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Canicule: ces technologies pour maintenir les immeubles au frais... sans climatisation

Comment mieux lutter contre les vagues de chaleur dans les grandes villes? De plus en plus d’urbanistes et d’architectes réfléchissent à la façon dont les bâtiments du futur pourraient mieux résister aux canicules sans climatisation.

Mieux faire face aux canicules sans climatisation, coûteuse et pas franchement écologique, cela nécessite de repenser la façon dont on bâtit les villes. Plusieurs options sont à l'étude ou en cours de développement. Il y a ce qu’on appelle les immeubles "22-26". "22-26", parce que leur température intérieure est toujours comprise entre 22 et 26 degrés, qu’il fasse très chaud ou très froid à l’extérieur, sans chauffage ni climatisation ni ventilateurs. Les premiers bâtiments de ce genre ont vu le jour en Suisse et en Autriche, tandis que le premier bâtiment "22-26" français est en cours de construction à Lyon, dans le quartier Confluence.

En soi, c’est très low tech. En fait ce sont les matériaux et la manière de construire qui produisent cet effet. Des murs de briques de terre cuite très épais: 80 centimètres, là où normalement vous avez 20 cm de ciment et 20 cm d’isolation. Il n'y a pas d’isolation mais l’épaisseur des briques permet l’hiver de retenir le froid, qui va mettre des semaines à entrer dans le bâtiment. Et l’été de rester au frais, d’autant que ces bâtiments sont d’un blanc éclatant, qui repousse les rayons du soleil.

L’hiver, on va aussi récupérer et exploiter la chaleur de plein de petites choses: les grandes baies vitrées, qui laissent passer le soleil, les lampes, ordinateurs, moteurs de frigos (ce qui fonctionne surtout pour les immeubles de bureau). Et puis on peut évidemment combiner ça -et ce sera le cas à Lyon- avec des panneaux photovoltaïques sur les toits pour produire de l’électricité, de la végétation pour faire baisser la température l’été en générant ce qu’on appelle de l’évapostranspiration (en gros les plantes transpirent de l’eau et cela contribue à réduire la température de l’air ambiant). Et puis de l’intelligence embarquée pour ouvrir automatiquement les fenêtres ou les volets pour profiter de la lumière du jour en hiver ou garder de l’ombre l’été. Résultat: pas de climatisation, pas de chauffage, pas de tuyaux dans tous les sens, moins de frais d’entretien. Cela coûte même 10% moins cher à construire qu’un immeuble classique.

Des façades qui changent en fonction de la météo

Parmi les autres solutions qui se développent, il y des immeubles dont la façade va évoluer en fonction de la météo. Par exemple pour générer de l’ombre quand il y en a besoin. C'est ce qu’on appelle des façades adaptatives: des bâtiments dont la structure et l’apparence vont changer en temps réel, au cours de la journée, en fonction notamment de leur exposition au soleil, pour maximiser l’ombrage du bâtiment quand il fait chaud, ou la capacité à emmagasiner chaleur et lumière quand il fait froid.

C'est par exemple le cas des tours Al Bahar à Abu Dhabi, construites il y a 10 ans, et qui ont la particularité d’avoir une sorte de double peau. La façade extérieure du bâtiment ressemble un peu à une peau d’ananas, qui va tourner en fonction du soleil, pour que la partie la plus exposée à la lumière et à la chaleur soit toujours à l’ombre et que l’autre profite de la luminosité. C’est plutôt un champ d’expérimentation pour l’instant, parce qu’évidemment, même si c’est très esthétique, ça coûte très cher à construire. Mais les gains en termes de consommation électrique liés à la climatisation sont très intéressants, surtout quand on est au milieu du désert.

Peintures réfléchissantes

Autre piste: des chercheurs travaillent sur de nouveaux matériaux et de nouveaux revêtements capables de rafraîchir les bâtiments. Depuis quelques années, il y a ainsi un essor du "cool roofing", ces peintures blanches qui font baisser la température en cas de grande chaleur, ce qui permet de faire baisser la facture, en évitant d’utiliser trop les systèmes de climatisation. La start-up toulousaine SolarPaint ou la nantaise Enercool par exemple. Avec une peinture de toit, ils font baisser la température intérieure de 6 degrés en cas de forte chaleur, ce qui diminue de 40% les coûts liés à la climatisation. Juste grâce à la peinture.

Il s'agit de peinture dite réflective, conçue avec des pigments spéciaux qui réfléchissent les rayons du soleil y compris infrarouges, à hauteur de plus de 80%. Une technologie utilisée à la base par la Nasa pour ses propulseurs, pour les protéger des rayons solaires. C'est une solution très populaire, y compris auprès des administrations. La métropole de Nantes par exemple a commencé à l’adopter. Mais cela arrive aussi sur des immeubles d’habitation en région parisienne. Pour acheter la fameuse peinture, comptez 20 euros du mètre carré. Ce qui est beaucoup moins cher qu’une isolation thermique classique.

Par Anthony Morel, édité par JLD