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Régulation

L'autorité de supervision des marchés allemande exige une régulation rapide de la DeFi

Dans un contexte de turbulences sur le marché des stablecoins, la Bafin veut rapidement mettre en place une régulation de la finance décentralisée.

Les turbulences sur le marché des cryptomonnaies et des stablecoins ont eu pour effet d'attirer le regard des régulateurs. La semaine dernière, les autorités américaines, à travers la voix de l'actuelle sécrétaire au Trésor des Etats-Unis Janet Yellen, a confirmé son intention d'avancer sur son projet de régulation des stablecoins.

Mais jusqu'à présent, on avait moins entendu les autorités des pays de l'Union européenne, qui travaille aussi sur son projet de réglementation du secteur. La Bafin, l'autorité de supervision des marchés financiers en Allemagne, est sortie du bois.

Lundi, Birgit Rodolphe, la directrice chargée de la prévention du blanchiment d'argent de l'autorité, a publié un post intitulé "Un avenir sans surveillance? La finance décentralisée, un défi pour la surveillance financière". Si le post ne fait aucune référence à la chute de l'UST et de la cryptomonnaie luna, nul doute qu’il s’inscrit clairement en réaction à ces évènements.

"Un mot magique"

La Bafin vise en particulier la finance décentralisée, aussi appelée DeFi. Pour rappel, la finance décentralisée est un système financier ouvert, accessible à n'importe quel utilisateur, qui permet de réaliser certaines opérations de la finance traditionnelle (comme des prêts par exemple). C’est notamment dans cet écosystème qu’émergent de nombreux projets de blockchain, dont celui de la blockchain Terra, actuellement dans la tourmente.

Pour l’autorité, la finance décentralisée est un "mot magique".

"Si l'on a besoin d'un prêt à court terme, on le trouve en quelques secondes sur internet. Pas auprès d'une banque directe, pas auprès d'une fintech - mais auprès d'un collectif pseudonyme de milliers de personnes du monde entier", écrit Birgit Rodolphe.

"Le temps presse"

C’est dans ce contexte qu'elle appelle à réguler la finance décentralisée, car bien qu'il s'agisse encore d'un marché de niche, si la DeFi "doit devenir un véritable concurrent du marché financier traditionnel, cela ne fonctionnera pas sans nouvelle réglementation spécifique."

"Le temps presse. Plus le marché DeFi reste longtemps sans surveillance, plus le risque pour les consommateurs augmente. Et plus le risque que des offres critiques s'établissent qui ont une pertinence systémique est grand. Nous devrions donc fixer activement des repères réglementaires pour les nouvelles offres et permettre ainsi aux prestataires innovants de mettre en œuvre leurs offres en toute sécurité juridique", peut-on lire.

Alors que l'on en sait plus sur la position allemande, l’Europe est toujours en train de négocier sa réglementation Mica (ou "Markets in Crypto-Assets" actuellement en discussion), dont une issue est prévue d'ici la fin du mois de juin. Un trilogue entre les trois principales institutions de l'UE (Commission, Conseil et Parlement) est de nouveau prévu ce mercredi, où il sera notamment abordé la question de la réglementation des stablecoins.

Le réglement Mica cherche notamment à encadrer strictement la finance décentralisée. Or, pour l'association pour le développement des actifs numériques (Adan), ce domaine devrait être traité dans un texte à part. "Il y a des propositions encourageantes dans les mandats Mica du Conseil de l'Union européenne et du Parlement européen afin de traiter la DeFi à part, mais ce n’est pas suffisant à nos yeux", confie à BFM Crypto Faustine Fleuret, la patronne de l'Adan.

"Aujourd’hui, la DeFi n'est pas clairement écartée du périmètre de Mica, qui est un texte inadapté à ces applications car rédigé pour les usages centralisés. Il faut une exclusion explicite de la DeFi du champ de Mica. Si l’on veut l'encadrer, il faut créer un texte nouveau, spécifique à cet univers. Ce sont des travaux de plus long terme que l'Adan est prête à accompagner, et sur lesquels l'association et ses membres ont déjà commencé à réfléchir", ajoute cette dernière.
Pauline Armandet