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A Florence, Giotto redécouvert grâce aux rayons ultraviolets

Cachés depuis des siècles, les détails originaux de peintures de Giotto ont été redécouverts grâce aux rayons ultra-violets lors de la restauration d'une chapelle de la basilique Santa Croce de Florence. /Photo prise le 26 février 2010/REUTERS/Alessandro

Cachés depuis des siècles, les détails originaux de peintures de Giotto ont été redécouverts grâce aux rayons ultra-violets lors de la restauration d'une chapelle de la basilique Santa Croce de Florence. /Photo prise le 26 février 2010/REUTERS/Alessandro - -

par Philip Pullella FLORENCE, Italie - Cachés depuis des siècles, les détails originaux de peintures de Giotto ont été redécouverts grâce aux rayons...

par Philip Pullella

FLORENCE, Italie (Reuters) - Cachés depuis des siècles, les détails originaux de peintures de Giotto ont été redécouverts grâce aux rayons ultra-violets lors de la restauration d'une chapelle de la basilique Santa Croce de Florence.

"Nous avons percé le Giotto secret", s'enthousiasme Isabella Lapi Ballerini, responsable de l'Atelier de la Pierre dure, l'un des plus prestigieux instituts de restauration d'oeuvres d'art.

L'an dernier, une dizaine de restaurateurs et de chercheurs ont entrepris un ambitieux projet de "diagnostic sans intrusion" de l'état des peintures de Giotto, datant de 1320, dans la chapelle Peruzzi de la basilique, la plus grande église franciscaine au monde.

Le but de cette étude était de pouvoir établir une "feuille de route" en vue de travaux de restauration, qui fixerait en quelque sorte un "contrat hospitalier" destiné à préserver l'intégrité de la chapelle d'une superficie de 170 m2.

Car les peintures de Giotto, qui ont inspiré nombre d'artistes de la Renaissance italienne, à commencer par Michel-Ange, ont subi au fil des siècles de nombreux outrages de la main de l'homme.

Financées par la famille Peruzzi au début du XIVe siècle, les peintures furent recouvertes à la chaux au début du XVIIIe siècle pour laisser place à une nouvelle décoration.

Lors d'une première restauration en 1840, les ouvriers n'y allèrent pas de main morte, retirant de façon grossière la couche blanche en altérant considérablement l'oeuvre de Giotto.

Les peintres qui leur succédèrent tentèrent de combler les parties manquantes, et ce ravaudage fut lui-même effacé en 1958, donnant aux peintures leur aspect actuel.

BEAUTÉS INSOUPÇONNABLES

L'examen minutieux aux rayons ultra-violets des murs et plafonds de la chapelle Peruzzi ont révélé aux membres de l'équipe des beautés insoupçonnables à l'oeil nu.

"Ce fut quelque chose de vraiment stupéfiant", se souvient, encore émerveillée, Cecilia Frosinini, coordinatrice du projet, qui a travaillé sur les scènes de la vie de Saint Jean Baptiste et de Jean l'Evangéliste.

"Nous savions que notre diagnostic scientifique allait déboucher sur des résultats intéressants, mais lorsque nous avons observé aux rayons ultraviolets ces peintures aux couleurs passées, abîmées par d'anciennes restaurations, elles ont repris vie tout d'un coup", raconte-t-elle.

"Les scènes sont à nouveau en trois dimensions, on a pu voir tout le clair-obscur, deviner les corps sous les vêtements, scruter les expressions du visage".

Les membres de l'équipe peuvent ainsi admirer aujourd'hui les détails de l'oeuvre qui ont eu tant d'influence sur Michel-Ange dans son travail au plafond de la Chapelle Sixtine de Rome, 140 ans après la mort de Giotto.

Les peintures de la chapelle Peruzzi sont qualifiées improprement de fresques, alors qu'elles ont été dessinées "a secco" (à sec) sur le plâtre, au contraire des oeuvres faites sur plâtre frais, où les couleurs imprègnent la matière, comme dans la chapelle Bardi de la basilique.

Dans la scène où Dieu accueille Jean le Baptiste au paradis, on peut s'extasier, lunettes ultraviolet sur le nez, sur les rides du front de Jean, les boucles de sa barbe, le blanc de ses yeux ou le regard bienveillant de Dieu.

Mais tout cela restera inaccessible au visiteur classique, une utilisation intensive de cette technique, fort hypothétique par ailleurs, signifiant à moyen terme la destruction de ces merveilles.

Pascal Liétout pour le service français