple juif. (...) Cela fait partie de nos plans, nous éliminons les juifs, nous les exterminons... une petite affaire."
La Seconde guerre mondiale a fait 60 millions de morts. Six millions de juifs ont été exterminés dans les "camps de la mort".