BFM Immo
Location

Soignants, enseignants, policiers… Comment le gouvernement compte aider les fonctionnaires à se loger

Le Comité interministériel du logement des agents publics se réunit pour la troisième fois afin de trouver des solutions aux logements des fonctionnaires. Le salaire de base a longtemps été gelé tandis que les prix de l'immobilier grimpaient en flèche.

Nouvelles constructions, mutualisation des ressources existantes: à Bordeaux, le gouvernement va une nouvelle fois plancher sur des remèdes aux difficultés de logement des fonctionnaires, dont le salaire de base a longtemps été gelé tandis que les prix de l'immobilier grimpaient en flèche.

"Pendant deux ans, j'ai habité chez mon frère sur le canapé", raconte Anne-Marie, une conservatrice de bibliothèque revenue travailler à Paris en 2019 après plusieurs années dans les Alpes-Maritimes.
Licencier les fonctionnaires : fin du tabou ? – 10/04
Licencier les fonctionnaires : fin du tabou ? – 10/04
40:04

"Quand je suis arrivée, je gagnais moins de 2.500 euros", poursuit-elle. Avec ce salaire, "je n'aurais pu me loger que dans un studio, à plus de 45 ans", déplore Anne-Marie, qui n'a pas souhaité donner son nom de famille.

La délivrance est finalement venue d'un changement de situation familiale: "j'ai rencontré quelqu'un, on s'est installés ensemble et j'habite maintenant à Montreuil (Seine-Saint-Denis, NDLR) en couple." Comme Anne-Marie, de nombreux fonctionnaires peinent de plus en plus à se loger. C'est pour tenter de leur apporter des solutions que le gouvernement a créé en 2023 un Comité interministériel du logement des agents publics (Cilap), qui se réunit pour la troisième fois, au centre hospitalier universitaire de Bordeaux.

Des logements de fonction d'un nouveau type

Le député Renaissance David Amiel a également été chargé en novembre d'une mission sur le logement des agents publics, dont il doit présenter les conclusions aux ministres Stanislas Guerini (Fonction publique) et Guillaume Kasbarian (Logement).

Selon Le Parisien, il envisagerait notamment de réserver des logements sociaux aux travailleurs de "première ligne". Et il explique: "Il s’agirait de logements de fonction d’un type nouveau. Car en cas de changement de profession, sauf exceptions, l’agent devra libérer le logement pour permettre à un successeur de se loger". Et il ajoute: "Il pourra également s’agir de résidences temporaires pour des agents publics nouvellement mutés, afin de leur donner un peu de temps pour trouver leur propre logement".

Plusieurs initiatives ont déjà été prises ces derniers mois: indemnité de résidence pour des milliers d'agents publics exerçant près de la frontière suisse, études pour construire de nouveaux logements réservés aux fonctionnaires sur des terrains appartenant à l'Etat, site d'annonces immobilières à destination des agents...

20% du budget des Français

"Le logement représente près de 20% du budget des Français aujourd'hui", chiffrait le gouvernement en juillet lors de la création du Cilap. Or la valeur du point d'indice, qui sert à calculer le traitement (salaire de base) des fonctionnaires, a été quasiment gelée entre 2010 et 2022. Avec un pouvoir d'achat en berne, "de nombreux agents publics" ont donc été contraints de se loger plus loin de leur lieu de travail et d'effectuer "parfois plus de deux ou trois heures de transport" au quotidien, soulignait le gouvernement à l'été 2023.

Pour Clément, enseignant dans une université parisienne, "le fond du problème, c'est que le salaire ne suit pas du tout." Agent contractuel, il touche chaque mois 2.800 euros nets, auxquels s'ajoutent 8.000 euros de primes annuelles pour compenser ses heures supplémentaires. "Je suis bien payé", admet-il volontiers - le salaire net moyen dans la fonction publique est de 2.431 euros par mois.

Pourtant, "même avec mon salaire j'ai passé huit mois à chercher" un logement T3 (avec deux chambres) pour pouvoir accueillir l'enfant qu'il a eu avec son ex-compagne, explique Clément. "Quand on divise (son) salaire par trois et qu'on regarde le prix des T3 en région parisienne, en fait on s'aperçoit qu'on est en dessous absolument tout le temps", se désole-t-il, en référence à l'exigence de nombreux bailleurs que leurs locataires gagnent au moins trois fois le montant du loyer.

"Il y a urgence"

Clément a bien tenté de solliciter le service des ressources humaines de son université pour obtenir de l'aide. Ils "m'ont proposé des appartements dans les cités universitaires. Ce sont des T3 qui font 22 m2, je ne sais pas comment ils comptent leurs pièces", soupire l'enseignant, qui a fini par trouver un logement "en petite ceinture" de la capitale.

Les initiatives du gouvernement en matière de logement sont surveillées de près par les syndicats, avec lesquels Stanislas Guerini a prévu une série de concertations dédiées. Mi-décembre, la FGF-FO (2e syndicat) sonnait ainsi l'alarme dans un communiqué de presse: "Il y a urgence à mettre en place une vraie politique de logement globale améliorant l'accès au locatif privé, intermédiaire et social, les dispositifs d'attributions de logements, l'offre de logements (...) accessibles à tous les agents et l'indemnité de résidence." Le syndicat a entre-temps suspendu sa participation aux réunions avec l'administration et le gouvernement, mécontent de leur politique salariale.

D.L. avec AFP