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Crues dans le Pas-de-Calais: six mois après, les stigmates des inondations toujours présents

Au mois de novembre, le littoral a pour la première fois été touché par de très importantes crues. Une situation qui a duré jusqu'en janvier, malgré quelques jours d'accalmie. Six mois plus tard, les sinistrés vivent toujours avec les conséquences des inondations.

Six mois après, les inondations qui ont sévi dans le Pas-de-Calais sont loin d'appartenir au passé. Factures de réparation, pompes à eau, bâtiments détruits... Les stigmates des intempéries sont bel et bien là.

À Neuville-sous-Montreuil par exemple, certaines zones sont toujours inaccessibles, ou même complètement noyées. Les pompes fonctionnent en continu. Dans toute la région, les crues ont tout autant touché les bâtiments publics et la voirie que les maisons des habitants. Au total, 367 communes ont été reconnues en état de catastrophe naturelle.

Un enchaînement de crues

Tout a débuté le 2 novembre, avec la tempête Ciaran. Des vents jusqu'à 160 km/h s'abattent sur la Côte d'Opale et déjà quelques dégâts sont à déplorer. Une semaine plus tard, la dépression fait monter les cours d'eau et le Pas-de-Calais passe en vigilance rouge pour crues.

Régulièrement alors, l'Aa, la Canche ou encore la Liane sortent de leurs lits et provoquent des milliers d'euros de dégâts. Après une accalmie de courte durée, le même scénario se répète en janvier, alors que les sols sont déjà saturés d'eau.

"L'eau est montée jusque-là", montre Sabrina. Elle a acheté sa maison à Saint-Omer en avril 2023, et les rénovations qu'elle avait entamées ont été complètement chamboulées par les inondations: le placo a dû être retiré, sa pompe à chaleur neuve est hors d'usage.

"J'aurais pu rentrer en fin d'année 2023 dans la maison, et maintenant ça a provoqué du retard et j'espère pouvoir rentrer en fin d'année 2024, pour pouvoir enfin bénéficier de l'achat de ma maison", raconte-t-elle.

Comme la sienne, près de 350 habitations ont été touchées en novembre et en janvier à Saint-Omer. Et dans les marais de la ville, les riverains n'ont pas oublié: les sacs de sable sont toujours présents devant les portes.

Des réparations au coût important

Au total, plus de 400.000 personnes ont subi les crues. Pour la première fois dans les Hauts-de-France, un préfet a été délégué aux inondations. Les factures sont lourdes: plusieurs centaines de millions d'euros de réparations sont annoncées.

À Saint-Omer par exemple, les dégâts sont estimés à 11 millions d'euros. "C'est une somme très importante, qui s'affine, et qui comprend l'impact des inondations sur nos voiries", explique le maire François Decoster. "Près de 4,6 millions d'euros de voiries doivent être rénovées."

"Ce sont aussi des opérations de fascinage pour pouvoir conforter des berges qui ont été durement impactées", note-t-il.

Le bilan financier comporte également l'achat en urgence de matériel à hauteur de 50.000 euros pour faire face aux crues, tels que des sacs de sable, des planches ou des bâches ou encore le curage de fossés qui représente un coût de 100.000 euros pour la municipalité.

Un long travail

Petit à petit, les réparations s'enchaînent dans le Pas-de-Calais, qui tente de se reconstruire et surtout de faire en sorte de mettre sa population à l'abri. "Tout le dossier de reconstruction, c'est aux alentours de 200 à 300 heures de travail", souligne notamment le maire de Neuville-sous-Montreuil Olivier Deken.

"Il faut revoir le principe des pompes, est-ce qu'elles sont toujours aussi efficaces? Elles sont certainement obsolètes, elles tournent 24 heures sur 24, elles doivent être usées", poursuit-il.

Les habitants sont également nombreux à demander une action des pouvoirs publics, après des semaines de ras-le-bol et de fatigue. "Ça ne peut plus durer", confiait il y a quelques mois un sinistré de Quernes.

De nombreuses maisons sont encore inhabitées et inhabitables. "Beaucoup n'ont pas commencé la reconstruction de leur maison", assure Olivier Deken. "Je ne sais pas si 20% des gens sont revenus."

Une aide de l'État de 70 millions d'euros

L'État a déjà annoncé prendre en charge une partie des frais liés aux réparations après les inondations. Déjà impliqué lors des inondations de la mi-novembre, le gouvernement avait fait appel, dans l'urgence, à la solidarité européenne et des "méga-pompes" avaient été envoyées depuis les Pays-Bas.

Gabriel Attal s'est également rendu à trois reprises sur les zones sinistrées depuis sa nomination en tant que Premier ministre. En mars dernier, il y a annoncé une enveloppe supplémentaire de 10 millions d'euros pour la reconstruction des équipements publics, portant l'enveloppe globale avancée par l'État à 70 millions d'euros.

Certains dégâts ne pourront néanmoins pas être réparés. À Blendecques, un quartier entier, composé d'une dizaine de maisons, devra être rasé et pourrait devenir une zone naturelle. Même chose pour une rue d'Arques.

Matthieu Giboire et Clément Kaminski, avec Juliette Moreau Alvarez