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Culture

L'Académie installe Simone Veil dans le fauteuil de Racine

Simone Veil, 82 ans, est devenue la sixième femme de l'Histoire à entrer à l'Académie française. Sur son épée d'académicienne, Simone Veil a fait graver le nom du camp d'extermination de Birkenau et le nombre 78651, son numéro de déportée qu'elle a tatoué

Simone Veil, 82 ans, est devenue la sixième femme de l'Histoire à entrer à l'Académie française. Sur son épée d'académicienne, Simone Veil a fait graver le nom du camp d'extermination de Birkenau et le nombre 78651, son numéro de déportée qu'elle a tatoué - -

PARIS - Simone Veil, 82 ans, est devenue la sixième femme de l'Histoire à entrer à l'Académie française lors d'une cérémonie en présence du...

PARIS (Reuters) - Simone Veil, 82 ans, est devenue la sixième femme de l'Histoire à entrer à l'Académie française lors d'une cérémonie en présence du président Nicolas Sarkozy et deux de ses prédécesseurs.

"Je suis fière d'être reçue par votre compagnie", a dit à ses pairs cette femme au destin hors du commun, rescapée des camps nazis, magistrate, devenue ministre, présidente du Parlement européen et membre du Conseil constitutionnel.

Sous la Coupole, l'écrivain Jean d'Ormesson a conclu son émouvant et facétieux hommage à sa nouvelle collègue par ces mots : "Comme l'immense majorité des Français, nous vous aimons, Madame. Soyez la bienvenue dans le fauteuil de Racine, qui parlait si bien de l'amour".

Née Simone Jacob dans une famille "juive et très française, patriote et laïque", a dit Jean d'Ormesson, la future ministre connaîtra les camps nazis, où elle perdra ses parents et son frère.

"Je pense avec émotion à tous ceux et à toutes celles qui ont connu l'horreur des camps de concentration et d'extermination. Leur souvenir à tous entre ici avec vous", a dit l'académicien.

Simone Veil a évoqué cette épreuve dans son intervention, consacrée selon la tradition à celui qu'elle remplace sous la Coupole, l'ancien Premier ministre Pierre Messmer, mort en 2007.

Entre deux épisodes de la vie de ce disciple du général de Gaulle, elle s'est souvenue d'avoir vu, à Auschwitz, un fragment de journal allemand évoquant le débarquement allié en Normandie.

"Qu'il me soit permis, devant (l'ancien résistant) François Jacob, de rendre hommage à ceux qui incarnèrent alors l'honneur retrouvé et l'action en vue de la liberté", a dit la nouvelle "immortelle", qui a conclu son intervention par un éloge de l'amitié franco-allemande.

DIGNITÉ DE LA FEMME

Ministre de la Santé au début des années 1970, Simone Veil fut à l'origine de la loi légalisant l'avortement en France.

Face aux violentes critiques qu'elle dut essuyer alors, "vous êtes une espère d'Antigone qui aurait triomphé de Créon", a dit Jean d'Ormesson.

L'adoption de loi, en 1974, fut "une victoire historique. Elle unit à jamais votre nom au tableau d'honneur de la lutte ardente dans le monde contemporain pour la dignité de la femme", a souligné l'académicien.

La cérémonie de deux heures s'est déroulée devant Nicolas Sarkozy, qui s'est ravisé après avoir annulé sa présence pour cause d'agenda. Les anciens présidents Jacques Chirac et Valéry Giscard d'Estaing, lui-même académicien, étaient présents.

Le Premier ministre François Fillon, les ministres Luc Chatel (Education), Valérie Pécresse (Enseignement supérieur), et Frédéric Mitterrand (Culture), l'homme d'affaires Pierre Bergé et le maire socialiste de Paris Bertrand Delanoë étaient aussi dans la salle.

"Simone Veil est un personnage historique, qui incarne l'histoire du XXe siècle", a déclaré Frédéric Mitterrand sur France 3 après la cérémonie.

Coiffée de son immuable chignon, Simone Veil avait revêtu le traditionnel habit noir décoré d'un feuillage vert et or, signé Karl Lagerfeld et brodé par la maison Lesage.

Sur son épée d'académicienne, Simone Veil a fait graver le nom du camp d'extermination de Birkenau et le nombre 78651, son numéro de déportée qu'elle a tatoué sur le bras.

Y figurent aussi la devise de la France "Liberté, égalité fraternité" et celle de l'Union européenne "Unie dans la diversité".

Elizabeth Pineau, édité par Yves Clarisse