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Cannes: "De rouille et d'os", une histoire de réconciliation

Le réalisateur Jacques Audiard (à gauche) et les acteurs Marion Cotillard et Matthias Schoenaerts, sur la Croisette pour "De rouille et d'os", présenté jeudi en compétition à Cannes trois ans après "Un prophète". /Photo prise le 17 mai 2012/REUTERS/Christ

Le réalisateur Jacques Audiard (à gauche) et les acteurs Marion Cotillard et Matthias Schoenaerts, sur la Croisette pour "De rouille et d'os", présenté jeudi en compétition à Cannes trois ans après "Un prophète". /Photo prise le 17 mai 2012/REUTERS/Christ - -

par Wilfrid Exbrayat CANNES (Reuters) - "De rouille et d'os", le nouveau film de Jacques Audiard présenté jeudi en compétition à Cannes trois ans...

par Wilfrid Exbrayat

CANNES (Reuters) - "De rouille et d'os", le nouveau film de Jacques Audiard présenté jeudi en compétition à Cannes trois ans après "Un prophète", prend en quelque sorte le contrepied de ce précédent long métrage récompensé par le Grand prix du jury.

C'est peu dire que le premier des trois films français en compétition cette année à Cannes, et sixième long métrage du fils du dialoguiste et réalisateur Michel Audiard, était très attendu.

En témoignaient une foule de festivaliers qui s'était formée très tôt jeudi matin, plus d'une heure avant la projection de presse, à l'issue de laquelle la critique semblait très partagée, peu d'applaudissements ayant salué l'ouvre.

"De rouille et d'os", dédié au cinéaste Claude Miller récemment disparu et dont le film "Thérèse Desqueyroux" fermera le festival, sort sur les écrans français ce même jeudi.

Si l'on doit le résumer sa trame d'un trait, il s'agit d'une histoire d'amour entre une dresseuse d'orques qui a perdu ses jambes dans un accident et un père célibataire dont la puissance physique est le principal moyen d'existence.

Mais pas seulement, de l'avis de l'acteur belge Matthias Schoenaerts - révélé par "Bullhead", où il avait déjà un rôle très "physique" - qui interprète le père, une force brute qui prend la vie comme elle vient, aime le sexe mais pas l'amour, au risque d'oublier ses devoirs envers son fils en bas âge.

Il y voit l'histoire d'une "réconciliation entre homme et femme, entre père et fils, entre frère et soeur, entre l'homme et l'animal", ainsi qu'il l'a dit jeudi en conférence de presse.

Avant de perdre ses jambes, Stéphanie (Marion Cotillard), "une sorte de princesse arrogante", suivant les propres mots de Jacques Audiard, est incapable d'aimer. Il en est de même pour Ali (Matthias Schoenaerts), avant qu'il rencontre Stéphanie. C'est la première réconciliation.

Ali néglige son fils pour diverses raisons. Il faudra qu'il manque de mourir pour qu'il réalise à quel point il l'aime. Deuxième réconciliation.

Parce qu'il travaille pour une société de sécurité chargée d'espionner le personnel d'une enseigne de la grande distribution, Ali est indirectement responsable du licenciement de sa soeur. Cette troisième réconciliation est plus suggérée que réelle.

Malgré le traumatisme, Stéphanie revient au Marineland d'Antibes où elle dressait les orques et, le temps de la plus belle scène du film, renoue ce qui serait presque un dialogue avec les mammifères. Quatrième et dernière réconciliation.

"TRÈS VIRILE ET TRÈS SENSUELLE"

"Un prophète" campait un univers viril, confiné - celui de la prison - et par là suprêmement violent.

"De rouille et d'os", tiré d'un recueil de nouvelles de l'écrivain canadien Craig Davidson, n'emprunte au précédent que la violence, celle des combats discrets et illégaux livrés par Ali pour se faire un peu plus d'argent.

"On a développé le désir d'une histoire d'amour, d'espace, d'écran large, de lumière et de couleur", a expliqué Jacques Audiard, le démarquant en cela, explicitement, d'"Un prophète".

Mais les aspects sombres ne font pas défaut non plus à "De rouille et d'os".

"Le film raconte l'histoire de personnages d'un temps de crise, d'un moment où la société est passée dans une époque de barbarie, où l'on mange dans les poubelles (NDLR - ce que fait Ali pour se nourrir lui et son fils) (.), qu'est-ce qu'il reste à faire, à vendre les corps, les organes peut-être?", a lancé Jacques Audiard.

Au terme de l'écriture du scénario - le travail de conception du film avait été entamé dès l'époque d'"Un prophète" - le choix de Marion Cotillard s'est révélé une évidence pour Jacques Audiard, tant, a-t-il confié, il avait été "ébloui" par sa prestation dans "La Môme", d'Olivier Dahan.

Marion Cotillard reçut à la fois l'Oscar et le César de la Meilleure Actrice en 2007 pour ce film qui lui ouvrit les portes d'Hollywood. Elle a tourné ensuite avec des réalisateurs tels que Michael Mann, Christopher Nolan, Steven Soderbergh et Woody Allen.

Elle joue également dans "The Dark Knight Rises". Cette dernière déclinaison des aventures de Batman sera sur les écrans français fin juillet.

"Marion est un actrice très virile et très sensuelle en même temps", a observé Jacques Audiard. "Il y a une autorité dans le jeu, ce que j'ai vu (...) c'est qu'elle était capable de passer de l'autre côté du miroir", a-t-il ajouté.

Edité par Sophie Louet