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Télétravail: les managers moins réticents, les salariés plus pragmatiques sur les difficultés

La dernière édition du Baromètre Phygital Workplace du cabinet de conseil Julhiet Sterwen révèle de sensibles évolutions dans la perception de ce nouveau mode de travail hybride autant chez les managers que chez les salariés.

Le pli est pris. Dans de très nombreuses entreprises, le travail hybride, qui combine un ou deux jours de télétravail et trois ou quatre jours de présentiel, commence à devenir la norme. Il devient même un argument de poids pour attirer et retenir les nouveaux talents.

La huitième édition du Baromètre* Phygital Workplace du cabinet de conseil Julhiet Sterwen révèle néanmoins de sensibles évolutions dans la perception de ce nouveau mode de travail.

Le télétravail est-il un acquis social?
Le télétravail est-il un acquis social?
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Le plus notable est la meilleure acceptation de la part des managers, au départ réticents à l'idée de travail hybride car s'inscrivant dans une tradition assez forte du présentéisme en entreprise.

La confiance prend doucement le pas sur le contrôle

L'étude montre que 66% des managers interrogés sont touchés par l'impact du travail hybride et 92% déclarent être désormais à l’aise dans ce modèle hybride, alors que 75% d'entre eux ont dû mettre en place de nouvelles façons pour superviser les équipes. 59% estiment difficile de faire revenir leurs équipes au 100% présentiel.

"Cette adoption des managers, c'est la vraie nouveauté" de 2024, explique pour BFM Business, David Gautron, Partner au sein du cabinet Julhiet Sterwen. "Il y a une tendance claire de s'interroger par exemple sur les bonnes actions à mener en équipe en fonction de qui est en présentiel et qui est en distanciel".

La notion de confiance prend le pas sur la notion de contrôle. Pour la "première fois en 8 ans, 54% des responsables interrogés mettent en avant 3 qualités d’un bon manager: l’écoute, l’accompagnement et la confiance. Le fameux manager contrôlant semble enfin perdre du terrain", peut-on lire.

Néanmoins, preuve que les habitudes ont du mal à évoluer, 29% des managers sont en demande de formations spécifiques pour leur apprendre à mieux gérer le travail hybride.

"Mais on perçoit déjà une adaptation des managers aux "séquences" dans l'entreprise, comme l'optimisation du temps de réunion ou la mise en place d'actions prédictives. L'hybridation a accéléré ces évolutions", poursuit David Gautron.

41% des salariés hybrides se sentent isolés, +5 points en un an

Si la perception des managers évolue, celle des salariés concernés également. Ainsi, 84% (contre 8%) des travailleurs hybrides voient un impact positif du travail hybride sur leurs besoins (+ 20 points en un an!), mais ils sont également nombreux à prendre conscience des biais de cette organisation: infobésité et saturation.

Pour 25%, la plage horaire de travail s'est élargie, 45% disent recevoir plus d'emails à traiter et estiment que c'est trop.

57% disent qu'il est plus difficile de trouver les informations recherchées, 52% assistent à plus de réunion ce qui conduit à moins de productivité et 35% soulignent que leur équipement à domicile ne leur permet pas de gagner en productivité "malgré un effort de dotation important de la part des entreprises".

Surtout, 41% des salariés se sentent isolés, c'est 5 points de plus en un an et 17% souhaitent la mise en place d'actions correctives. Preuve que tout n'est pas rose dans le travail hybride.

Effet de polarisation

"Les risques de l'hyper-connexion liés au travail à distance, tout comme la multiplication des réunions en visio et la perte de lien social, questionnent régulièrement la qualité de vie au travail du modèle hybride et font planer l’ombre de risques psychosociaux", peut-on lire dans le baromètre.

"Il y a un effet de polarisation: ceux qui s'engagent, s'engagent encore plus, ceux qui étaient distants le sont encore plus, cela accélère le turn-over dans l'entreprise et c'est un catalyseur de la réorganisation des entreprises. On n'est pas tous égaux face à cette situation", analyse David Gautron. "On gagne en flexibilité mais on en fait plus".

*: Etude quantitative ad hoc, réalisée selon un mode de recueil online, via la sollicitation des membres de notre partenaire l’accès panel Dynata. Terrain réalisé du 2 au 17 janvier 2024. Echantillon représentatif de 1.000 salariés d’entreprises de 500 salariés et plus (dont 433 collaborateurs et 567 managers) + Suréchantillon de 300 managers dans des entreprises 500 salariés et plus.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business