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Investissement locatif : un remède pour protéger son épargne contre l’inflation?

Le marché immobilier peut mis sous pression en période de forte inflation.

Le marché immobilier peut mis sous pression en période de forte inflation. - Pixabay / Schluesseldienst

[AVIS D'EXPERT] L'immobilier est souvent présenté comme un investissement intéressant en temps de forte inflation. Mais la réalité est plus nuancée. Décryptage de notre expert Bassel Abedi, fondateur de Horiz.io (ex-Rendementlocatif.com).

La hausse des prix depuis plusieurs mois, liée notamment à l’augmentation des cours de l’énergie et des matières premières, est accentuée par la guerre en Ukraine. Cette inflation pourrait bien inquiéter certains investisseurs souhaitant protéger leur argent. Mais alors, comment mettre son argent et son patrimoine en sécurité? L’investissement locatif pourrait-il être une solution? On fait le point.

Quelle est l'origine de l’inflation?

L’inflation se définit par une augmentation globale des prix, avec pour conséquence principale la perte de valeur de la monnaie et donc du pouvoir d’achat. Il faut donc dépenser plus pour obtenir une chose identique. L’inflation est souvent multifactorielle, avec des causes comme le déséquilibre entre l’offre et la demande (et donc, ce qui est rare devient cher) ou encore la hausse des prix des matières premières, comme l’énergie et donc les biens et services qui en dépendent.

En février, l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économiques) a mesuré une inflation moyenne de 7,7% sur un an dans ses pays membres, du jamais-vu depuis 1990 (5,5% sans l’alimentation et l'énergie). Aux Etats-Unis, l'inflation atteint même 8,5% sur un an en mars, un record depuis... 1981.

Cette forte hausse des prix est principalement liée à la reprise de la consommation des ménages et des activités économiques liées à la sortie de crise du Covid ainsi qu'aux gigantesques plans de relance ou de soutien contre la crise, ce qui a provoqué un afflux énorme de liquidités dans l'économie. La demande a alors rapidement augmenté, avec une offre pas toujours à la hauteur et donc des difficultés à y répondre, au moment où les chaînes d'approvisionnement étaient désorganisées par la pandémie. Nous avons alors pu remarquer une envolée significative des prix de nombreuses matières premières comme le bois, l’acier, mais aussi et surtout les énergies (pétrole, gaz). Cela risque de s’accentuer dans les mois à venir, avec la guerre en Ukraine.

Investir dans l’immobilier : la solution contre l’inflation?

Pour se protéger contre cette inflation, nous pouvons nous demander si investir dans l’immobilier pourraît être la solution. En effet, le foncier est l’un des actifs non-financiers préférés des investisseurs depuis toujours. Moins exposé à la conjoncture économique, l’immobilier reste un investissement fiable qui ne perd normalement que très peu de valeur et surtout sur le long terme, même en cas de crise. Mais, cette idée reste à nuancer quelque peu. En effet, avec la sortie de crise du Covid d’une part, et la guerre en Ukraine d’autre part, l’hypothèse d’une baisse des prix de l’immobilier pourrait être envisageable, même s’il est trop tôt pour le dire et prédire.

Concernant les revenus locatifs, nous aurions tendance à penser que les loyers n’ont pas baissé, voire augmenté, surtout dans les zones urbaines et périurbaines, et que l’investissement locatif reste une solution fiable pour s’assurer un revenu mensuel. Et, investir dans un bien immobilier locatif, c’est pouvoir générer des loyers grâce à son bien immobilier. À long terme, comme les loyers évoluent en fonction de l’inflation, il serait tout à fait envisageable d’imaginer une hausse de ceux-ci, ce qui pourrait profiter alors aux investisseurs.

En effet, concernant un bail d’habitation nue ou meublée, l’indexation des loyers (hors charges) est calculée à partir de l’indice de référence des loyers (IRL). Ainsi, un propriétaire bailleur est en droit d’augmenter le loyer de son locataire une fois par an. Le calcul de cette augmentation de loyer se fait à partir de l’IRL fixé tous les trimestres par l’Insee.

Mais, une crise économique peut aussi affaiblir les locataires, et donc leur capacité à honorer les loyers ou même leur possibilité à être candidat à la location. Et ce, pendant que l’investisseur doit continuer à payer les mensualités de crédit et supporter les taxes souvent élevées de l’immobilier en France (sur les revenus fonciers, la taxe foncière, etc.). Il faut donc bien peser les pour et les contre avant d’investir dans l’immobilier pour du locatif en période d’inflation. Il convient aussi de penser qu’une éventuelle revente pourrait attendre. En effet, à court terme, les prix de l’immobilier pourraient subir une baisse ponctuelle. Il ne serait donc pas du tout judicieux de revendre à un moment où l’inflation est au plus haut et il faudrait attendre une reprise économique pour envisager une revente de son bien immobilier. Ceci est donc aussi à prendre en considération.

Quid des taux de crédit?

Une forte inflation accompagnée d’une hausse des taux de crédit provoquerait une grosse pression sur les prix. Emprunter pour acheter un bien immobilier qui pourrait prendre de la valeur est judicieux quand le taux fixe de l'emprunt est bas et les prix des logements en hausse sur une longue période. Si la hausse des taux de crédit immobilier est soudaine, la hausse des revenus est lente et progressive. À court terme, cela pourrait alors être en défaveur des investisseurs, avec une perte du pouvoir d’achat immobilier fortement notable. Et même une augmentation des revenus ne compenserait pas cette augmentation des taux de crédit.

Ainsi, il conviendrait d’investir dans l'immobilier à crédit à taux fixe (ou bien en direct en pleine propriété, ou en achetant des parts de supports immobiliers détenues dans des sociétés civiles (SCI, SCPI, etc.), ou en recourant à des solutions dotées d'avantages fiscaux).

En période inflationniste, l'immobilier peut être une valeur sûre et protectrice du fait de l'indexation des loyers sur l'indice des prix. Mais, l'évolution des tarifs répond également à la loi de l'offre et de la demande, parfois incertaine. Enfin, il faudrait aussi prendre en considération les dispositifs d'encadrement qui pourraient se renforcer et limiter la rentabilité locative.

Par Bassel Abedi, fondateur de Horiz.io