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"Woody a tout d'un animal de compagnie": Véronique a obtenu la garde du sanglier qu'elle a élevé

Véronique Consolo et Woody, sur son terrain à gauche, et en train de boire un biberon à droite.

Véronique Consolo et Woody, sur son terrain à gauche, et en train de boire un biberon à droite. - BFMTV

À l'automne 2021, une habitante d'un village du Lot-et-Garonne a recueilli chez elle et domestiqué un bébé sanglier du nom de Woody. Mais l'animal a, un temps, été saisi par les services préfectoraux.

Quand Véronique Consolo l'a recueilli, en septembre dernier, "il était si petit qu'il passait entre les mailles" de son grillage. Woody n'était qu'un marcassin quand cette ambulancière de nuit l'a découvert tout apeuré dans son jardin de Lédat, un village situé près de Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne). L'animal tentait d'échapper à une meute de chiens, et à des chasseurs.

"J'avais beau essayer de le remettre dans la nature, il revenait systématiquement sur mon terrain. Il se réfugiait auprès de la truie que j'ai dans mon jardin", raconte Véronique Consolo à BFMTV.com.

Elle se souvient d'un animal "tout maigre et déshydraté qui venait téter la truie qui venait de mettre bas" dans un abri qui se trouve sur son terrain.

Woody "n'a pas les codes" pour survivre dans la nature

Lorsque Véronique Consolo prend le petit sanglier sous son aile, elle le baptiste Woody et effectue une demande auprès de la Direction départementale de la protection des populations (DDSCCP) du Lot-et-Garonne, qui s'occupe de la protection des animaux et de l'environnement (DDSCCP) afin de le déclarer officiellement en préfecture et de le garder en tant qu'animal de compagnie.

"Je me suis vue notifier un refus par courrier en octobre", raconte la quinquagénaire, déçue et perplexe. "On me demandait de le relâcher dans la nature".

Or pour Véronique Consolo, c'est tout bonnement impossible. À l'époque, Woody "a à peine un mois et ne mange encore rien de solide. Je le nourrissais encore au biberon, avec du lait spécial porcelet". Celle qui l'a recueilli l'assure: Woody ne serait pas en mesure de survivre seul dans la nature. "Il n'a pas les codes: il est très domestiqué et il n'a connu que ça. Il est déjà trop imprégné de l'humain et ne serait pas capable de se débrouiller", défend-t-elle encore.

"Certes, j'essaie de faire en sorte qu'il vive comme un sanglier", explique cette amoureuse des animaux. "Dans mon jardin, il a une mare boueuse, je le laisse retourner mon terrain avec son groin..."

"Mais il n'empêche qu'il est vulnérable pour un sanglier: son repère, c'était moi. Il ne me quittait pas. Il rentrait dans la maison, allait sur le canapé, il évoluait aux côtés de mes chiens et de mes chats".
Woody et l'un des chiens de Véronique Consolo, et Woody dans sa mare.
Woody et l'un des chiens de Véronique Consolo, et Woody dans sa mare. © BFMTV

Détenir un animal sauvage, possible dans certains cas?

Mais, il y a plusieurs semaines, les services de l'Office français de la biodiversité (OFB) viennent saisir l'animal de 25 kg. L'OFB, contacté par BFMTV.com, assurait mardi ne faire qu'appliquer strictement la règlementation en la matière. En effet selon la loi, la détention d'espèces protégées, menacées, dangereuses, fragiles en captivité ou pouvant porter atteintes à l'environnement, sans être titulaire des autorisations requises, peut être puni d'une peine de six mois d'emprisonnement et 9000 euros d'amende.

Toutefois pour certaines espèces, la loi prévoit la possibilité "d'accueillir un animal pour le sauver et c’est strictement encadré", assure l'avocat de Véronique Consolo, Me Louis de Redon.

L'ambulancière a déjà reçu le soutien de plusieurs associations de défense de la cause animale, telle que VIDA, qui ont lancé une pétition ainsi qu'une cagnotte afin de payer ses frais d'avocat. Olivier Damaisin, député LaREM de la 3e circonscription du Lot-et-Garonne, et Hélène Thouy, candidate du parti animaliste à l'élection présidentielle de 2022, lui ont également fait part de leur soutien.

"Domestiqué, il reviendra toujours vers l'homme"

Remettre en pleine nature un animal qui a presque toujours évolué dans un environnement domestique "me paraît être une absurdité", commente Pascal Tavernier, directeur du refuge pour animaux sauvages L'Hirondelle, interrogé par BFMTV.com. Le centre de soins recueille chaque année plus de 6000 oiseaux et mammifères sauvages en détresse dans le Rhône, la Loire, la Drôme et l’Ardèche pour les soigner puis les relâcher dans la nature.

"Au mieux, on peut se dire que ce sanglier parviendrait peut-être à se nourrir tout seul si on le relâchait. Mais ce qui est certain, c'est qu'il ne saura pas comment se comporter par rapport à ses congénaires. L'animal qui a été élevé et apprivoisé de A à Z par la main de l'homme reviendra toujours, automatiquement, vers lui", explique le spécialiste des animaux sauvages, pour qui "il n'y a pas 50 solutions".

"Je préférerais ne pas avoir à cautionner ce genre de cas, mais ce sanglier a tout d'un animal de compagnie: donc soit cet animal doit être placé dans un parc animalier, soit chez celle qui l'a domestiqué jusqu'ici, si les conditions de détention sont réunies".

Véronique Consolo, elle, est consciente des critères à respecter pour pouvoir accueillir un animal chez soi. Elle affirme qu'elle souhaite juste sauver la vie de cet animal. "J'ai un terrain de 2000m², une clôture électrifiée de 2m de haut, quatre abris, des arbres fruitiers".

Rebondissement ce jeudi, puisque la préfecture du Lot-et-Garonne a finalement annoncé, dans un communiqué, "régulariser" la situation administrative de Woody, "considérant qu’il s’agissait de la moins mauvaise solution".

De fait, l'OFB a désormais pour obligation légale de restituer l'animal à sa propriétaire. Vendredi, Véronique Consolo attendait toujours d'être contactée par l'administration pour savoir quand le sanglier lui serait rendu. Elle indique à BFMTV.com qu'en l'absence de nouvelles, elle et son avocat maintiendraient le référé déjà déposé: une audience est prévue ce lundi au tribunal administratif de Bordeaux.

Jeanne Bulant Journaliste BFMTV