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L'anti-Tinder: Hinge et ses algorithmes débarquent en France

Alors que l’application vient de débarquer en France, des utilisateurs partagent leur avis et donnent leurs premières impressions.

Une énième application à la sauce Tinder? Chacun se fera son avis, mais la promesse de Hinge est de mettre à disposition une application qui est faite pour être supprimée rapidement.

"On a imaginé Hinge pour les personnes qui recherchent une relation à long terme", explique à Tech&Co Justin McLeod, le fondateur de l’application qui était de passage à Paris le 14 mars.

Une proposition ambitieuse qui mise sur la qualité des profils recommandés. Vous prenez le temps de remplir un profil complet, comme le font les autres utilisateurs. En clair, si vous recherchez un plan d’un soir, passez votre chemin, même si dans les faits, c’est un peu différent comme le démontrent les utilisateurs interrogés par Tech&Co.

Fondée il y a dix ans, l'application arrive tout juste en France, et est disponible depuis le début du mois mars. Ici pas de swipe comme sur Tinder. Pour marquer un signe d'intérêt pour un profil et initier la conversation, l’utilisateur peut "aimer" une réponse à une question à laquelle a répondu la personne, ou "aimer" une photo par exemple. Ainsi, plus vous "aimez" certains types de personnes, plus Hinge en apprend sur vos préférences.

Hinge veut être l'anti-Tinder
Hinge veut être l'anti-Tinder © Hinge

Léo, lui, découvre l’application. Ce parisien de 24 ans ne connaissait pas Hinge, il est plutôt un utilisateur de Tinder, mais a vu quelques publicités sur Instagram. Il vient de créer son profil pour l’occasion et donne ses premières impressions. 

Créer un profil sur Hinge prend plus de temps que sur les autres applications, cela nécessite de remplir une page complète. Six photos minimum sont obligatoires, l'utilisateur peut indiquer sa taille, son travail, son niveau d’études, sa religion, sa ville d’origine, son signe astrologique, son envie ou non d’avoir des enfants, ou encore sa consommation de tabac ou de cannabis. Grâce à toutes ces informations fournies, l’algorithme va pouvoir proposer les profils les plus susceptibles de plaire. 

L’originalité de l’application tient aux fonctions originales qu’elle propose à ses utilisateurs qui peuvent répondre à des questions ou rédiger des accroches guidées: mon dimanche typique, ma peur la plus irrationnelle, mes talents cachés, une info inutile que j’adore, le secret pour me séduire, etc. L’utilisateur a aussi la possibilité de publier une note vocale et une courte vidéo. Léo a mis une note vocale et usé de son humour grinçant: "Hinge fait appel à notre créativité, on peut répondre de manière marrante". 

Il a pris le temps de créer son profil et de répondre à toutes les questions,

"J’ai trouvé les questions assez intéressantes et originales", observe-t-il.

Une fois le compte terminé, les premiers profils s’affichent.

"Je suis agréablement surpris par les profils proposés, il y a beaucoup de filles qui me plaisent physiquement", confie Léo, sourire en coin.

"Une opportunité supplémentaire"

Pas besoin de cliquer sur un profil pour avoir plus d’informations sur la personne, tout s’affiche. Donc par définition l’utilisateur passe plus de temps sur un profil. Par exemple, la taille de sa partenaire est quelque chose qui compte pour lui, et c'est une information qui s’affiche automatiquement sur un profil Hinge, ce qui n’est pas le cas de Tinder.

Au cours des premières heures passées sur l’application, Léo reçoit quelques "likes" et "aime" des profils et photos en retour. Sauf que le nombre de "likes" est limité à 8 par jour sans compte Premium. La qualité avant la quantité donc.

Lui n’attend pas des applications de trouver le grand amour, mais celles-ci "donnent l’occasion de s’ouvrir à d’autres perspectives et de découvrir des personnes d’autres horizons, et Hinge donne une opportunité supplémentaire pour cela avec une approche originale", explique-t-il.  

Hinge permet d'affiner ses critères
Hinge permet d'affiner ses critères © Hinge

Les profils qui lui ont été proposés s'affichent selon un algorithme spécifique utilisé par Hinge. L’algorithme est inspiré de celui de Gale-Shapley qui s'intéresse aux pairs et aux associations. Ainsi, l’utilisateur peut compter sur l’algorithme pour lui proposer des profils susceptibles de lui plaire.

"Plus l’utilisateur va passer de temps sur l’application, plus cela va entraîner l’algorithme et il va devenir de plus en précis dans ses recommandations", explique le fondateur de Hinge.

L'entreprise a aussi fondé le Hinge Labs, une équipe de chercheurs et d'experts "qui observent l'évolution de la culture du dating dans notre société, quelles sont nos meilleures opportunités pour aider nos utilisateurs, et ceux sont qui ont établi le guide Hinge que nous mettons à disposition de nos utilisateurs", souligne Justin McLeod.

Une manière pour l’application de se démarquer de Tinder, alors même que les deux entités font partie du même groupe. En effet, Hinge a cédé la totalité de ses parts à Match Group en 2021. Justin McLeod justifie cette décision: "au début Hinge était petit mais prometteur. Il  était clair que Match Group était le bon partenaire pour nous aider à grandir. Expansion internationale, marketing… nous avions besoin d’un gros investisseur". Et pour cause, Hinge a généré 400 millions de dollars de revenus cette année.

Justin McLeod, le patron de Hinge
Justin McLeod, le patron de Hinge © Hinge

 

Pourtant, à ses débuts Hinge ressemblait fortement à Tinder avant un changement de stratégie en 2016. Et il y a une petite anecdote personnelle derrière tout ça. Après avoir donné une interview au New York Times, qui lui a donné un déclic, Justin McLeod a sauté dans un avion direction la Suisse où vivait son ex-petite copine Kate. Elle a finalement renoncé à son mariage et est venue vivre avec lui aux Etats-Unis. Cette histoire a même été adaptée dans un épisode de Modern Love.

"J’ai vraiment changé ma vision sur les relations amoureuses. Quand ma nouvelle relation avec Kate est devenue vraiment stable, j’ai voulu relancer Hinge en 2016 avec une application plus sérieuse pour des relations durables", décrit-il. 

Eudes, un Parisien de 26 ans, a commencé à utiliser l’application alors qu’il habitait en Angleterre. "Je venais de me séparer de mon ex-copine et ma colocataire était sur Hinge à ce moment-là. Elle m’a alors créé un profil", se souvient-il d'un air amusé.

Sauf qu'il y a le Covid et les confinements. Il est revenu en France en pleine pandémie pour le travail. Durant cette période, il allait et venait sur les applications de rencontre. Hinge n’était pas encore disponible en France et évidemment "il n'y avait quasiment que des profils internationaux sur l’application. Ça ne me dérangeait pas car dans ma tête j’étais toujours un peu à Londres". 

Finalement c’est grâce à Hinge qu’il a rencontré une fille avec qui il est resté près de deux ans. Hinge aurait tenu sa promesse? Pas sûr puisqu'Eudes est de nouveau sur l’application. "Maintenant que l’application est disponible en France et avec les nombreuses publicités qui passent, des utilisatrices françaises arrivent petit à petit sur Hinge", observe-t-il.

Pour lui, cela reste une application de rencontres de plus et c’est toujours "une forme de roulette russe."

"Après la différence avec Tinder c’est que tu es obligé de réfléchir un peu quand tu crées ton profil, alors cela donne des profils plus intéressants à consulter. Sur Tinder, les descriptions sont souvent maigres ou sans personnalité". 

Une nouvelle occasion donc pour les célibataires français de trouver l’amour parmi la panoplie d’applications qui existent déjà. D’ailleurs, les plus jeunes désertent Tinder. Pour anticiper ce phénomène, Hinge s’appuie sur sa promesse de départ. Etre clair avec son identité "une application faite pour pour être supprimée" et "cela continuera à attirer, on s’adresse à un public sélectif dans ses recherches", renchérit Justin McLeod.

Même si les utilisateurs interrogés n'y voient pas une application qui va révolutionner leurs rencontres amoureuses, d'autres ont bien trouvé l'amour et se sont même mariés. C'est le cas de  Pete Buttigieg, premier candidat ouvertement gay à l'élection présidentielle américaine en 2020. Il a rencontré son mari Chasten Glezman sur Hinge. "Dès que j'ai vu sa photo, il y avait quelque chose dans ses yeux. "J'ai dit: 'Je dois rencontrer ce gars.' Et puis je l'ai fait", a confié Pete Buttigieg dans une interview à CNN.

Margaux Vulliet