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Faut-il interdire TikTok? Tech&Co a interrogé des experts pour tenter d'y répondre

Dans son dernier numéro, Tech&Débat est allé à la rencontre d'experts pour comprendre les controverses qui concernent TikTok.

Les Etats-Unis réfléchissent sérieusement à interdire TikTok sur leur territoire et le gouvernement français, comme d'autres, interdit à ses fonctionnaires d'utiliser l'application de leurs téléphones professionnels. D'une application de divertissement, TikTok est devenu une réelle arme numérique potentielle du gouvernement chinois, à tel point que la question de son interdiction totale se pose de plus en plus.

La formule de la plateforme fonctionne: des vidéos courtes, qui nécessitent peu de concentration. Et ce succès n'est pas près de s'arrêter. "D'ici 2024, on attend un doublement du revenu publicitaire généré par TikTok au niveau mondial", prédit Stéphanie Laporte, directrice de l'agence social Media Otta.

L'outil est pensé pour pousser les utilisateurs à faire preuve de créativité et les retenir le plus longtemps possible.

"Toutes sortes de données qui portent sur notre comportement et nos centres d'intérets sont collectées. Ainsi, l'algorithme va sélectionner les vidéos qui vont avoir la plus forte probabilité de nous retenir sur TikTok", explique Marc Faddoul, chercheur en intelligence artificielle.

"C'est une arme de distraction massive", avance Michael Stora, psychanalyste. "d'autant plus chez des jeunes mineurs". TikTok a fait de la contraction de l'espace temps sa marque de fabrique. Les utilisateurs se retrouvent dans des "bulles algorithmiques" qui les enferment dans leurs centres d'intérêts et les confortent dans leurs opinions.

Dans un contexte géopolitique tendu, la grande question que se posent de nombreux gouvernements et régulateurs est celle de la récolte et de l'utilisation des données des utilisateurs par TikTok.

La plateforme a reconnu que certains de ses employés chinois avaient accès aux données des utilisateurs américains et européens. TikTok compte une cellule du Parti Communiste Chinois (PCC) au sein de son conseil d'administration comme l'exige le gouvernement du pays.

"Pour l'instant, il n'y a pas de preuves d'une inférence directe de la part du PCC sur le contenu qui est proposé sur l'application. La Chine tient son empire technologique d'une main de fer. On peut très bien imaginer qu'il cherche à exercer une influence sur la ligne éditoriale de modération de TikTok", avance Marc Faddoul.

Depuis plusieurs mois, les interdictions s'enchaînent. Les Etats-Unis, le Canada, la Commission européenne, le Parlement européen, le Danemark, ou encore le Royaume-Uni ont interdit à leurs députés d'utiliser l'application sur leur téléphone professionnel afin d'empêcher l'envoi de données sensibles à la Chine.

De son côté, TikTok contre-attaque. Le PDG de TikTok était auditionné par le Congrès américain le 23 mars, et il est venu défendre les intérêts de la plateforme. Face à une possible interdiction de TikTok sur le territoire américain, des influenceurs ont été mobilisés par TikTok.

En France, Claude Malhuret, sénateur, est à l'initiative d'une commission d'enquête au Sénat sur les pratiques de TikTok. Elle doit aboutir, d'ici l'été, à des recommandations concernant l'encadrement de la plateforme.

Margaux Vulliet