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Les pistes des sénateurs pour récupérer la manne financière des autoroutes

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Image d'illustration - MATTHIEU ALEXANDRE / AFP

Un rapport sénatorial estime à 7,8 milliards d'euros la perte pour l'Etat liée à la privatisation des autoroutes. Des pistes sont proposées pour un partage plus équitable avec l’État et les usagers à l'avenir.

Les sénateurs s'attaquent au dossier brûlant des concessions autoroutières. Une commission d'enquête de la chambre haute a publié son rapport ce vendredi. L'occasion de donner quelques chiffres et une série de recommandations pour un partage plus équitable avec l’État et les usagers à l'avenir.

Une perte de 7,8 milliards d'euros pour l'Etat

"L’État a procédé à l’ouverture partielle du capital des sociétés d’autoroutes 'historiques' (ASF, Sanef et APRR) entre 2002 et 2005 avant de les privatiser en 2006, note ce rapport sénatorial. Cette cession en plusieurs temps lui a fait perdre 5,3 milliards d’euros de recettes potentielles, auxquelles on peut ajouter l’absence d’offres concurrentes pour ASF dont Vinci détenait déjà 23% du capital qui a conduit à une sous-évaluation du prix de vente estimée à 1,2 milliard d’euros".

Montant du manque à gagner selon les sénateurs: 6,5 milliards d'euros, réévalué à 7,8 milliards d'euros, en prenant en compte une valeur monétaire actualisée à 2020.

Une rentabilité de 8% et 24 milliards d'euros de dividende

La commission d’enquête "sur le contrôle, la régulation et l’évolution des concessions autoroutières" s'est également penchée sur "la situation de ces concessions dont la rentabilité est généralement perçue comme trop favorable", indique une note de synthèse.

"La rentabilité attendue par les sociétés d'autoroutes, c'est 8%, une rentabilité élevée par rapport à toutes les autres sociétés, a commenté Vincent Delahaye, rapporteur de la commission d'enquête du Sénat, à nos confrères de France Info. Vous voyez beaucoup d'investissements qui rapportent 8% par an? C'est quand même assez rare (...) et ces niveaux de rentabilité sur la durée complète du contrat seront atteintes à peu près en 2022". 

Cette rentabilité "a permis aux sociétés d’autoroutes de verser un niveau exceptionnel de dividendes à leurs actionnaires (24 milliards d’euros entre 2006 et 2019)", note le rapport, qui estime par ailleurs à 40 milliards d'euros les dividendes versés au-delà de 2022 et jusqu'à la fin des différentes concessions, entre 2031 et 2036.

Limiter à 15 ans la durée des futures concessions

Dans ce contexte, les sénateurs recommandent notamment "un contrôle plus étroit des marchés des Sociétés concessionnaires d'autoroutes (SCA)", une "amélioration du service aux usagers", "la préparation de la fin des concessions" sans prorogation de leur durée et l'anticipation de la gestion future des autoroutes avec une limitation à 15 ans de la durée des futures concessions.

"Le statu quo n'est pas possible. Il est impératif de mieux partager les profits des sociétés d'autoroutes avec l'État et les usagers, et de rééquilibrer les relations entre le concédant et les concessionnaires", a estimé Vincent Delahaye.

"L'équilibre économique des concessions" doit être défini pour "permettre qu'une partie de la rentabilité finance de nouveaux investissements sur le réseau et une modulation des péages en faveur des trajets du quotidien, du covoiturage et des véhicules propres", juge la commission d'enquête, qui souhaite aussi "accroître les réductions tarifaires pour les véhicules poids-lourds les plus performants écologiquement".

Le modèle économique des concessions autoroutières prévoit le transfert au concessionnaire du "risque lié à la construction et à l'exploitation des infrastructures". Le concessionnaire est rémunéré par les péages sur la durée et doit in fine restituer les infrastructures à l'État. ll se traduit par des pertes initiales élevées et une "juste rémunération des capitaux investis" sur la dernière période de la concession.

Prochaine étape attendue par les sénateurs: organiser "un sommet des autoroutes associant les sociétés d’autoroutes, l’État, l’Autorité de régulation des transports et des représentants du Parlement" afin de définir ce nouveau modèle économique.

J.B. avec AFP