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Parti socialiste

Défait à la présidentielle, divisé sur les législatives... Le PS est-il proche de la mort?

En proie aux divisions internes, tandis que sa direction essaie de négocier un accord avec LFI, le Parti socialiste peine à exister.

"En reddition", "menacé d'extinction", plongé dans un "coma artificiel"... Les mots pour décrire l'état du Parti socialiste au lendemain de la présidentielle et à l'aune d'un possible accord avec La France insoumise pour les législatives ne fleurent pas bon la vie.

Arrivé avant-avant dernier au premier tour avec 1,75% des voix pour Anne Hidalgo - du jamais-vu à une élection présidentielle - le parti historique dont certains annonçaient déjà la disparition en 2014, alors qu'il était pourtant au pouvoir, pourrait-il vivre ses derniers mois?

C'est en tout cas le funeste avenir que lui prédisent certains éléphants s'il se range derrière les insoumis pour faire triompher un programme commun à gauche aux législatives. Des ténors du parti tel que François Hollande et Stéphane Le Foll se sont fait la semaine dernière les chroniqueurs d'une mort annoncée.

"Je pense que cet accord ne sera pas accepté. S'il l'est, c'est que le PS aura décidé de disparaître", avertissait l'ancien chef de l'État jeudi dernier sur franceinfo. "Se ranger derrière Mélenchon, c'est l'effacement final", déplorait pour sa part le maire du Mans au micro de Public Sénat.

Une "reddition" sur le plan idéologique?

Une analyse que partage ce matin notre éditorialiste politique, Matthieu Croissandeau. "S’il y a accord, oui le parti que nous avons connu, tel que vous et moi nous l’avons connu, celui qui a gouverné la France depuis François Mitterrand, oui il sera mort", a-t-il commenté sur notre antenne.

Sur le plan idéologique, si le parti à la rose au poing rejoint la fraîchement nommée Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) formée entre insoumis et écologistes, "il pourrait ne pas se relever d’un tel traitement de choc car les bases programmatiques sont bien celles d’une reddition", prévient Matthieu Croissandeau sur BFMTV.

La retraite à 60 ans - au lieu du maintien à 62 ans prôné par le PS-, l’abrogation de mesures "dites régressives" de la loi El Khomri votée sous le quinquennat Hollande, le concept de désobéissance à certaines mesures économiques et budgétaires de l’UE... C'est "l'état de mort cérébrale pour les socio-démocrates", résume notre éditorialiste.

Face au grand parti centriste d'Emmanuel Macron et face à l'extrême-droite, ce serait non seulement l'effacement des idées du socialisme, mais également "l'effacement de son électorat", prévient Stéphane Le Foll.

De premiers départs

Plusieurs militants ont d'ores et déjà faire part de leurs craintes et de leur envie de quitter la formation politique. Certains ont déjà sauté le pas, à l'image de deux membres du PS, Laurent Azoulai et Boris Venon, qui ont démissionné après que Conseil national a voté en faveur des discussions. Des cœurs à prendre que d'autres partis n'hésitent pas à draguer ouvertement, comme l'a récemment fait le Printemps républicain.

Pour sortir de l'impasse, Stéphane Le Foll propose d'entamer "un nouveau cycle" au sein du parti, "de changer la manière dont on aborde les sujets" et de "rebâtir un programme".

Pour le maire d'Angoulême, Xavier Bonnefont, le Parti socialiste doit "renaître de ses cendres" autour de la sociale démocratie, troisième voie autour de laquelle la gauche "doit se rassembler". Jean-Christophe Cambadelis appelle lui à une "refonte du parti" et à se "coordonner" pour "résister".

La survie via une stratégie locale?

L'existence du parti va quoi qu'il en soit dépendre du nombre de Français prêts à voter pour lui aux législatives. Et pour survivre, les partisans de l'autonomie misent sur une stratégie locale. Aux dernières municipales et régionales, le parti à la rose a prouvé qu'il savait convaincre localement: 15 villes de plus de 100.000 habitants et cinq régions sont actuellement dirigées par des élus PS.

"Nous avons cette chance d’avoir un réseau d’élus locaux. Il faut que ces élus s’investissent dans leur parti et deviennent les responsables, avec l’aide que les plus expérimentés pourront leur apporter", plaidait dans cette direction François Hollande la semaine dernière sur franceinfo.

En Occitanie, la présidente du Conseil régional, Carole Delga, organise dès à présent la lutte existentielle. Contre les "tambouilles politiques", l'élue défend une "gauche de terrain" et a déjà présenté trois candidats sous la bannière PS. Sans attendre les résultats de l'accord avec LFI.

En obtenant au moins 15 élus, loin des 250 des débuts du quinquennat Hollande, les socialistes pourraient malgré tout maintenir un groupe à l'Assemblée et continuer d'avoir une influence - même réduite - au Palais-Bourbon.

"Avec un groupe autonome et à la clé, des financements autonomes" le PS pourrait "demeurer une force politique autonome", constatait hier dans les colonnes du Parisien le maître de conférences à l’université Paris 2 Panthéon-Assas, Benjamin Morel.

Menacé d'étouffement au niveau national

Cette stratégie locale pourrait toutefois se heurter à la visée nationale que Jean-Luc Mélenchon tente de donner au scrutin - l'ex-candidat à la présidentielle a appelé les Français à "l'élire Premier ministre" au "troisième tour".

Si les électeurs de gauche le suivent, ce serait alors "très délicat pour le PS", analyse Benjamin Morel, avant d'ajouter: "sa seule chance de survie serait alors d'entrer en alliance avec LFI". Avec le risque idéologique que cela induit pour le PS de se ranger sous le pavillon de L'Union populaire.

Quoi qu'il arrive, une petite mort aux législatives ne signerait pas pour autant la fin définitive, selon le maître de conférences, pour qui la renaissance pourrait avoir lieu dans cinq ans. Une fois LaREM orpheline de son fondateur après deux quinquennats d'Emmanuel Macron.

"Si LaREM ne structure pas cet espace politique que demeure la social-démocratie, alors il y a une possibilité que cet électorat retourne au bercail, c’est-à-dire au PS", estime Benjamin Morel.

"Comme les LR à droite, le PS peut espérer jouer les vautours d’une LaREM dont il escompterait les jours comptés, et lorsque l’espace central se libérera, reprendre ce qu’il estime s’être fait voler", prédit le spécialiste auprès du Parisien. Un scénario optimiste.

Hortense de Montalivet