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Suspicion de piqûre à Manosque: la jeune femme met en cause sa prise en charge à l'hôpital

Des affaires de piqûres sauvages en France

Des affaires de piqûres sauvages en France - AFP

Aux urgences de Pertuis comme à Manosque, difficile pour cette jeune manosquine de recevoir un certificat médical pour prouver sa piqûre. Le procureur parle de son côté de "fake news".

Un véritable parcours du combattant. Depuis samedi soir, E.*, jeune manosquine, a passé son temps à courir entre Pertuis et Manosque pour tenter d’obtenir un certificat médical suite à une suspicion de piqûre durant un concert du Festival Musiks.

"Je me suis rendue samedi soir aux urgences de Pertuis parce que celles de Manosque étaient fermées. À Pertuis, ils étaient tellement débordés que je n’ai pas pu avoir un certificat", se remémore la jeune bénévole.

"Un médecin m’a vu moins de cinq minutes. Idem le lendemain à Manosque lorsque je me suis rendue à l’hôpital", explique la jeune femme au micro de BFM DICI.

Un certificat délivré trois jours après les faits supposés

Une information confirmée par l’hôpital auprès de BFM DICI, qui reconnait que "le médecin a refusé d’établir un certificat médical car il n’y avait pas de réquisition judiciaire".

Finalement, E. s’est de nouveau rendue aux urgences de Manosque ce lundi: "J’y ai passé plusieurs heures, un enfer. Tout ça pour qu’un médecin me dise, comme à Pertuis, qu’il n’y avait aucune certitude de piqûre et il n’a toujours pas voulu me faire de certificat", témoigne la jeune femme.

Ce n’est finalement que mardi matin, soit plus de trois jours après les faits, que la jeune femme s’est vue prescrire un certificat, puisqu’elle était en compagnie d’un officier de police judiciaire.

Si le médecin a bien constaté un hématome sur le bras de la jeune bénévole, pas de trace de piqûre pour autant. "Mais dans le doute, j’ai fait une prise de sang pour savoir si j’avais des traces de substances dans le corps. Ce médecin a été génial et c’est le seul qui a bien agi. Il n’a pas exclu le fait que j’avais peut-être été piqué ailleurs sur le corps", assure E. au micro de BFM DICI.

Si elle ne garde heureusement aucun symptôme de cet incident, la jeune manosquine reste pour le moins choquée et ne veut plus entendre parler de cette histoire.

"C’est l’une des conséquences de la fermeture des urgences la nuit. Certains patients sont envoyés à Pertuis ou ailleurs. Parfois ils s’y rendent, parfois pas et cela peut avoir des conséquences", s'insurge un cadre de la mairie de Manosque contacté par BFM DICI.

Des relations parfois tendues entre médecins et policiers?

"Cette bénévole a été baladée durant plusieurs jours sans qu’on lui délivre un certificat médical. Il n’y a peut-être plus de traces de piqure trois jours plus tard" peste un cadre de la mairie de Manosque. Avant de poursuivre: "C’est pareil pour les ivresses sur la voie publique ou les gardes à vue. Les policiers ont du mal à se faire délivrer des certificats médicaux, ce qui peut avoir de lourdes conséquences sur les affaires traitées".

Selon les informations recueillies par BFM DICI, le déficit de médecins présents aux urgences entraîne naturellement un engorgement du service. Les relations entre des médecins et les forces de l’ordre peuvent parfois être tendues.

"Une ivresse publique manifeste (IPM), doit être constatée par un médecin. Sans certificat, on ne peut pas enfermer l’individu. La procédure devient bancale. Le certificat permet aussi d’ouvrir une enquête et de partir sur une bonne base", explique un policier. Selon nos informations, une médecin à Manosque aurait récemment refusé une visite médicale dans le cadre d’une garde à vue, provocant l’ire des enquêteurs.

L’hôpital de Digne-les-Bains et Manosque tient, de son côté, à clarifier la situation: "Il s’agit d’un certificat d’IPM, demandé par le service de Manosque au service de Pertuis qui a décliné. Depuis ce cafouillage, dû essentiellement à un problème lié aux horaires d’ouverture et de fermeture, le protocole a été revu", assure la direction.

Cette dernière poursuit: "Les IPM et gardes à vue sont prioritaires. Depuis la fermeture des urgences la nuit à Manosque, nous avons délivrés de nombreux certificats, même lorsque les horaires étaient dépassés. Il y a toujours un médecin sur place. Si le smuriste est dehors en intervention, nous attendons son retour avec la police afin que le certificat puisse être délivré. Nos relations avec les policiers manosquins sont excellentes, et elles le resteront", assure-t-on du côté de l'hôpital de Digne-les-Bains et Manosque.

Une enquête ouverte à Manosque

Concernant la suspicion de piqûre au festival, une enquête a rapidement été ouverte. Un suspect a été interpellé par les forces de l’ordre et placé en garde à vue. Ce dernier a toutefois contesté les faits et a été relâché.

Pour autant, un dispositif artisanal a été retrouvé par les enquêteurs. Il pourrait s’agir d’une aiguille de couturière, entourée de tissu. Un objet plus facilement transportable et dissimulable qu’une seringue.

"Cet objet a en effet été retrouvé dans la fosse, mais assez loin de la victime présumée", indique Rémy Avon, le procureur de la République de Digne-les-Bains.

Aucun lien n’a donc pu être fait entre ce dispositif artisanal et la vive douleur ressentie par la bénévole. Le procureur va même plus loin ce mardi, et évoque auprès de BFM DICI une personne davantage "victime d’un malaise, hors de la fosse, mais pas de piqûre donc, il s’agissait d’une fake-news".

La principale intéressée, et des témoins de la scène au Festival, ne sont pas si catégoriques que le procureur et réfutent sa version. "Alors que j’étais en pause, je me suis rendue dans la fosse et un individu m’a saisi le bras. J’ai ressenti une vive douleure", témoigne la bénévole. Avant de poursuivre: "Hors de la fosse, j’ai été prise de nausée. J’ai fait comme une crise d’angoisse, j’ai même vomi et ai été prise en charge par la Croix Rouge qui a constaté le bleu et l’hématome. Puis, c’est là qu’ils m’ont parlé d’une possible piqûre. Un policier l’a aussi constaté. Ce sont des professionnels. Moi, je ne peux pas dire si j’ai été piquée ou non".

*La jeune femme souhaite rester anonyme 

Valentin Doyen avec Alixan Lavorel