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Cannes: Leos Carax se réconcilie avec la Croisette

Le réalisateur français Leos Carax est revenu sur la Croisette cette année avec "Holy Motors", film qui lui a valu les suffrages de nombreux festivaliers, à la différence de ce qui s'était produit 13 ans plus tôt avec "Pola X". /Photo prise le 23 mai 2012

Le réalisateur français Leos Carax est revenu sur la Croisette cette année avec "Holy Motors", film qui lui a valu les suffrages de nombreux festivaliers, à la différence de ce qui s'était produit 13 ans plus tôt avec "Pola X". /Photo prise le 23 mai 2012 - -

par Wilfrid Exbrayat CANNES (Reuters) - Leos Carax est revenu sur la Croisette cette année avec "Holy Motors", film qui lui a valu les suffrages de...

par Wilfrid Exbrayat

CANNES (Reuters) - Leos Carax est revenu sur la Croisette cette année avec "Holy Motors", film qui lui a valu les suffrages de nombreux festivaliers, à la différence de ce qui s'était produit 13 ans plus tôt avec "Pola X".

Celui qui passait pour un cinéaste prodige dans les années 80 est aussi peu prolixe derrière la caméra qu'il est peu bavard.

"Boy meets girl" le révèle en 1984. Suivent "Mauvais sang" en 1986 et "Les amants du Pont-Neuf" cinq ans plus tard.

Huit ans s'écoulent avant qu'il ne tourne "Pola X", qui avait été reçu fraîchement à Cannes. Neuf ans plus tard, il co-réalise "Tokyo!" avec Michel Gondry et Bong Joon-ho.

Puis vient "Holy Motors", un film baroque et bizarre, joliment filmé comme toujours, porté par Denis Lavant, l'acteur fétiche du cinéaste, qui endosse ici l'habit, et parfois les oripeaux, de 11 personnages, pas moins, dont un certain Monsieur Merde -mi-homme, mi-bête- qui apparaissait déjà dans "Tokyo".

Ce n'est pas la seule citation de précédents films de Carax que comporte Holy Motors. La séquence où l'on retrouve Kylie Minogue se déroule à l'intérieur d'une Samaritaine vidée de sa substance, mais d'où les protagonistes dominent le Pont-Neuf dans une belle vue plongeante.

De la présence inattendue de la chanteuse australienne dans "Holy Motors", Leos Carax a dit, en conférence de presse: "l'une des plus belles choses qui soit arrivée au film, c'est cette rencontre".

Eva Mendes est également une présence surprenante au générique du film. A la différence de Kylie Minogue, elle n'était pas présente à la conférence de presse.

"ÉNORME MÉFIANCE"

Monsieur Oscar (Denis Lavant) se déplace dans Paris, de l'aube à la nuit, dans une limousine blanche hypertrophiée conduite par Céline, personnage interprété par l'actrice Edith Scob. Cette dernière avait accédé à la notoriété dans les années 60 avec "Les yeux sans visage", un film fantastique de Georges Franju, dont Carax admet que l'ombre planait sur le projet.

L'intérieur de ce véhicule est comparable à une loge d'artiste où Monsieur Oscar vient se grimer pour prendre tour à tour de nouvelles identités: une mendiante, un banquier, un mourant ou encore un "ouvrier spécialisé dans la motion capture", technique employée en particulier pour simuler des mouvements naturels dans les jeux vidéo.

Si Leos Carax tourne peu, c'est aussi parce que "Les amants du Pont-Neuf", film pharaonique fut à la fois un échec commercial et un gouffre financier.

Depuis, "il y a une énorme méfiance, en particulier dans le monde des banquiers", selon la productrice Martine Marignac.

"La difficulté de financer ce genre de film vient de ce qu'ils ne sont pas considérés comme du cinéma commercial aujourd'hui", a-t-elle expliqué.

C'est la difficulté "de monter des films un peu ambitieux, des films d'auteur, qui n'intéressent absolument pas des chaînes de télévision", a- t-elle ajouté, soulignant que la situation, loin de s'arranger, empirait de jour en jour et que le film avait failli ne pas se faire.

Leos Carax dit lui-même de "Holy Motors" que "c'est un film particulier car imaginé très vite à force de ne pas pouvoir tourner d'autres projets que j'avais" en tête.

Le film -entre autres incongruités- se clôt sur un curieux dialogue des limousines, rentrées au dépôt. Leos Carax en a donné une explication quelque peu byzantine, jugeant qu'il y avait un "sacré moteur" dans les hommes, les bêtes et les machines. "J'ai voulu faire parler les machines aussi", a-t-il résumé.

Si Leos Carax évoque également le monde animal, c'est aussi parce qu'à la fin de ses pérégrinations, Monsieur Oscar rentre chez lui retrouver sa femme et sa fille, un couple de guenons.

Le film est dédié à l'actrice Katerina Golubeva, décédée l'an passé. Compagne de Leos Carax, elle avait joué l'un des rôles principaux de "Pola X".

Edité par Patrick Vignal