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Société

Besançon: un boulanger en grève de la faim contre l'expulsion de son apprenti guinéen

Stéphane Ravacley, le patron de la Huche à Pain à Besançon

Stéphane Ravacley, le patron de la Huche à Pain à Besançon - RMC

Stéphane Ravacley, un boulanger du centre-ville de Besançon, ne s'alimente plus depuis dimanche à minuit pour protester contre l'expulsion de son apprenti guinéen.

Un boulanger de Besançon a entamé dimanche une grève de la faim pour garder son apprenti guinéen, jeune majeur visé par une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et menacé d'expulsion.

La maire EELV de Besançon, Anne Vignot, a écrit mardi au ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, pour lui demander de s'"opposer à cette expulsion et de régulariser la situation de Laye Fodé Traoré".

"Notre pays a recueilli cet adolescent. Il l'a formé. Laye Fodé Traoré s'est intégré (...). Cette volonté d'expulser ce futur boulanger est incompréhensible", estime-t-elle, appelant le ministre à "ouvrir les yeux sur la réalité à laquelle sont confrontés ces jeunes migrants".

"Il y a une place pour lui dans mon fournil"

Le patron de la Huche à Pain, où travaillait le jeune guinéen au centre-ville de Besançon, ne s'alimente plus depuis dimanche à minuit.

"J'ai 50 ans, j'ai fait trois embolies pulmonaires en trois ans, mon médecin me dit que je suis fragile, mais je m'en fous, je sais que j'ai raison", a expliqué mardi Stéphane Ravacley, déterminé à tout faire pour que son apprenti, Laye Fodé Traore, continue à travailler avec lui.

En septembre 2019, Stéphane Ravacley a pris en contrat d'apprentissage de deux ans "un bon gamin", parti de Guinée et arrivé en France comme mineur isolé après être passé par le Mali, la Libye et avoir traversé la Méditerranée pour rejoindre l'Italie, avant de rallier la France, a-t-il raconté.

"Discret", mais avide d'apprendre le métier, Laye s'est immédiatement montré volontaire et travailleur, poursuit l'artisan qui oeuvre six jours sur sept de 03H00 du matin à 20H00, avec une pause en milieu de journée.

"Il y a une place pour lui dans mon fournil", insiste le boulanger qui prévoyait de le prendre comme ouvrier au terme de sa formation.

Mais en novembre, la tutrice du foyer de Gray-la-Ville (Haute-Saône), qui suit le jeune homme lui a annoncé que son apprenti, devenu majeur, faisait désormais l'objet d'une OQTF et devrait cesser de travailler auprès de lui

"A 18 ans, plus rien"

Le jeune Guinéen a saisi le tribunal administratif de Besançon sur le fond pour contester l'OQTF et le refus d'octroi de titre de séjour de la préfecture de la Haute-Saône. Son recours sera examiné le 26 janvier. Il avait été débouté d'un premier recours en référé en décembre.

"On perd 70% des jeunes après le CAP parce qu'ils n'ont plus envie ou parce que les patrons ne s'occupent pas bien d'eux", déplore le boulanger bisontin, qui peine comme beaucoup d'artisans à trouver des apprentis. "Alors pourquoi on n'accepte pas ces gamins qui meurent de faim dans leur pays et veulent travailler chez nous ? Ils ne prennent pas la place des Français".

Stéphane Ravacley dénonce "la politique à court terme" du gouvernement : "ces gamins, on les accueille, les habille, les nourrit, on les forme jusqu'à leur majorité et à 18 ans, plus rien. Ils se retrouvent à la rue, aux mains des passeurs". Il entend ainsi soutenir "cette nouvelle génération de migrants qui arrive et peuple les boulangerie et les restaurants".

Le boulanger a lancé une pétition sur internet. Cette dernière a recueilli près de 100.000 signatures et plus de 100.000 "j'aime" sur Instagram depuis que l'eurodéputé Raphaël Glucksmann (Place Publique) l'a relayée.

C.Bo. avec AFP