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2 roues

Le contrôle technique des deux roues pourra-t-il vraiment démarrer sereinement le 15 avril?

Dès le 15 avril, le contrôle technique sera obligatoire pour les scooters, motos, quads et voiturettes. Les centres tentent de se préparer à ce défi, mais les motards en colère comptent lancer des opérations pour contester cette mesure.

La date fatidique approche. Le 15 avril, le contrôle technique sera obligatoire pour les deux ou trois roues et quadricycles à moteur à partir de 50 cm3. Cette mesure imposée par une disposition européenne a été mise en place à la hâte en France sous la pression d'associations sur le gouvernement qui pendant longtemps n'en voulait pas.

A un mois de cette obligation, la Fédération française des motards en colère (FFMC) conteste toujours cette mesure qu'elle juge à la fois inutile et difficilement applicable. Elle réfute notamment le principal motif qui vise à réduire les accidents causés par le manque d'entretien des deux roues. Selon eux, ces cas ne représenteraient en France que 0,3% des accidents. Quant à l'entretien, les motards font d'eux mêmes les vérifications de sécurité qu'ils apprennent dès le passage du permis.

3 millions de véhicules concernés

D'autre part, les garages et les centres techniques s'interrogent sur la capacité à accueillir dès le printemps des milliers de vérifications et, en cas de contre-visite, les réparations. Les 6.700 centres techniques qui accueillent les véhicules légers n'ont eu que quelques mois pour investir dans un matériel spécifique et former le personnel.

Le groupe Vivauto qui possède Autovision, l'un des plus importants réseaux de contrôle technique, vient d'annoncer la création de MotoVision qui, dès le 15 avril, disposera de 500 centres de contrôle. Cette enseigne a déjà formé plus de 250 techniciens. 500 autres sont inscrits pour cette formation. Elle estime que 800.000 à un million de véhicules devront être contrôlés chaque année.

Mais d'autres centres, trop petits, ont tout simplement décidé de ne pas proposer ce service faute de moyens, de place ou de personnel.

"Il faudra faire de lourds travaux pour gagner de la place. Au regard du nombre de de véhicules concernés, ce service ne sera jamais rentable", nous a précisé le responsable d'un petit centre en région parisienne.

Selon l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière, ont compte en France moins de 3 millions de motos contre près de 40 millions de véhicules légers.

Disparités régionales

En régions, des motards, scootéristes, conducteurs de quads ou de voiturettes craignent déjà de devoir parcourir des dizaines de kilomètres pour se mettre en règle et attendre des mois pour avoir un rendez-vous. Certains risquent de ne pas pouvoir se plier à cette nouvelle obligation dans les temps et risquer une amende.

A ces difficultés, s'ajoute un point étonnant. De nombreux techniciens ne disposent pas du permis moto et seraient donc en incapacité de déplacer les grosses cylindrées. Les centres veulent donc imposer aux propriétaires de rester sur place durant le contrôle pour les aider à effectuer les manœuvres.

"Ce n'est pas normal", a déclaré à BFM Business un responsable de la FFMC.
"C'est tout à fait légal", répond MotoVision et nous précisant que 80% des contrôleurs qui ont fait la formation sont des motards.

Malgré cette échéance, les motards en colère n'abdiquent pas. La FFMC a lancé une action en justice devant le Conseil d'État pour contester la mise en place du contrôle technique. Ils ont aussi chargé des avocats de scruter le texte jusqu'à la moindre virgule pour détecter une faille juridique.

"Les avocats, c’est magique : ça détecte toujours des irrégularités et ça maîtrise l’art de manier les mots", a expliqué la FFMC au site Moto-Net.

"Balance ton centre"

La FFMC conteste toujours que le but du contrôle technique "vise à mettre les motards en sécurité". De plus, elle estime que pour être en règle au niveau de la pollution sonore, "il suffira de mettre les chicanes sur les pots avant le passage et de les retirer ensuite". Ces chicanes qui sont obligatoires sont les accessoires permettant de réduire le bruit à l'échappement.

"En réalité, de nombreux motards se moquent de savoir si le contrôle est efficace ou non car beaucoup n'iront pas", nous indique la FFMC.

Sur son site, elle donne même des conseils pour éviter une amende lors d'un contrôle de police.

"1 - Avoir une moto irréprochable sur le plan de la sécurité (pneus, freins, direction, équipements…)

2 - Être poli et expliquer que vous n’avez pas eu le temps, que le rendez-vous a été annulé, qu'il y avait pas de place avant 3 mois, que vous avez pris rendez-vous pour la semaine prochaine, etc... et surtout , dans le cas où le flic est intraitable (probablement pas trop, du moins au début) être prêt à payer 90€ pour la cause ! (voir la page Boycott et sanctions)."

En parallèle, la fédération a lancé un appel pour mobiliser leurs adhérents. Des manifestations de motards sont prévues partout en France les 13 et 14 avril. Elle a aussi créer une initiative inédite. Intitulé "Balance ton centre", une carte interactive propose aux motards qui possèdent une voiture de ne pas la faire contrôler dans les centres qui proposeront de contrôler les motos. Sur un site dédié, une carte situe les "bons" centres d'un point vert, et les "mauvais" d'un point rouge.

Les motards seront-ils nombreux à suivre ce boycott? Réponse lors des manifestations des 13 et 14 avril, même si elles ne changeront rien à la mise en place du contrôle technique.

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco