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Rénovation de logements: pourquoi le nombre d'artisans labellisés RGE baisse

Pour bénéficier des aides comme MaprimeRénov', les particuliers doivent nécessairement passé par un artisan RGE. Mais ceux-ci se font rares.

Manque de moyens et manque de bras. Il y a de moins en moins d'artisans pour assurer la rénovation des logements. Selon une étude que révèle BFM Business, le nombre d'entreprises du bâtiment labellisées RGE (reconnu garant de l'environnement) a reculé de 16% sur un an. Une situation d'autant plus problématique que pour bénéficier des aides comme MaprimeRénov', les particuliers doivent nécessairement passé par un artisan RGE.

En ce mois de mars 2024, Heero, plateforme dédiée à la rénovation énergétique, ne recense plus que 55.000 entreprises labellisées RGE sur tout le territoire. C'est plus de 10.000 de moins qu'il y a un an (65.500 en mars 2023) et environ 16.500 de moins par rapport à 2021 (71.477).

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Dans le détail, 100% des départements voient leur nombre d'entreprises RGE reculer. Une région est particulièrement touchée, c'est l'Ile-de-France: 8 des 10 départements où la main d'œuvre labellisée recule le plus se trouvent dans la région. La baisse annuelle oscille autour de 25% en Seine-Saint-Denis (-25,5%), dans les Hauts-de-Seine (-24,6%) et à Paris (-23,7%). Selon Heero, en Ile-de-France, ce sont les Jeux olympiques qui expliquent notamment l'ampleur de cette baisse. Vu le nombre de chantiers liés aux JO, les artisans du bâtiment n'ont pas forcément eu besoin du label RGE pour maintenir leur activité.

Au-delà de l'Ile-de-France, il y a aussi ce qu'on pourrait presque appeler des zones blanches pour l'artisanat du bâtiment. C'est le cas de la Lozère (144 artisans RGE), la Creuse (165) et les Alpes-de-Haute-Provence (171). Chacun de ces départements compte moins de 200 entreprises labellisées RGE. Soit 7 fois moins que les départements les plus riches en main d'œuvre labellisée que sont l'Isère (1.343), le Rhône (1.500) et le Nord (1.597).

Le jeu n'en vaudrait pas la chandelle

Pourquoi y a-t-il de moins en moins de ces entreprises RGE? On pourrait croire que c'est aussi une opportunité business pour les artisans. Mais selon Heero, de nombreux artisans considèrent que le jeu n'en vaudrait pas la chandelle. Car obtenir un label RGE n'est pas si simple. Il faut une formation de 3 jours à renouveler tous les 4 ans. Cela implique des contrôles réguliers, une mise à jour annuelle de documents administratifs et il y a les coûts. Comptez environ 1.000 euros par qualification, à renouveler donc tous les 4 ans. Et il faut préciser le terme "par qualification" car si vous faites de la plomberie et de la menuiserie par exemple, il vous faudra deux labels distincts. Même chose pour les entreprises d'isolation: comptez un label pour l'isolation des murs, un autre pour celle des combles.

Une complexité et un coût qui rapportent finalement assez peu aux entreprises et aux ménages. Selon Heero, les artisans RGE pratiquent des tarifs environs 15% plus élevés que les autres, sauf qu'en parallèle les aides publiques ne réduisent en moyenne que de 16% le montant total des travaux pour les propriétaires. En clair c'est quasiment un jeu à somme nul pour les ménages et plus de contraintes pour les artisans.

Selon la Fédération française du bâtiment, il y a aussi les fluctuations réglementaires qui dissuadent les entreprises du secteur, avec, du jour au lendemain, des gestes qui ne sont plus subventionnés. La FFB relativise néanmoins le faible nombre d'entreprises labellisées RGE: "C'est le nombre de salariés rattachés à ces sociétés qu'il faut regarder et à date il y a de quoi faire", nous assure un cadre de la fédération qui doute en revanche que cela dure compte tenu du coup d'arrêt de la demande de travaux.

Marie Coeurderoy