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Aide ciblée aux automobilistes: à quoi va ressembler le dispositif?

Un automobiliste se sert en essence à une station-service, le 17 juillet 2022 à Toulouse

Un automobiliste se sert en essence à une station-service, le 17 juillet 2022 à Toulouse - Valentine CHAPUIS © 2019 AFP

Face à la hausse du prix du carburant, le gouvernement ne compte pas prolonger la ristourne à la pompe au-delà de 2022. En revanche, il prévoit de la remplacer par une aide ciblée, maintes fois envisagée par le passé, sans qu'elle n'ait jamais été mise en place.

Exit la ristourne à la pompe qui profite à tous, place à une mesure "ciblée". Plusieurs fois évoquée par le passé, l'idée d'un soutien dédié aux "gros rouleurs", est loin d'avoir été enterrée par le gouvernement. Au point que le ministre de l'Économie l'a remise sur la table, ce jeudi.

Invité sur RTL, Bruno Le Maire a annoncé que la ristourne à la pompe ne sera pas prolongée en 2023. Augmentée à 30 centimes en septembre et en octobre, elle passera donc à 10 centimes le 1er novembre, avant de disparaître le 31 décembre 2022. Mais le gouvernement n'entend pas laisser les automobilistes sans solution face à une éventuelle poursuite de la hausse du prix des carburants. Pour y faire face, il a annoncé la mise en place d'un autre dispositif de soutien.

"Si jamais les prix augmentent (...) je n'exclus pas un soutien pour les automobilistes, tous ceux qui n'ont pas d'autre choix que de prendre leur voiture pour aller travailler", a-t-il affirmé, avant de préciser: "ce sera un soutien ciblé". 

"Ce dispositif de secours existe et est financé. Nous avons prévu une enveloppe de 1,7 milliard d’euros dans le projet de budget 2023", a-t-il précisé un peu plus tard dans la journée.

Qui va la toucher?

Conctacté par BFMTV, le ministère de l'Économie a donné quelques précisions sur cette nouvelle aide ciblée. "Elle sera destinée aux salariés, aux apprentis, aux agents publics et aux indépendants obligés de prendre leur véhicule pour aller travailler", nous a informé Bercy. Le montant de l'indemnité sera ensuite modulé en fonction du niveau de revenus et de la composition du ménage.

Enfin, "elle comportera un "bonus" pour les personnes qui habitent à plus de 30 kilomètres de leur lieu de travail ou parcourent plus de 12.000 kilomètres par an dans le cadre professionnel", ajoute le ministère.

Mais ce n'est pas la première fois que l'exécutif envisage un tel dispositif. Et c'est la Première ministre, elle-même, qui l'avait promis il y a quelques mois.

"Pour ceux qui font beaucoup de kilomètres par jour, soit pour se rendre à leur travail, soit dans le cadre de leur travail", un dispositif "se mettra en place (...) à la rentrée pour (les) accompagner", avait assuré Elisabeth Borne, le 7 juin.

Un dispositif déjà sur la table par le passé

Début juillet, les contours d'une aide délivrée sur critères de revenus, plus faciles à tracer, se dessinaient doucement. Mais elle prenait davantage la forme d'un chèque carburant -sur le modèle du chèque énergie-, déjà envisagé à l'automne 2021.

L'option d'un dispositif réservé aux automobilistes percevant entre 1500 et 1800 euros nets par mois, était alors sur la table. Pour conserver l'esprit du dispositif "gros rouleur", le gouvernement envisageait de cibler seulement les actifs, à savoir les personnes qui travaillent, les chômeurs et les alternants. En revanche, les retraités et les étudiants étaient exclus du projet. Un bonus "gros rouleur" était imaginé en complément pour les automobilistes parcourant plus de 12.000 kilomètres par an.

Des grandes lignes que devrait finalement reprendre le gouvernement, à quelques détails près. Comme celle imaginée cet été, cette aide devrait donc concerner les personnes actives et être délivrée selon des critères de revenus. En revanche, les demandeurs d'emploi ne semblent pas pour le moment faire partie des bénéficiaires cités par Bercy.

Un complément sera aussi perçu par les "gros rouleurs", comme le prévoyait le dispositif de juillet. Mais, pour percevoir ce "bonus", au critère du nombre de kilomètres parcourus chaque année (plus 12.000 kilomètres) s'ajoutera celui de la distance séparant le domicile de l'automobiliste de son travail (plus de 30 kilomètres). Les plafonds de revenus envisagés pour l'attribution de cette aide, n'ont pas encore été précisés.

Une mise en oeuvre complexe

Initialement, cette nouvelle prestation devait succéder, dès la rentrée, à la ristourne à la pompe de 18 centimes mise en place le 1er avril dernier. Mais à l'idée théorique se heurtait une mise en oeuvre trop complexe.

Car pour qu'une telle aide soit délivrée de façon juste, les bénéficiaires doivent répondre à tout un tas de critères difficilement traçables. Au-delà du niveau de revenus perçus, faciles à déterminer, le ministère doit être en mesure de vérifier le fait que le futur bénéficiaire est bien propriétaire d'un véhicule, que la distance à parcourir entre son domicile et son travail est suffisante mais aussi qu'il ne dispose pas d'une offre de transport alternative. Non seulement ces informations sont difficiles à recouper mais elles prennent surtout du temps à être vérifiées.

C'est d'ailleurs ce qui avait poussé l'exécutif à renoncer une première fois à ce type d'aide en octobre 2021.

Quelques mois plus tard, en mai, le Medef s'était positionné en faveur d'un chèque carburant réservé aux salariés qui prennent leur voiture pour aller travailler. La proposition du syndicat était que l'employeur verse directement une aide défiscalisée et désocialisée, sur le modèle de la prime Macron.

Mais c'est bien une indemnité versée par les services de Bercy à une assiette plus large que les salariés, qui est aujourd'hui privilégiée par l'exécutif pour 2023.

Pour simplifier l'attribution de cette aide, le gouvernement avait aussi envisagé, au début de l'été, qu'elle se fasse sur simple déclaration avec un contrôle a posteriori, en croisant les déclarations de revenus, les fichiers des assurances et les relevés de contrôles techniques pour estimer les distances parcourues. Une méthode qui pourrait être retenue pour la mise en place de cette aide ciblée même si elle laisse craindre certaines complexités comme des trop-perçus.

Au-delà de la définition des critères d'éligibilité, c'est donc sur les modalités de leur vérification que le gouvernement devra plancher.

Nina Le Clerre