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Fiscalité immobilier

L'Assemblée nationale rogne la "niche fiscale Airbnb" en première lecture

Les députés ont voté en faveur d'une proposition de loi qui diminue l'avantage fiscal pour les meublés de tourisme.

Après une longue gestation à l'Assemblée, les députés ont adopté lundi en première lecture un texte s'attaquant à la niche fiscale de meublés touristiques comme Airbnb, accusés de nuire à la location de longue durée, alors que la crise du logement alarme.

Mise une première fois à l'agenda au printemps avant d'être reportée sine die, la proposition de loi transpartisane d'Annaïg Le Meur (Renaissance) et Iñaki Echaniz (PS), a été adoptée avec 100 voix contre 25.

"C'est un compromis que nous avons mis un an et demi à mettre sur la table", a salué dans l'hémicycle le député socialiste. "C'est un premier pas", a loué sa co-rapporteure Renaissance.

L'ensemble des députés de gauche, des indépendants de Liot, et l'essentiel de ceux de la majorité ont voté pour. A l'inverse la quasi-totalité des LR et RN ont voté contre, invoquant notamment la défense de "petits propriétaires".

Un abattement fiscal rogné pour les méublés

La mesure la plus emblématique entend réduire à 30% le taux d'abattement fiscal dont bénéficient les revenus issus des locations des meublés de tourisme, contre 71% (pour les meublés de tourisme classés) ou 50% (pour tous les autres meublés) actuellement, avec une exception en "zone rurale très peu dense" où l'abattement resterait à 71%.

Le dispositif divise le camp présidentiel. Le rapporteur du budget Jean-René Cazeneuve (Renaissance), a redit lundi son soutien à "la réduction de la niche", mais réclame au préalable les conclusions d'une mission parlementaire sur la fiscalité locative.

"Nous ne pouvons pas rester dans le statu quo", a défendu a contrario le président de la Commission des Affaires économiques Guillaume Kasbarian (Renaissance), appelant à voter la mesure, quitte à l'affiner dans la navette parlementaire. Le ministre de la Cohésion des Territoires Christophe Béchu, a lui appelé à trouver un "point de sortie" sur la fiscalité.

L'exécutif se retrouve dans une situation délicate sur ce sujet : dans le flou des recours au 49.3, il a retenu dans son budget 2024 un article introduit au Sénat, ramenant justement l'abattement à 30% dans les zones tendues, alors qu'il n'était disposé qu'à descendre à 50%.

Mais une source gouvernementale a plaidé l'erreur matérielle et annoncé que la mesure ne serait pas mise en place. "Dans quelle démocratie on vit?", s'est insurgée lundi l'écologiste Eva Sas.

90 jours par an au lieu de 120

Le texte des députés comprend quant à lui d'autres mesures: des obligations de diagnostic de performance énergétique (DPE) pour les meublés de tourisme, et de nouveaux outils de régulation à la main des maires, dont la possibilité d'abaisser de 120 jours à 90 jours par an la durée maximale pendant laquelle une résidence principale peut être louée.

"Plutôt que de complexifier le cadre actuel (...) nous souhaitons travailler avec davantage de villes dans la mise en place des règles existantes", a déclaré lundi Emmanuel Marill, directeur Europe d'Airbnb, dans un communiqué à l'AFP.

La directrice d'Oxfam France Cécile Duflot a elle salué le vote, et appelé à aller plus loin en supprimant "l'ensemble des avantages fiscaux qui favorisent la location de meublés de tourisme de court-terme".

De nombreux élus, notamment en bord de mer, dénoncent la pénurie de logements dans leurs territoires à cause de l'explosion du nombre d'Airbnb.

Des élus qui s'inquiètent d'une "bombe sociale"

Ils soulignent plus largement la "bombe sociale" que représente le logement, au moment où le secteur connaît une grave crise, et réclament une "grande loi", promise par l'exécutif. Les éventuelles annonces du Premier ministre Gabriel Attal lors de sa déclaration de politique générale mardi seront particulièrement scrutées.

Romain Daubié (Modem) portera cette semaine un texte pour faciliter la transformation de bureaux en logements. Les socialistes défendront une proposition de garantie universelle des loyers lors de leur "niche parlementaire" en février.

Certains cadres du groupe Renaissance regrettent que le sujet logement soit abordé dans "plein de petits textes". "Il faut mieux coordonner", plaide une élue.

JLD avec AFP