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Comment le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky profite de la relance du charbon à Saint-Avold

L’homme d’affaires tchèque avait racheté deux centrales il y a quatre ans, avant leurs fermetures. Il pariait sur leur prolongation en raison du manque de production d’électricité.

Le pari est déjà réussi pour Daniel Kretinsky. Le gouvernement va relancer la centrale à charbon de Saint-Avold, en Moselle, pour faire face à la pénurie de gaz et d’électricité pour l’hiver prochain. Le décret sera publié d’ici mi-juillet et actera l’autorisation du redémarrage de la centrale qui a pourtant fermé en mars dernier… Elle pourra fonctionner les deux prochains hivers et va assurer à son propriétaire Daniel Kretinsky la rentabilité de son investissement.

"Saint-Avold sera rentable en 2022", assure Camille Jaffrelo, la porte-parole de Gazelenergies qui exploite la centrale. Et pour cause, l’électricité sera vendue aux prix de marché qui tournent encore autour de 300 euros/MWh au lieu de 60 euros habituellement. Cependant, nuance-t-elle, les achats de charbon vont coûter cher.

Alors que le charbon russe est sous sanction, Saint-Avold va s’approvisionner en Australie et en Afrique du Sud, avec les coûts de transports importants. Sans oublier, nous explique une autre source, que "les crédits carbone indispensables pour obtenir l’autorisation de produire, ils vont peser sur la rentabilité". Ils devraient coûter environ 30 millions d’euros. La centrale n’a rien rapporté, mais rien coûté non plus depuis trois ans car elle a très peu tourné.

La stratégie de Daniel Kretinsky paie. Il avait racheté la centrale de Saint-Avold fin 2018 à l’Allemand Uniper. Emmanuel Macron venait alors d’annoncer sa fermeture dans le cadre de la loi "Energie climat". Mais l’Est de la France était aussi touché par la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim.

"Daniel Kretinsky pensait que la France, ainsi que l’Allemagne voisine, ne pourraient pas se passer de deux centrales électriques indispensables" explique un de ses proches.

La pénurie d’électricité, à cause de l’arrêts d’une dizaine de réacteurs nucléaires, et de gaz, en raison de la guerre en Ukraine, valident sa stratégie.

Trois ans de conflit social à Gardanne

En revanche, la situation est beaucoup plus difficile sur le second site de Gazelenergies, à Gardanne. La centrale à charbon près de Marseille a cessé de fonctionner en 2018 et devait être transformer en production d’électricité à base de biomasse. Mais le site a été bloqué pendant trois ans par un conflit social violent mené par plusieurs branches de la CGT, fédération énergie et locale des Bouches-du-Rhône.

En octobre dernier, la centrale a même été envahie par près de 80 individus cagoulés et armés… Un plan social de 43 personnes, suivi d’un plan de départs volontaires de 40 personnes est en cours. Au total, les trois années d’arrêt ont coûté une centaine de millions d’euros à Daniel Kretinsky qui est, contrairement à Saint-Avold, loin d’avoir réussi son pari à Gardanne.

La nouvelle centrale biomasse fonctionne depuis le mois de février. Mais l’homme d’affaires, qui a fait fortune en investissant dans des gazoducs en Europe de l’Est, sait qu’il lui faudra plusieurs années pour rentabiliser son investissement initial inférieur à une centaine de millions pour les deux centrales.

Matthieu Pechberty Journaliste BFM Business