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Culture

L'alpiniste Maurice Herzog est mort

Maurice Herzog, en 1950

Maurice Herzog, en 1950 - -

L'alpiniste Maurice Herzog est décédé jeudi soir à l'âge de 93 ans. IL fut le premier à franchir la barre des 8 000 mètres, en atteignant le sommet de l'Annapurna, dans l'Himalya, en 1950. Il devint ensuite secrétaire d’État sous Charles de Gaulle.

Il restera dans l’histoire comme le premier homme à avoir gravi un sommet de plus de 8 000 mètres. Maurice Herzog est décédé jeudi soir à l'âge de 93 ans. « Je vous confirme la mort de Maurice Herzog », a sobrement déclaré un responsable de la Fédération française de la Montagne et de l'Escalade, qui tenait l'information du cabinet du maire de Chamonix, ville dont Herzog fut maire de 1968 à 1977.
Maurice Herzog avait atteint la cime de l'Annapurna (8 091 m) le 3 juin 1950, devenant le premier homme à gravir un sommet de plus de 8 000 mètres. Il était accompagné de Louis Lachenal, qui comme lui avait perdu plusieurs doigts et orteils, gelés, après une descente dramatique. L'équipe comprenait aussi notamment les guides de haute montagne Gaston Rebuffat et Lionel Terray.

Amputé des doigts et des orteils

A 14h00, ce 3 juin 1950, avec Louis Lachenal, il foule par un vent glacial ce sommet himalayen de 8 078 m. Maurice Herzog, chef d'une expédition qui n'avait pas d'oxygène et progressait sans cartes, brandit le fanion tricolore, ressentant une forme d'extase. Sans cet exploit, a-t-il dit, « je n'aurais pas eu la vie que j'ai eue après ». Il a payé sa victoire par une amputation des doigts et des orteils. « Vous voyez ce que j'ai en moins mais, moi, je sens ce que j'ai en plus. Et c'est incomparablement plus grand que ce que j'ai en moins », disait-il.

La politique après la montagne

Herzog, qui avait participé à la Résistance, avait acquis une grande notoriété après cet exploit, écrivant notamment un livre relatant l’exploit : Annapurna, premier 8000, vendu à une douzaine de millions d'exemplaires et traduit en 40 langues.
Sa notoriété lui ouvrit notamment les portes de la politique. Il était ainsi devenu secrétaire d'Etat à la Jeunesse et aux Sports (1958-65), sous la présidence de Charles De Gaulle. Avec son physique d'acteur de cinéma, « il était auréolé d'une gloire dont il est difficile de se faire une idée. Il était notre Lindbergh, notre Redford, un des rares Français à être connus partout dans le monde », a écrit l'académicien Jean d'Ormesson en 1997.
Membre du Comité international olympique (CIO) de 1970 à 1995, puis membre honoraire, il avait été élevé le 1er janvier 2012 au rang de Grand-croix de l'Ordre national de la Légion d'honneur.

Statue lézardée

Mais la statue du héros s'est lézardée. La mémoire collective tend à faire d'Herzog le grand vainqueur de l'Annapurna, reléguant au second rang Lachenal, ainsi que les grands alpinistes qui les accompagnaient, Lionel Terray et Gaston Rébuffat. La version des faits trop à la gloire du seul Herzog a commencé à être révisée en 1996, date de publication du texte intégral des mémoires de Lachenal, Carnets du vertige. Louis Lachenal expliquait avoir « agi en guide » et poursuivi l'ascension au-delà de ses limites parce qu'il était persuadé que Maurice Herzog, décidé à atteindre le sommet, ne reviendrait pas vivant s'il partait seul.
En 2012, Félicité Herzog - la fille que Maurice Herzog eut avec Marie-Pierre de Cossé-Brissac, issue d'une grande famille de la noblesse française - n'a pas arrangé l'image de son père qu'elle a traité, dans un « roman » qui n'en est pas vraiment un, ironiquement intitulé Un héros, de « menteur et d'hémiplégique de la pensée ».

Philippe Gril avec AFP