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Comment dessine-t-on une BD érotique?

Extases de JeanLouis Tripp

Extases de JeanLouis Tripp - JeanLouis Tripp Casterman 2017

Le dessinateur JeanLouis Tripp raconte sa découverte de la sexualité à l'adolescence dans la BD Extases. Il explique comment représenter graphiquement des scènes de sexe.

Malgré son titre et son contenu très suggestif, Extases, la nouvelle BD de JeanLouis Tripp (Magasin général) n’est pas une BD érotique. "La fonction d’une BD érotique ou pornographique est d’être excitante. Extases, c’est le contraire", explique l’auteur, qui raconte dans cet album de BD sa découverte de la sexualité à l’adolescence.

"La différence entre un récit autobiographique classique et Extases, c’est que j’ai décidé d’être au plus près possible de la réalité", précise-t-il. Prévu comme un one-shot, Extases est désormais une série en quatre volumes. Dans les trois prochains, JeanLouis Tripp retracera sa vie du début des années 1980 à maintenant et mêlera sexe et spiritualité.

"Ce n'est pas fait pour exciter"

Avec Extases, JeanLouis Tripp détourne les techniques de la BD érotique pour "dédramatiser" le sexe: "Je veux expliquer que le sexe n’est pas une si grosse affaire. On vit dans un monde complètement borné par des tabous religieux, politiques, sociétaux… On grandit avec l’idée qu’il ne faut surtout pas parler de la sexualité".

Même si Extases n’est pas conçu pour exciter, certaines scènes titillent plus que d’autres. Lorsqu’on évoque la scène d’orgie qui clôt l’album, Tripp répond du tac au tac: "J’explique ce qu’il s’est passé et comment j’en suis arrivé là. Je dis que ce n’est pas fait pour exciter. Maintenant, si quelqu’un s'excite là-dessus, ça ne dépend pas de moi".

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bd tripp 2 © JeanLouis Tripp Casterman 2017

Le plus difficile à dessiner reste le frein

Alors parlons de ce qui dépend de lui: la manière dont il dessine son pénis et celui des autres. "Je sais à quoi ça ressemble. Le personnage que je dessine n’est pas moi: c’est une représentation de moi. Je n’essaye pas de me représenter hyper-ressemblant", explique-t-il avant de poursuivre: "quand on a quelques notions d’anatomie, ce n’est pas compliqué".

Il dessine principalement de mémoire. "Cela dit, il m’est arrivé pour certaines cases de devoir prendre une photo pour voir la position de la main", ajoute-t-il. Selon lui, le plus difficile à dessiner est "le frein et la manière dont il s’articule avec la peau du prépuce quand il est décalotté". Autre difficulté: la lubrification féminine - "ce n’est pas quelque chose de visible".

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bd tripp 3 © JeanLouisTripp Casterman 2017

"Les poils, c’est intéressant"

Et les poils? “Les poils, c’est intéressant”, estime JeanLouis Tripp. "J’ai eu mon adolescence à une époque où les poils, c’était super excitant. A l’époque, les revues érotiques ne les montraient pas". Selon le dessinateur, les poils sont "très compliqués" à dessiner.

En particulier ceux du vagin: "Comme il y avait beaucoup de poils à l’époque, ça vient un peu empiéter sur la clarté du dessin". Une scène de masturbation lui a en particulier donné du fil à retordre: "J’avais les mouvements à dessiner. Ce n’était pas évident. Il faut d’abord dessiner le sexe, ensuite les doigts dessus, puis les poils sur les doigts et enfin les petits traits qui symbolisent le mouvement".

Dessiner des scènes érotiques est-il excitant? "C’est une vrai question que je me suis posé", répond Tripp. "Dans les années 1990 et début 2000, j’ai fait des dessins érotiques et des BD érotiques. À cette époque, le fait de dessiner des scènes érotiques avait un effet secondaire excitant. C’était compliqué de garder sa concentration. Avec Extases, je me suis inquiété, parce que j’en ai pour huit ans à bosser là-dessus. Or, cette excitation ne s’est pas produite, justement parce qu'Extases n’est pas une BD érotique!"

Extases, tome 1, JeanLouis Tripp, Casterman, 272 pages, 22 euros.

Jérôme Lachasse