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Santé

"On a encore beaucoup de choses à faire": le directeur général de l'AP-HP réagit au #Metoo hôpital

Sur Franceinfo ce mardi, le directeur général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), Nicolas Revel, a déclaré qu'il existe encore aujourd'hui, au sein des hôpitaux, "des actes, des comportements, des propos qui ne sont pas acceptables".

Le #Metoo hôpital va-t-il changer la donne pour le personnel soignant? Dans une enquête de Paris Match publiée le 10 avril Karine Lacombe, cheffe de service hospitalier des maladies infectieuses à l'hôpital Saint-Antoine, à Paris, a accusé le médiatique urgentiste Patrick Pelloux de "harcèlement sexuel et moral". L'urgentiste réfute ces accusations. Depuis, les prises de paroles sur les violences sexistes et sexuelles dans le milieu hospitalier se multiplient.

Sur Franceinfo ce mardi 23 avril, le directeur de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), Nicolas Revel, a affirmé que ce qu'il "retient de cette affaire", est que "la parole doit se libérer".

"Elle a déjà commencé à se libérer et on est en train, je pense, progressivement, de passer un cap et de changer le monde. C'est fondamental", a-t-il déclaré.

Quatre personnes suspendues en 2023

Aujourd'hui, l'AP-HP a une "politique de tolérance zéro" sur le harcèlement sexuel et moral au sein de ses hôpitaux, a assuré Nicolas Revel. "Quatre médecins, professeurs de médecines" on été "suspendus pour des faits de harcèlement, soit sexuel, soit moral" en 2023 au sein de l'AP-HP, a-t-il rapporté.

En 2021, l'AP-HP a mis en place une cellule de recueil des signalements de violences verbales, physiques, sexuelles et des discriminations. Depuis, 279 signalements ont été décomptés, "dont 5 % concernent des situations à caractère sexuel et sexiste - la majorité recouvrant des situations de conflits et de faits de harcèlement moral", relatait l'AP-HP dans un communiqué la semaine dernière.

Des violences sous-déclarées

Des chiffres bien en dessous de ceux rapportés par d'autres organisations du secteur. Une enquête de l'Association nationale des étudiants en médecine (Anemf), réalisée en 2021, montrait ainsi l'omniprésence de ces violences: 38,4% des étudiantes en médecine disaient avoir subi du harcèlement sexuel pendant leurs stages hospitaliers, 49,7% des "remarques sexistes", et 5,2% des "gestes déplacés", entre mains aux fesses, attouchements et autres "gestes sexuels".

La Fnesi, le principal syndicat des étudiantes infirmières, avait aussi mené une enquête en 2022. Une aspirante infirmière sur six déclarait avoir été victime d'agression sexuelle au cours de sa formation, essentiellement à l'hôpital. Les victimes décrivaient des "mains sur la cuisse" ou "sur les hanches", des "massages" ou "baisers" non désirés de collègues et maîtres de stage. 

"Il y a beaucoup de choses qu'on n'ose pas déclarer et signaler. C'est cette bataille-là qu'il faut faire", a estimé Nicolas Revel sur Franceinfo ce mardi, tout en jugeant que ces violences ne sont "pas systémiques à l'AP-HP".

"On a encore beaucoup de choses à faire"

"Aujourd'hui, on a fait du chemin mais on a encore beaucoup de choses à faire. Je pense qu'il y a encore aujourd'hui, en effet, des actes, des comportements, des propos qui ne sont pas acceptables. Qui ne sont pas systémiques au sens où ils ne sont pas majoritaires, mais ils sont suffisament nombreux pour qu'on doive s'en préoccuper", a poursuivi le directeur de l'AP-HP.

Tous les soirs dans Le titre à la une, découvrez ce qui se cache derrière les gros titres. Céline Kallmann vous raconte une histoire, un récit de vie, avec aussi le témoignage intime de celles et ceux qui font l'actualité.
Propos sexistes, gestes déplacés, harcèlement: la vague #MeToo déferle sur l’hôpital
20:51

La médecine souffre "d'une culture carabine" qui "banalise le sexe pendant les études" et "expose à un humour sexiste", a analysé mi-avril Florie Sullerot, présidente de l'Intersyndicale nationale des internes de médecine générale (ISNAR- IMG), auprès de l'AFP.

Dans certains internats, les étudiants mangent devant des fresques obscènes, pouvant représenter "jusqu'à des scènes de viol", décrivait-elle. S'ajoute une "forte hiérarchie", qui place généralement le pouvoir entre les mains des hommes. L'ensemble crée "un climat favorable" aux violences, même si la féminisation de la profession "libère" progressivement la parole.

Le ministre de la Santé, Frédéric Valletoux, a promis de réunir "bientôt" associations, employeurs et professionnels pour "travailler sur une réponse globale et ferme" au sexisme et aux violences sexuelles à l'hôpital.

3919: le numéro de téléphone pour les femmes victimes de violences.

Le "3919", "Violence Femmes Info", est le numéro national de référence pour les femmes victimes de violences (conjugales, sexuelles, psychologiques, mariages forcés, mutilations sexuelles, harcèlement...).

C'est gratuit et anonyme. Il propose une écoute, informe et oriente vers des dispositifs d'accompagnement et de prise en charge. Ce numéro est géré par la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF).

Sophie Cazaux