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HLM: pourquoi les bailleurs sociaux peuvent expulser les dealers et leur famille

A la demande du bailleur social Côte d'Azur Habitat, la justice a acté l'expulsion d'une mère et de son fils de leur logement HLM. Une première en France.

Pour la première fois, un locataire HLM est expulsé à cause du mauvais comportement de son enfant. Le tribunal judiciaire de Nice a décidé d'expulser une locataire HLM d'un logement géré par le bailleur social Côte d'Azur Habitat, raconte le Figaro. La raison? Le fils de cette locataire avait été condamné à 20 mois de prison pour trafic de stupéfiants et pour de nombreuses dégradations au sein de l'immeuble. La mère de famille devra, elle, payer en plus une amende de 500 euros.

Côte d'Azur Habitat a réagi en déclarant : "Le tribunal judiciaire a considéré que l'existence et la gravité des troubles ont été suffisamment rapportées pour caractériser le défaut de jouissance paisible des lieux loués que tout locataire, ou tout occupant de son chef, doit respecter".

72 procédures engagées

Dès sa prise de fonction en juillet 2020, Anthony Borré, premier adjoint au maire de Nice et président de l'Office de Côte d'Azur Habitat, avait annoncé qu'il se montrerait ferme face aux locataires HLM qui commettraient des délits. "22.000 demandeurs de logement sociaux sont actuellement en attente sur la métropole. Je souhaite montrer qu'un logement social, ça se mérite. Quand on a la chance d'en avoir un, la moindre des choses c'est de respecter les lois de la République", avait-il déclaré au Figaro. Depuis un an, 72 procédures du même ordre ont été engagées.

Mais sur quelle base légale repose ce type de procédure? L'article 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 déline les obligations qui incombe au locataire. Ce dernier est notamment obligé "d'user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée par le contrat de location".

"La notion de destination utilisée dans l’article 7 précité permet de sortir du cadre strict de l’habitation et de sanctionner toute déviance même hors de l’habitat, comme par exemple, le détournement de l’usage d’une cave", souligne l'avocat Xavier Demeuzoy sur le site village-justice. Lorsque le bailleur s’aperçoit que son locataire exerce une activité illicite ou accomplit un acte illicite dans les lieux loués (exemples : prostitution, trafic de stupéfiants, etc…) et afin de ne pas voir engager sa responsabilité en tant que propriétaire du logement, il est préférable pour le bailleur d’entamer une procédure de résiliation du bail", précise-t-il.

"Par ailleurs, la demande en résiliation de bail doit être portée à l’égard de tous les occupants du logement, puisque le comportement des personnes hébergées par le locataire peut être suffisamment grave pour justifier qu’il soit mis fin à la relation contractuelle", détaille-t-il encore. Il s'agit ici d'une disposition qui s'applique autant à un bailleur privé qu'à un bailleur social.

Un nouveau règlement adopté en mars

Par ailleurs, Côte d'Azur Habitat a adopté un nouveau règlement le le 25 mars. Les HLM de Nice peuvent ainsi plus facilement expulser un locataire. De plus, la mairie, le parquet et la préfecture de Nice ont fait voter une convention pour permettre à Côte d'Azur Habitat d'être informé d'une condamnation pénale d'un habitant de ses HLM. "Nous marquons un principe simple 'Pas de logement social pour les ennemis de la République' (...) pour ceux qui attaquent les policiers, agressent les agents, qui commettent de manière répétée du trafic de drogue là où l'on sait qu'une minorité gêne une majorité excédée et silencieuse", expliquait à l'époque Anthony Borré.

Selon la gravité de l'atteinte au règlement (trafic, agression, incivilité...), le locataire recevra une mise en demeure suivie d'une convocation pour un rappel à l'ordre ou fera directement l'objet d'une plainte. S'il ne part pas de lui-même, la procédure de résiliation du bail sera transmise à l'appréciation d'un juge civil qui tranchera. La convention prévoit la transmission à l'office HLM des condamnations pénales mais aussi des simples mains courantes des forces de police.

Un nouveau réglement qui n'est pas au goût de tous. "Imaginez la famille dont un adolescent se comporte mal", interrogeait en avril dernier le directeur régional de la Fondation Abbé Pierre, Florent Houdmon. "Est-ce que la punition collective est la bonne réponse? C'est injuste et assez aberrant pour les autres occupants", non condamnés mais visés par l'expulsion, voire "irresponsable" selon lui. "Je ne nie pas le droit à la sécurité. Il y a des familles qui subissent le manque de présence policière et d'actions de prévention, mais quand ce ménage aura quitté son HLM, on va le retrouver ailleurs dans des copropriétés dégradées du parc privé. La réponse est dans la répression et la prévention. Lier ça au droit au logement, c'est compliqué", estimait-il. "En quoi les parents et les autres enfants sont-ils des ennemis de la République?", interrogeait par ailleurs de son côté Teresa Maffeis, de l'Association pour la démocratie à Nice (ADN) et Droit au logement (DAL 06), qui réclame "plus de mixité sociale dans la ville".

https://twitter.com/DianeLacaze Diane Lacaze Journaliste BFM Éco