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"Ce projet peut révolutionner l'écosystème": retour sur le stablecoin décentralisé "Gho" de Aave

Le protocole Aave a présenté son projet de stablecoin "Gho", qui serait indexé au dollar et soutenu par un ensemble de cryptomonnaies. Comment fonctionnera-t-il? BFM Crypto fait le point.

Le protocole Aave fait son trou dans l'univers de la finance décentralisée (DeFi). Malgré le crypto-krach qui a fragilisé certains stablecoins - comme l'ust de la blockchain terra - Aave pense que les stablecoins ont encore de beaux jours devant eux.

Jeudi, la société a dévoilé les contours de son stablecoin décentralisé baptisé "Gho" (dont le projet est détaillé par ici). Ce stablecoin, indexé au dollar, serait soutenu par un ensemble de cryptomonnaies et sa stabilité dépendrait de six "facilitateurs".

Pour rappel, un stablecoin (ou cryptomonnaie stable) est un crypto-actif (ou actif numérique) qui est arrimé à une monnaie fidiciaire comme l'euro ou le dollar. Un stablecoin peut aussi être adossé à d'autres actifs (comme par l'exemple l'or). C'est ce qu'on appelle le sous-jacent du stablecoin.

Lorsque le cours du sous-jacent varie à la hausse ou à la baisse, la valeur du stablecoin doit s'aligner sur ce dernier. La promesse est de tenir en permanence la parité, par exemple 1 USCD = 1 dollar. Cet ancrage à une devise s'appelle aussi un "peg" ("arrimage" en anglais). Lorsqu'il y a un écart entre la valeur du sous-jacent et celle du stablecoin, on parle de "dé-peg" ou "perte de parité".

Avant de rentrer dans le détail de ce projet de stablecoin "Gho", revenons d'abord sur le fonctionnement du protocole Aave.

Le fonctionnement de Aave

Fondée en 2017, Aave est une plateforme spécialisée dans le prêt et l'emprunt de cryptomonnaies au sein de la DeFi, servant donc des prêteurs et des emprunteurs. Concrètement, les "prêteurs" fournissent des liquidités au protocole et gagnent en échange des intérêts. Ils peuvent également recevoir des aave tokens ou 'atoken', le token associé au protocole Aave.

De leur côté, les "emprunteurs" peuvent souscrire des emprunts en déposant à la place des cryptomonnaies en garantie (aussi appelé "collatéral"). Ils peuvent donc emprunter des cryptomonnaies sans avoir besoin de vendre leurs cryptomonnaies.

Ce protocole est à distinguer des plateformes de prêts du type Celsius ou encore BlockFi qui, en conservant/gérant les cryptomonnaies de leurs clients, rentrent dans le champs de la finance dite "centralisée". Ici, les fonds des clients de Aave sont déposés dans des contrat intelligents.

"Le code du contrat intelligent est public, open source, formellement vérifié et audité par des auditeurs tiers. Vous pouvez retirer vos fonds du pool à la demande ou exporter une version tokenisée de votre position de prêteur", peut-on lire sur le site.

Depuis sa création, le protocole est monté en puissance au point qu'il soit, selon les données du site de référence Defi Llama, le premier protocole de finance décentralisée, avec 9,47 milliards de dollars de cryptomonnaies sur ce même protocole.

En quoi consiste le stablecoin "Gho" de Aave?

Jeudi, le protocole a donc annoncé sur Twitter son projet de stablecoin, baptisé Gho, invitant sa communauté à voter sur son fonctionnement.

"Le gho serait soutenu par un ensemble diversifié de crypto-actifs choisis à la discrétion des utilisateurs, tandis que les emprunteurs continueraient à percevoir des intérêts sur leurs garanties sous-jacentes", souligne le protocole.

Si les cryptomonnaies qui soutiendraient le gho n'ont pas été spécifiées, il pourrait s'agir de celles déjà présentes sur le protocole Aave, comme ether, polygon ou encore avalanche.

Si ce projet venait à être accepté, il pourrait permettre l'emprunt de stablecoin sur Aave "plus compétitif", donnerait aux utilisateurs plus de marge de manoeuvre dans ce secteur et permettrait de génerer des "revenus supplémentaires", affirme le protocole.

Ce stablecoin serait notamment généré par les emprunteurs, en échange d'une surcollatéralisation de leur dette.

"C’est-à-dire que l’on vient déposer des cryptomonnaies en garantie, pour une valeur supérieure que ce que l’on souhaite emprunter. Comme pour toute dette, le gho impliquera de payer des intérêts. Ces intérêts seront alors entièrement reversés à la trésorerie de l'organisation autonome décentralisée (DAO)", précise le média Cryptoast.

Pour que ce stablecoin soit "stable", il dépendra notamment de "facilitateurs", un concept introduit par Aave, qui peut concerner une entité. Six facilitateurs, dont Aave ou encore Credit Score, ont été mentionné par le protocole. Concrètement, un facilitateur va permettre de stabiliser le stablecoin soit en brûlant (supprimant) des tokens, soit en générant de nouveaux tokens sur le marché, ce qui permet de garder une certaine stabilité s'il passe en dessous ou au dessus du dollar, auquel il est indexé.

"Ce projet peut révolutionner l'écosystème"

"C’est la première fois qu’on voit un stablecoin aussi complexe: on a l’impression d’avoir plusieurs couches dans ce stablecoin. Ce stablecoin est supporté par des faciliteurs qui génèrent d’autres revenus et derrière, on a un système de gouvernance qui va permettre de voter sur le fonctionnement de ce stablecoin. La DAO va pouvoir par exemple faire différents votes. On peut par exemple se demander s’il faut rajouter un faciliteur ou non, de même est-ce que la DAO compte faire un airdrop de Gho aux détenteurs de Aave?", confie à BFM Crypto Marouane Essaïdi, digital asset manager chez TheDiggers.

L'objectif, pour Aave, semble de permettre une adoption de ce stablecoin qui pourrait aller au delà de la finance décentralisée.

Ce stablecoin "fournira un niveau de sécurité et de décentralisation qui est inclusif pour les utilisateurs crypto-natifs tout en utilisant une stratégie de croissance qui met l'accent sur ses cas d'utilisation pour un public grand public croissant. Cette stratégie devrait être axée sur des cas d'utilisation tels que les paiements", souligne le protocole.

"Ce projet peut révolutionner l'écosystème. On a un mélange de beaucoup d’outils de finance décentralisée. S’il fonctionne beaucoup de projets vont s’inspirer comme cela là pour d’autres tokens. A voir ce que ça peut donner dans un système plus global", estime Marouane Essaïdi.
Pauline Armandet