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Cannes: le réalisateur de "Precious" s'essaie au thriller

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par Wilfrid Exbrayat CANNES (Reuters) - Sexe, effusions de sang, blonde incendiaire, Oedipe inassouvi, ségrégation: les ingrédients ne manquent pas à...

par Wilfrid Exbrayat

CANNES (Reuters) - Sexe, effusions de sang, blonde incendiaire, Oedipe inassouvi, ségrégation: les ingrédients ne manquent pas à "Paperboy", deuxième thriller de la compétition qu'est venu défendre son réalisateur, l'Américain Lee Daniels.

Reste à savoir s'ils ont été correctement mélangés pour que la sauce prenne et, de ce point de vue, l'accueil de la presse a été mitigé jeudi à l'issue de sa projection.

Dans la Floride de la fin des années 60, Anita (Macy Gray, plutôt connue comme chanteuse) est la bonne à tout faire de la famille Jansen.

C'est elle aussi qui a élevé Jack (Zac Efron, réchappé de la franchise "High School Musical"), privé de mère. Le patriarche de la maisonnée (Scott Glenn) dirige un journal local. Il fait de sa future nouvelle épouse la rédactrice en chef.

Jack n'apprécie pas la marâtre en devenir, adepte de la ségrégation tant sociale que raciale, et le fait savoir en lui retirant du doigt une bague qui appartenait à sa mère.

L'arrivée de Charlotte (Nicole Kidman), blonde provocante interprétée par Nicole Kidman, remue le jeune homme.

Charlotte, qui a visiblement un goût du danger très prononcé, a la marotte d'écrire des lettres aux condamnés à mort. Ces correspondances deviennent vite enflammées. L'un surtout, un chasseur d'alligators prénommé Hillary van Wetter (John Cusack), l'intéresse tout particulièrement, à tous points de vue, parce que précisément il reste assez réservé.

Ward (Matthew McConaughey), un journaliste d'investigation, est le frère ainé de Jack. A l'affût d'une bonne histoire, Ward et son collaborateur Yardley (David Oyelowo) vont, avec le concours de Charlotte, tenter de démontrer sinon l'innocence de Hillary du moins que la procédure a été entachée d'irrégularité.

Comme dans tout thriller qui se respecte, la vérité ne se niche pas toujours où l'on croit et même les personnages semblant agir pour la bonne cause sont loin d'être sans taches ou, à défaut, ont un secret qui empoisonne leur existence.

"Personne n'est vraiment ce qu'il paraît être", a résumé Matthew McConaughey jeudi en conférence de presse. "Tous les personnages ont du mal avec leur propre identité".

"POUPÉE BARBIE"

L'érotisme imprègne intégralement le film, souvent de manière trouble. Il est malsain, outrancier ou pornographique lorsqu'il est attaché aux personnes de Ward ou de Charlotte.

Il est plus diffus mais pourtant tout aussi troublant lorsque la caméra filme un Jack, le véritable objet du désir de "Paperboy", le plus souvent en petite tenue.

"Je n'étais pas censé me sentir à l'aise", a dit l'idole des teenagers. "Mon personnage est un jeune homme plutôt naïf, qui va se familiariser davantage avec la société et le monde en général".

Depuis la mort de sa mère, le beau sexe indiffère le frère cadet de la famille Jansen. Charlotte, véritable apparition pour le bel endormi, est tout à la fois une petite amie, une mère de substitution et une "poupée Barbie avec le feu au c.", suivant la description colorée qu'en fait Anita, par ailleurs la narratrice du film.

Tirée d'un roman écrit par Pete Dexter, un ancien journaliste, l'intrigue multiforme avait séduit un autre cinéaste, de renom, avant que Lee Daniels ne s'en empare.

"Pedro Almodovar avait écrit un projet de scénario mais je crois qu'il a changé d'avis par la suite comme c'est souvent le cas à Hollywood", a dit Lee Daniels.

Le contre-emploi est l'une des bonnes idées du cinéaste. C'est évident pour Zac Efron mais John Cusack, Nicole Kidman et même Matthew McConaughey interprètent aussi des personnages qui ne sont pas dans leur registre habituel.

De fait, Nicole Kidman a dit, lors de la conférence de presse, qu'elle avait souhaité tourner avec Lee Daniels "car il m'apprendrait beaucoup; il me ferait repousser mes limites".

L'histoire comporte des résonances particulières pour celui qui l'a mise en scène et qui fait ses premières armes à Cannes.

"Je ne compte plus le nombre de personnes blanches, dans les années 80 et 90, que je connaissais très bien mais qui ne voulaient pas être vues en public avec moi", a déclaré Lee Daniels, à la toute fin de la conférence de presse.

Avec Mike Collett-White, édité par Yves Clarisse